jeudi 29 janvier 2015

« Esprit de vie» ou l’école de Matata

Transports en commun
« Esprit de vie» ou l’école de Matata
            Lorsqu’il ya plus d’une année, le Premier ministre Matata avait annoncé la disparition progressive sur les artères de Kinshasa des taxis-bus Mercedes 207 vulgairement appelés « Esprit de mort », tout Kinshasa s’est levé pour crier au scandale. Aujourd’hui, tout Kinshasa réalise à peine que l’école de Matata commence de porter ses fruits. En effet, « Esprit de vie » est venu apporter un nouveau mode de vie dans le quotidien des Congolais ; voyager autrement et dignement.
            Quelques mois après la mise en circulation des minibus de marque Hyundai aux privés affiliés à l’Association des propriétaires de véhicules privés affectés aux transports en commun au Congo (APVCO) sur les artères de la capitale congolaise, l’opinion kinoise n’a pas tardé de féliciter la clairvoyance et la gouvernance du gouvernement Matata sous l’impulsion du chef de l’Etat Joseph Kabila.
            Tous ceux qui prennent chaque jour place à bord de ces minibus Hyundai « Esprit de vie » pimpant neuf ne tarissent pas d’éloges ni d’admiration à l’endroit du chef du gouvernement qu’ils ont, quelques mois plus tôt vilipendé pour leur  avoir interdit d’importer leurs « 207 » chéris.
            L’admiration vient de tous. A commencer par les propriétaires à qui Matata Ponyo à céder des véhicules à des conditions alléchantes. Au prix d’acquisition de 56 000 dollars américains, chaque acquérir est appelé à rembourser le crédit pendant quatre ans à raison de… 50 dollars américains chaque jour, après avoir versé, le jour de l’acquisition, un montant de 8 000 dollars qui a été ramené à 6 500 dollars. Ce qui représente 15% du prix du véhicule, à verser dans un compte public spécial, afin de permettre de perpétuer le processus.

Le chauffeur à l’école de Transco
            Les chauffeurs, qui pour la plupart, sortent de la vieille et tristement célèbre garde de « 207 » sont obligés de passer à un recyclage au centre de conduite de la société Transco avant de pouvoir toucher au volant d’ « Esprit de vie ». Question de leur laver quelque peu le cerveau bourré de pratiques tant décriées par les usagers des taxi-bus « 207 » : mauvais stationnement, mauvais dépassement, vitesse excessive…
            En plus de cela, la majorité de ces chauffeurs se réjouissent de conduire aujourd’hui des véhicules neufs de leur vie. Tout se défaisant de la dépendance de receveurs devenus de rétroviseurs.
            Les receveurs, à leur tour, remercient Matata Ponyo d’avoir fait d’eux de travailleurs dignes, au même titre que les autres travailleurs d’autres secteurs. Plus question – du moins pour l’instant à l’embarquement – de crier aux passagers les lignes à desservir. Ces derniers se servent de leurs yeux pour découvrir la ligne à desservir ou peuvent se renseigner auprès du receveur ou d’autres passagers.
            Le receveur made by Matata, bien habillé, peut désormais s’asseoir durant tout l’itinéraire, à l’opposé du receveur traditionnel qui n’a cure de sa tenue vestimentaire, le boulot primant sur tout : tenue vestimentaire souvent sale, ligne à desservir à informer en criant à tue-tête…

Receveur respectueux de passagers
            En plus, ce receveur « Esprit de vie » est fort respectueux des passagers. Aussitôt le bus rempli, c’est respectueusement qu’il demande aux passagers ceux qui ne « paient » pas de se montrer, car le bus n’autorise que deux par course. S’ils sont plus de deux, aux autres il demande respectueusement de prendre place à bord d’un autre bus…
            Les mieux servis par Matata sont sans conteste les passagers. Après avoir voyagé durant des décennies à bord des véhicules, assis sur des bancs en bois et confinés comme des prisonniers, à bord de « Esprit de vie » les passagers peuvent désormais voyager dans des conditions humaines car assis sur des sièges et bien espacés.
            Ce qui a fait dire, un jour à un certain passager « comme si nous sommes dans un avion »,  alors que de la bonne musique jouait. Et un deuxième d’ajouter : « Fini l’orgueil des  « 207 ». Ils doivent tirer déjà des leçons ».
            Matata a dû inculquer une autre notion capitale à ces aspirants à la classe moyenne : le travail en groupe. Les bus « Esprit de vie » qui desservent sur une même ligne, comme ceux de la ligne Sainte Thérèse – Zando/Commerce, embarquent les passagers à tour de rôle, alignés les uns derrière les autres. Comme s’il s’agissait des bus d’une même entreprise. Il en est de même lorsqu’ils arrivent au terminus : ils s’alignent attendant que le premier arrivé parte le premier et que le dernier-venu parte également le dernier. Quelle leçon de gestion !
            Un seul couac : c’est qu’à bord d’ « Esprit de vie », certains receveurs, sinon tous, refusent de prendre le dollar et des billets de FC à valeur faciale élevée (5 000 FC et 10 000 C). Raison : ces billets souffrent d’une si incroyable contrefaçon.que plusieurs faux billets sont en circulation sur le marché monétaire.

Quelques conditions d’éligibilité au crédit
            Toute personne désireuse d’acquérir un véhicule Hyundai « Esprit de vie » est soumise à quelques conditions d’éligibilité, notamment « être un transporteur (c’est-à-dire ne pas être en retraite ou en cessation d’activités), être membre effectif de l’APVCO et être recommandé par elle.  Il faudra, en sus, avoir été membre de l’APVCO avant le 30 juin 2014, pour mettre hors tous les opportunistes qui se sont rués au portillon de l’APVCO depuis l’arrivée des derniers bus dans la capitale, désireux d’acquérir à tout prix un véhicule neuf..
            En dehors de cela, tous les bénéficiaires sont tenus d’ouvrir un compte dans l’une des banques désignées par le Gouvernement pour loger les fonds du Programme ‘’Esprit de vie’’ ; s’engager à libérer la traite mensuelle du crédit qui sera déterminée, étant entendu que ledit crédit sera remboursable en quatre  ans. Un retard de paiement de dix jours donnera lieu à une mise en demeure par le cabinet comptable.
            En cas d’absence d’exécution dans les dix jours suivant la mise en demeure, le véhicule sera retiré, par voie d’huissier de justice; produire la preuve minimale de solvabilité : un bien immeuble ou un compte bancaire (dans une banque ou un établissement de micro-crédit), alimenté régulièrement et mouvementé sur une période d’au moins 6 mois, à dater de la demande de crédit ».
            Tout compte fait, par son programme ‘’Esprit de vie’’, « le gouvernement voudrait voir, entre autres, l’émergence d’une classe moyenne congolaise, objectif phare du chef de l’Etat, en initiant déjà les petits entrepreneurs au processus du crédit, avec toutes les exigences requises en matière de gestion et d’orthodoxie managériale ».
            Voilà les leçons que l’école de  Matata Ponyo est en train d’inculquer à la population congolaise via ces transporteurs privés. En plus de leçons de gestion, Matata montre dans quelles conditions humaines peut voyager dans le secteur des transports en commun.
            Des conditions qui ne tardent pas de réjouir tous les passagers qui prennent joyeusement et quotidiennement place à bord de « Esprit de vie », à l’image du dessin placé sur chaque flanc du véhicule, montrant des personnes criant de joie !

Kléber Kungu

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