dimanche 17 mars 2013

Runiga arrêté, Ntaganda en fuite

Accélération des événements au Nord-Kivu Runiga arrêté, Ntaganda en fuite Les événements se sont accélérés dans la crise au Nord-Kivu, précisément dans le conflit qui oppose les deux factions rivales du M23 : aile Makenga et aile Runiga. L’ancien président politique du M23, Jean-Marie Runiga, a été arrêté au Rwanda. Bosco Ntaganda serait toujours en fuite dans le parc des Virunga avec une trentaine d'hommes. Ce qui nous ramène pratiquement au même scénario d’il y a 4 ans lorsque, au plus fort de la guerre que la coalition armée congolo-rwandaise avait menée contre les FDLR, Laurent Nkunda avait été arrêté, alors que Bosco Ntaganda, devenu allié de Kinshasa, se promenait bonnement. Dans la crise intestine qui fait rage entre les courants de la rébellion M23, les partisans de Sultani Makenga ont pris l'ascendant sur le général Bosco Ntaganda. Les pro-Makenga contrôlent désormais la localité de Kibumba (à 30 km de Goma), obligeant les proches de Ntaganda à fuir vers le Rwanda voisin. Selon Afrikarabia, l'ancien responsable politique du M23 destitué par Sultani Makenga, Jean-Marie Runiga, a été arrêté au Rwanda. Baudouin Ngaruye, un proche de Ntaganda et de Runiga a été "désarmé" à la frontière rwandaise. Il aurait affirmé n'avoir "aucun lien avec Ntaganda", recherché par la Cour pénal internationale (CPI). Le lieutenant-colonel Muhire a également été arrêté à Gisenyi, au Rwanda. Concernant, Bosco Ntaganda, peu d'informations fiables sont actuellement disponibles. L'attaque de Kibumba par les troupes de Makenga, l'a obligé à fuir dans le parc des Virunga, avec 200 de ses hommes. L'aile Makenga affirme que Ntaganda ne disposerait plus "que d'une trentaine de militaires". Le colonel Innocent Zimurinda serait toujours aux côtés de Bosco Ntaganda dans sa fuite, alors que d'autres sources le donnent pour mort dans les combats. A l’issue de cette offensive, la Direction du M23 a, dans un communiqué publié le 16 mars, vite annoncé « à l’opinion tant nationale qu’internationale la fin des opérations militaires engagées par l’Armée révolutionnaire congolaise (ARC) depuis le 9 mars 2013 pour traquer le groupe d’indisciplinés à la solde du Général Bosco Ntaganda. » Le nouveau président du M23, Bertrand Bisimwa, dont l’armée se targue d’avoir « réussi non seulement à mettre hors d’état de nuire l’ensemble du groupe d’indisciplinés mais aussi à établir son contrôle sur toute l’étendue du l’espace investi par les malfrats », se félicite de « la stratégie mise sur pied par notre Armée a permis le retour dans nos rangs d’une vingtaine d’officiers et des plusieurs centaines de nos soldats. » Tout en regrettant le choix pris par « certains officiers, soldats et cadres politiques dont l’ex-Président du Mouvement Bishop Jean-Marie Runiga Lugerero de s’exiler au Rwanda voisin ou de se réfugier au sein des installations de la Mission d’observation des Nations unies pour la stabilisation du Congo (Monusco), en dépit des dispositions prises par notre organisation pour accueillir tous les fils égarés trompés ou pris en otage par le général Bosco Ntaganda. » Près de 600 rebelles congolais trouvent refuge au Rwanda La reprise le 9 mars des combats entre les deux factions du M23 a fait environ 12 000 déplacés qui ont notamment trouvé refuge dans des zones sous contrôle de l'armée ou de la Monusco. Près de 600 rebelles congolais fuyant des combats dans l'Est de la République démocratique du Congo ont trouvé refuge au Rwanda voisin depuis vendredi 15 mars courant, parmi lesquels le chef de l'une des factions du groupe rebelle du M23, a annoncé samedi le gouvernement rwandais dans un communiqué cité par La Libre Belgique. "Une nouvelle vague de réfugiés congolais", dont "environ 600 combattants" fuyant les combats entre rebelles du M23, a traversé la frontière dans la nuit de vendredi à samedi et est arrivée dans le "nord-ouest du Rwanda", indique ce communiqué. Le texte explique que ces "soldats et officiers" ont été "désarmés et placés en détention". Plusieurs blessés ont reçu une assistance médicale de la Croix-Rouge. Bishop Jean-Marie Runiga, le chef de l'une des deux factions du groupe rebelle du M23, figure parmi ces fuyards, précise le texte, alors que selon l’aile Makenga il serait arrêté. L’évolution aussi surprenante que spectaculaire des événements au Nord-Kivu donne quand matière à réflexion assorties de plusieurs questions. Pourquoi à la fin de chaque partie du scénario – celui-ci étant le deuxième – qui implique des rebelles venus déstabiliser cette partie de la RDC, c’est au voisin rwandais que revient l’étonnant rôle, mieux la difficile tâche d’arrêter l’un des pions de la mise en scène ou de la pièce du puzzle dont nous lui reconnaissons la perspicacité, la finesse, les dribbles dans le jeu ? Pourquoi, comme en 2009 avec le tandem Nkunda-Ntaganda, vers la fin de la mise en scène savamment échafaudée mais longtemps découverte par l’esprit éveillé des Congolais, les frères intimement liés dans la défense de la même cause, arrivent à se haïr au point de s’entretuer ? En février 2009, c’est au Rwanda que Laurent Nkunda, alors leader du CNDP et pièce maîtresse dans le conflit sanglant au Nord-Kivu, avait été arrêté comme un apprenti sorcier, alors que Bosco Ntaganda devenait d’un coup allié de Kinshasa, bénéficiant ainsi des faveurs du gouvernement congolais. Véritables tireurs de ficelle dans l’ombre En mars 2013, les véritables tireurs de ficelle dans l’ombre de la crise du Nord-Kivu reviennent à la charge en mettant au point le même scénario, avec quelques différences près ; le contexte poussant à agir ainsi. Après avoir téléguidé l’émiettement de ce mouvement rebelle qu’ils ont aidé à mettre en place, ils ont poussé les deux factions rebelles à s’affronter, question d’atteindre l’objectif : faire disparaître le pion Runiga en simulant son arrestation, comme en 2009, Nkunda. Et pour rester dans cette logique, la même qu’en 2009, je parie que les véritables maîtres du M23 s’arrangeront pour qu’on entende plus parler de Jean-Marie Runiga Lugerero. Il va certainement rejoindre son prédécesseur Laurent Nkundabatware dans ce rôle « ingrat » que les commanditaires leur font jouer. Ensemble, Runiga et Nkunda, Bibles en main et kalachnikov en bandoulière, vont, aidés par leur mentor, bien réfléchir pour relancer un autre scénario. Et à toutes les demandes que Kinshasa va adresser à Kigali pour extrader toutes ces personnalités qu’il vient d’arrêter, les autorités rwandaises vont réserver une fin de non recevoir. Question de faire passer le temps, beaucoup de temps : c’est la politique de l’usure du temps qui aide les esprits évasifs à vite oublier. Mais les Congolais sont loin de vite oublier. Eux dans le territoire desquels se jouent régulièrement, à des époques bien pensées, des scénarii dramatiques savamment montés quelques kilomètres seulement de leur territoire pour le dépeupler, le dépouiller de ce qu’il renferme de plus précieux. Nkunda dans les oubliettes, Runiga sur le point de le suivre, qui sera le prochain cheval de Troie ? Bosco Ntaganda, hier allié de Kinshasa, est l’homme à arrêter à tout prix, quel sera demain le sort de Sultani Makenga qui s’évertue à paraître dans des habits innocents ? Kléber Kungu

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