Ituri, un district en reconstruction
Les orphelins et les filles mères de DRC à Fataki (2)
(Par Kléber Kungu, envoyé spécial en Ituri/Bunia)
Nous sommes sur une petite colline où souffle une petite bise. Quelques enfants en uniforme nous accueillent devant une cour scolaire quasi déserte. Ce sont des orphelins de l’école primaire (EP3) Fataki encadrés par le Conseil danois pour les réfugiés (DRC, Danish Refugee Council). Des salles de classe sortent trois hommes, sourire aux lèvres : ce sont des enseignants, dont le dirécole, en babouches. L’accueil très chaleureux qu’ils réservent aux visiteurs que nous sommes contraste avec la pauvreté et le dénuement qui enveloppent cette école d’orphelins et des filles mères violées par des hommes en uniforme. Un terrain de football, deux gros bâtiments et un petit – le bureau du dirécole - tous en pisé, pour 7 salles de classe, 6 enseignants dont 2 femmes, voilà l’école primaire (EP3) Fataki, située à 90 km de Bunia.
Armé de son arme redoutable, le sourire, le directeur de l’EP3 Fataki, Lirpa Tibasima, 58 ans, père de 11 enfants et dans le métier depuis 1972, nous dresse la carte postale de son école. L’EP3 Fataki a fonctionné durant l’année scolaire 2009-2010 avec un effectif de 268 élèves au début avant de terminer l’année avec 221 élèves. Essentiellement occupée par des élèves orphelins, âgés de 6 à 19 ans, cette école protestante mécanisée, fonctionne avec 7 enseignants. Quoique mécanisés, ceux-ci ne sont pas pris en charge par l’Etat. Ils doivent se contenter de la prime de motivation -1 250 FC versée mensuellement - par des parents fortement démunis. Avec entre 5 000 FC et 20 000 FC qu’ils peuvent gagner mensuellement, les enseignants de l’EP3 Fataki se considèrent moins heureux que les cultivateurs. C’est l’enseignant Mbukama Mondro, 29 ans, marié et père de 2 enfants, 4 ans de carrière, qui nous exprime cette difficulté.
C’est dans cette école démunie que DRC a choisi d’apporter son aide en réhabilitant notamment ses bâtiments et en y construisant des latrines. Dans le cadre de son projet Aide en faveur des retournés dans le district de l’Ituri financé par Danida, cette ONG a pour activité la réhabilitation des écoles, la construction des latrines et la distribution des biens non alimentaires (NFI) à des orphelins et de filles mères.
70 % des grossesses issues de viols
Le numéro un de DRC en Ituri, Niklas Stoerup, a précisé le travail que son ONG mène sur un terrain où grouillent des orphelins, et des filles mères, dont les pères de leur progéniture, sont des soldats et des miliciens. La plupart de grosses de ces filles sont issues de viols au sein d’une population majoritairement hema cohabitant avec les Lendu minoritaires qui ont eu à s’entretuer depuis 1999 et entre 2002-2003 durant des affrontements meurtriers qui ont fait 50 000 morts et 500 000 déplacés.
Avec un projet qui a commencé en 2009, DRC entend continue ses activités jusqu’en 2011 pour aider les retournés et les communautés locales en payant les frais scolaires des orphelins et en finançant des activités génératrices de revenus en faveur des filles mères célibataires. En tout, on a recensé 486 filles mères et violées.
DRC a du pain sur la planche dans cette partie du territoire congolais. Il envisage de réhabiliter 30 sources d’eau et des écoles et construire d’autres latrines. L’ONG danoise compte aussi remettre financer les activités agricoles des paysans en leur remettant des semences pour améliorer leur vécu quotidien. Il est prévu également une formation en coupe et couture en faveur de 50 filles-mères dans le cadre des activités génératrices de revenus.
Le DRC intervient aussi dans la santé
DRC intervient aussi dans le secteur de la santé. Le Centre de santé de Sanduku, tenu par l’infirmier titulaire Soma Lodyi, bénéficie de l’aide de DRC avec une couverture sanitaire de 8 623 personnes dans cette aire de santé. Nous avons visité ce centre de santé en plein Ituri qui emploie 6 infirmiers qui travaillent dans des conditions qui n’invitent pas à la conscience professionnelle. Les salles que nous avons vues où couchent les femmes et où elles restent après l’accouchement sont tout sauf une salle d’accouchement et une maternité. Les deux salles sont dans une bicoque en pisé où la lumière est une denrée rare et chère.
Et pourtant, c’est dans ces endroits et dans ces conditions que la vingtaine d’Ituriennes de la trentaine attendue mettent au monde celles et ceux qui sont appelés à prendre la relève de ce pays. Dans le dénuement le plus total, ignorées de ceux doivent trouver la solution à leurs problèmes, mais très proches des humanitaires, dont DRC.
Qui y a pensé leur offrir de l’eau potable pour réduire ou minimiser les maladies hydriques capables leur progéniture qu’elles obtiennent au prix de mille et une peines. Une source d’eau y est construire en mars 2010, à une centaine de mètres du Centre de santé et au fond d’une montagne.
La source Zzdda est gérée par un comité d’entretien dirigé par Lona Wamba, 64 ans. Cette source est venue apporter beaucoup de solutions aux nombreux problèmes de vie de cette population qui s’en réjouit et remercie vivement les donateurs. « Les maladies hydriques, telles que la fièvre typhoïde, la verminose) a sensiblement diminué, a reconnu l’infirmier titulaire du Centre de santé de Sanduku, ajoutant que son centre ne connaît pas de cas de malnutrition, sinon un seul au cours du mois de juillet.
Et ce ne sont pas les mauvaises conditions de travail qui peuvent ébranler la volonté et la détermination de ce jeune infirmier de servir ses compatriotes. « Je suis fier de travailler ici pour élever le niveau de santé de la population. Même dans les conditions difficiles, je le fais », a avoué avec courage Soma Lodyi.
Quel est le nombre des personnes - comme cet infirmier – qui, pour l’amour du pays et prêtes à servir autrui, ont accepté de prester dans n’importe quelles conditions, oubliées par ceux qui sont censés les prendre en charge ? Combien ils sont ces vaillants fils et filles du pays qui, la conjoncture aidant, ont accepté de faire de leur boulot du bénévolat et de l’apostolat ? A combien s’élève le nombre de ces enfants dont la barbarie des aînés et parents a rendu des orphelins et autres nécessiteux ? Les uns et les autres sont très nombreux, infiniment nombreux, éparpillés à travers un pays très immense, oubliés par leurs dirigeants. Heureusement que la présence des humanitaires essaient d’améliorer un tant soit peu les conditions de vie et de travail.
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