samedi 25 février 2012

L’UDPS menacée par l’exclusion et l’implosion

RDC
L’UDPS menacée par l’exclusion et l’implosion
Jamais climat n’a été aussi délétère et nuageux au sein d’un parti politique qu’ à l’Union pour la démocratie pour le progrès social (UDPS). Où, présentement, deux menaces planent – l’une consécutive à l’autre : la menace d’exclure tous ses députés qui oseront siéger à l’Assemblée nationale et celle de voir le parti imploser.
Comme le revers de la médaille, le choix fait par certains candidats à la députation nationale est loin d’être le meilleur : celui d’avoir opté pour le label de l’UDPS pour postuler à un siège à l’Assemblée nationale.
En effet, après avoir sablé champagne et organisé des réjouissances après la proclamation des résultats provisoires des législatives du 28 novembre 2011 couplées à la présidentielle par la Commission électorale nationale indépendante (Céni), les députés de l’UDPS se demandent aujourd’hui pourquoi avoir choisi le label du parti dont le leader semble avoir perdu certaines de ses facultés avec l’âge, sauf celle de son radicalisme.
Pour avoir perdu la présidentielle dont il réclame toujours la victoire, Etienne Tshisekedi wa Mulumba refuse que les députés UDPS siègent à l’Assemblée nationale. Il l’a fait savoir par le canal de son conseiller politique d’Etienne Tshisekedi, Valentin Mubake. Celui-ci a menacé d’exclusion tous les députés de l’UDPS qui oseraient siéger au sein de la nouvelle Assemblée nationale.
Selon lui, son parti « ne peut pas accompagner des fraudes massives et des anti-valeurs.»
«Vous allez là bas [Assemblée nationale, NDLR], sachez que dans le cadre de la discipline du parti et de sa lutte, on vous retire le label sur base duquel vous avez été élu et on vous retire le label comme membre du parti », a déclaré Valentin Mubake.
Bien des élus de l’UDPS sont loin de l’entendre de cette oreille. Eux qui, en décidant d’affronter les législatives, ambitionnaient autre chose de se voir interdire l’accès au Palais du peuple par une personne, Etienne Tshisekedi soit-elle. Eux qui n’ont jamais siégé dans une telle institution. Eux qui, pour avoir été choisis par des électeurs, pourront désormais voir leurs conditions de vie changer, avec, au bout du compte : Jeep, garde rapprochée, salaire pas comme celui des fonctionnaires, immunité, autres avantages. Bref, tout ce dont, en dehors de cette voie, ils n’auraient jamais bénéficié.
Le premier à avoir fait les frais de cette mesure est le président du Bureau provisoire de l’Assemblée nationale, Timothée Nkombo Nkisi, élu de la circonscription électorale de Madimba, dans le Bas-Congo. Pour avoir enfreint la recommandation du parti, il a été exclu comme membre de l’UDPS. Gare à aux autres membres de l’UDPS qui s’entêteront à fouler aux pieds la décision du parti !
Les députés de l’UDPS boycottent les travaux de l’Assemblée pour respecter la consigne d’Étienne Tshisekedi, le président de ce parti. Celui-ci, arrivé en deuxième place à la présidentielle du 28 novembre 2011 derrière Joseph Kabila, conteste les résultats de la Ceni et avait déclaré qu’il considérait comme « nulles » les élections législatives du 28 novembre couplées la présidentielle.
Membres de l’UDPS, vous avez dit ? Il y a lieu de s’interroger : qui est membre de l’UDPS, qui ne l’est pas parmi les députés qui s’en réclament ? Lorsqu’on considère les choses telles qu’elles se sont passées durant les législatives, plusieurs candidats voulant se présenter sous le label de l’UDPS (du côté de l’opposition), comme sous celui du PPRD (du côté de la Majorité), pour mettre de leur côté toutes les chances d’être élus, aucun doute que la maison UDPS a accueilli beaucoup d’étrangers, beaucoup de chauve-souris.
Cela dit, que leur coûtera d’être exclus d’un parti dont ils étaient à quelque 10 % membres ? Mais à l’hypothèse que tous sont des membres effectifs de l’UDPS, si d’aventure le parti cher à Etienne Tshisekedi met à exécution ses menaces, il en sortira avec beaucoup de failles qui le conduiront sans conteste à une implosion certaine.
Une situation extrême que certaines personnes proches de cette formation politique ne souhaiteraient jamais voir subvenir. Car de nature à faire le lit de la Majorité présidentielle qui est déjà très forte numériquement avec plus de 70 % de députés, dont 61 pour le PPRD, contre 41 pour l’UDPS.
Ainsi, de son côté, Germain Kambinga, le porte-parole du Mouvement de libération du Congo (MLC), estime que l’UDPS devrait poursuivre son combat politique à l’intérieur de l’Assemblée nationale qu’en dehors.
Selon lui, l’opposition devrait faire un front commun en bénéficiant du renfort de l’UDPS qui est le premier parti institutionnel de l’opposition. «J’ai la conviction que l’UDPS, le MLC et l’Union pour la nation congolaise (UNC) et tous les autres partis [de l’opposition] ensemble nous pouvons efficacement et petit à petit amener ce gouvernement et ce pouvoir à sa déchéance. Nous avons peut-être tout raté. Ils nous ont tout volé mais nous avons une tribune, celle du peuple congolais pour les dénoncer», a-t-il conclu.
Car, si l’UDPS a toujours ambitionné de combattre les antivaleurs et autres tares du pouvoir, ce ne serait qu’une mauvaise stratégie que de le faire en dehors du champ de combat en pratiquent son éternelle politique de la chaise vide qui a le pouvoir de desservir que de servir ceux qui la pratiquent.
Si la position de l’UDPS peut se comprendre, elle ne peut se défendre que difficilement. Après avoir accepté de participer aux élections, ce parti devrait en toute logique accepter d’aller prendre sa place au sein du nouveau parlement afin d’enrichir les débats. On pourrait par contre alléguer que, aller siéger, avec une faible représentation, surtout lorsque l’on est convaincu que son score ne reflète pas la réalité, est périlleux.
Le parlement est un lieu où se joue la vie de toute une nation : l’on y vote des lois, l’on défend les idées, l’on y débat des questions économiques, politiques, sociales, c’est-à-dire celles touchant à la vie du citoyen et des institutions. En plus de tous ces enjeux, l’Assemblée nationale est surtout le lieu où se contrôle l’action gouvernementale. Ne pas y aller, c’est vouloir conforter la position du parti au pouvoir et cautionner aussi toutes les pratiques qu’il entend combattre. Refuser de siéger à l’Assemblée nationale pour ne pas être responsables de la gestion du pays, c’est aussi montrer un certain orgueil d’un gestionnaire qui, une fois aux affaires, n’aurait dans son actif que de bons résultats.
Il faut donc participer à la gestion du pays, à quelque niveau de responsabilités que ce soit pour éviter de donner carte blanche aux gouvernants. Ce qui réduirait leur « marge de manœuvre ».
Onze commissions spéciales ont été mises en place lundi 20 février à l’Assemblée nationale pour valider les mandats des députés nouvellement élus, en l’absence des membres de l’UDPS et alliés ne participent pas aux plénières depuis le début de la session extraordinaire.
Un parti politique englobe l’ensemble de tous ses militants qui forment sa base. Comme tel, il doit cesser de fonctionner comme un bien personnel de son fondateur.
En attendant, il appartient à l’UDPS de savoir se tirer de ce dilemme dans lequel la menace du parti place ses députés : siéger ou ne pas siéger ? Car, de la bonne ou mauvaise décision qu’on prendra dépendra l’avenir d’un parti qui n’aura combattu pendant plus de trente ans que pour se dérober une fois arrivé au but. Est-ce cela le motif du combat de ce parti politique vieux de 30 ans ?
Kléber Kungu

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