dimanche 25 novembre 2012

Le Pr Paul Malembe Tamandiak fait docteur honoris causa

L’Ifasic rend hommage à l’initiateur de l’école de journalisme en RDC Le Pr Paul Malembe Tamandiak fait docteur honoris causa (Un reportage de Kléber Kungu)
Le professeur émérite Paul Malembe Tamandiak a été fait docteur honoris causa de l’Institut facultaire des sciences de l’information et de la communication (IFASIC), ex-Isti (Institut supérieur des sciences et techniques de l’information) par le Comité de gestion de cette Alma mater. C’est devant un aréopage de produits façonnés dans le moule rigoureux de cet illustre personnage (professeurs, journalistes, hommes politiques…) et d’invités de marque que le recteur de l’Ifasic, le professeur Jean-Lucien Kitima, a concrétisé l’un de ses rêves : rendre hommage à Paul Malembe de son vivant. Le récit d’un événement qui marquera en lettres d’or l’histoire de cette institution fondée en 1973 par le récipiendaire de ce titre honorifique. Samedi 24 novembre 2012, toute l’Ifasic s’est déplacée, à partir de 10 heures, dans la salle de conférences de la paroisse Notre-Dame de Fatima à la Gombe pour assister au couronnement des actions et œuvres de celui que ses plus proches appellent affectueusement « Patriarche », le professeur émérite Paul Malembe Tamandiak, 75 ans.
L’Amicale des anciens de l’Isti/Ifasic a réussi ou presque le rappel des troupes, à la tête de laquelle trône le très sémillant Honoré Mulangu Pongola, conseiller en communication du gouverneur de la Banque centrale du Congo (BCC). C’est le recteur Jean-Lucien Kitima Kasendwe qui va annoncer les couleurs d’une cérémonie pour laquelle il va déclarer éprouver des difficultés pour dénicher les mots nécessaires pour la rendre à sa juste valeur. Cependant, en peu de mots, il va peindre les qualités exceptionnelles du caractère d’apostolat et de dévouement de cet homme qui, après avoir décroché un bon diplôme de la plus prestigieuse l'Ecole supérieure de journalisme de Lille (ESJL), va revenir au pays pour créer en 1973 ce qui sera, des décennies durant, l’une de plus prestigieuses écoles de journalisme en RDC et en Afrique centrale. Avant de présider à sa destinée pendant plus de deux décennies (1973-1996). Quatre décennies de vocation et d’apostolat
Mû par une vocation inébranlable et un esprit d’apostolat, le professeur Malembe Tamandiak va façonner, durant environ quatre décennies, à sa manière et dans sa discipline plusieurs centaines de femmes et d’hommes qui font aujourd’hui la fierté dans les médias et institutions congolais dans le secteur de l’information et de la communication. Une qualité de méritocratie que Jean-Lucien Kitima va relever. Il profitera de cette occasion pour lancer un appel d’amour, d’unité et d’union à tous ses collaborateurs « à vivre non les uns à côté des autres, mais les uns avec les autres ». Le professeur ordinaire Jean-Claude Makwala, docteur en communication sociale de l’Université catholique de Louvain, l’un des meilleurs et valeureux produits de Paul Malembe, va relayer le recteur de l’Ifasic, pour faire une leçon académique, une des étapes scientifiques de cette cérémonie de collation de titre de docteur honoris causa (Dr h.c.). Histoire des médias avant-gardistes, est le sujet qu’il choisit pour aborder le rôle avant-gardiste joué par le cinéma, la télévision et de la radio, ainsi que la presse écrite. La hauteur scientifique et la pertinence du sujet abordé vont permettre aussi bien de situer la cérémonie dans sa dimension scientifique, mais également d’honorer à sa juste valeur le lauréat qu’il va qualifier « de grand journaliste et grand professeur ».
Les médias avant-gardistes sont ces médias qui, par leur contenu et par leur forme, s’écartent des normes traditionnelles. Au rang desquels il en épingle quelques-uns : La Pègre, Journal Lingala facile, Le Grognon, Le Pot Pourri, Le Canard enchaîné. Il va ainsi réussir – avec une salve d’applaudissements - entre autres à rafraîchir la mémoire des anciens de l’Isti et une bonne partie de l’Ifasic ayant connu la très célèbre La Pègre. Ce journal satirique des étudiants de l’Isti/Ifasic, bien que peignant de manière satirique et sarcastique, le comportement des enseignants et des étudiants, jouissait du soutien discret de la plupart des enseignants. Le jury composé des professeurs Ludovic Miyouna (président), Crispin Makelele (rapporteur), Mpeye Nyango, Mbelolo ya Mpiku et Okomba Wetshisambi (membres) ainsi que leur cursus universitaire sera présenté, d’une voix radiophonique – ce terme, ô combien journaliste, dont raffolent les étudiants de l’Ifasic - par le professeur Espérance Bayedila Bakanda, l’un des produits du Pr Malembe Tamandiak. Lorsque s’ouvrent les témoignages sur cette icône, ce personnage hors pair, cette personnalité complexe et plurielle, celui qui fut en 1967 …le premier rédacteur en chef du journal télévisé de la télévision nationale (l’actuelle RTNC), l’assistance découvre le grand homme de science qui se cache dans ce Paul Malembe de petite taille au visage rongé par une barbe de sage et de savant. Par la voix de M. Romain Makolo, le témoignage de Stéphane Kitutu O’leontwa, ancien P.-D.G de l’Office zaïrois de radiodiffusion et de télévisons (OZRT, actuelle RTNC), a dépeint le Pr Malembe Tamandiak comme une icône du journaliste congolais qui va quitter son poste de rédacteur en chef « après avoir inoculé à ses collaborateurs les principes du traitement rigoureux de l’information. » A son actif aussi la réforme actuelle de la presse congolaise et beaucoup d’autres actions en faveur d’elle. Et ses actions sont si nombreuses, annonce M. Makolo, que « la meilleure façon de lui rendre un témoignage est de lui consacrer un livre. » Lorsque le président de l’Amicale des anciens de l’Isti/Ifasic s’installe pour témoigner sur cet « homme qui a cru participer à une belle œuvre, la création de l’Isti », la salle ne cesse de rire, tellement son témoignage va creuser dans le passé des années 70 pour exhumer la rigueur de cet enseignant qui n’a cessé (cesse) d’appeler ses étudiants par le vocable « petits », en les menaçants de réduire leur nombre, alors qu’ils n’étaient que…28 admis en première année de graduat. Que ce soit l’évocation du journal satirique de l’Isti, La Pègre, le plus lu, tiré à un seul exemplaire et distribué nuitamment, qu’il s’agisse de l’autre face d’un Malembe kinois, mais surtout un père de famille qui éduque ses enfants avec une main de fer dans un gant de velours qu’il va découvrir lors d’un concert de Luambo avec la chanson DG (« Ozalaka kaka moto DG, entourage esalaka mabe… », le témoignage de Honoré Mulangu va détendre fortement l’assistance qui réagit avec des larmes des rires. « 40 ans après, nous lui savons gré », conclut M. Mulangu. Oui, comment ne pas être reconnaissant envers ce grand homme dont l’immensité des services rendus à la Nation et le nombre des personnalités formées forgent l’admiration ! Il a enfin appelé les autorités académiques de l’Ifasic à sauver une espèce en voie de disparition dans cette institution : les étudiants garçons qui ne représentent à ce jour que …10% des inscrits. (Rires et salve d’applaudissements). Les professeurs Mwembe Batende et Yayadrao vont enfoncer le clou des témoignages en présentant deux dimensions de l’heureux lauréat : la dimension académique nationale et le rayonnement international de celui qui, admis à l’éméritat en 2001, va consacrer le clair de son temps à chercher à obtenir des avantages des professeurs émérites. Un visionnaire doublé d’un nationaliste. Comme un accusé, c’est un Malembe assis à droite du jury, impassible, jambes croisés, main gauche sur le menton barbu, qui va suivre attentivement, tous ces témoignages laudatifs sur lui. Il est 13h10, lorsque le recteur Jean-Lucien Kitima va, de sa voix autoritaire, conférer le grade de docteur honoris causa au premier directeur général et recteur de l’institution qu’il a créée (1973-1996). « Je vous rends un hommage solennel et mérité pour avoir initié la formation de l’information et de la communication (…) et pour avoir conçu et finalisé le 3ème cycle de l’information et de la communication », déclare le Pr Kitima Kasendwe, avant, cinq minutes plus tard, de lui faire porter les insignes (toge et chapeau) et de signer, deux minutes plus tard, le diplôme, sous les applaudissements de l’assistance. Que le ministre de l’Enseignement supérieur et universitaire et Recherche scientifique, Chelo Lotshima, lui remetrra à 13h18’. Le Pr Paul Malembe vient d’être fait docteur honoris causa de l’Ifasic. Leçon inaugurale : secret privé, secret public C’est dans cet état d’esprit que le professeur émérite va prendre la parole à 13h21 pour faire sa leçon inaugurale. Tout ému, les premiers mots qui sortent de sa bouche vont exprimer un cœur qui a eu du mal à étreindre des sentiments durant les longs moments de témoignages faits sur lui. « Mes chers amis, je voudrais pleurer …», (Murmures dans la salle) avant d’ajouter quelques secondes plus tard « …d’émotion, mais en tant que patriarche, on ne peut pas voir mes larmes. Mes larmes sont là, elles sont dans mon cœur. Elles coulent à travers ma leçon, Alors, si le patriarche pleurait, quelle serait la jeunesse ? » La salle réagit par des applaudissements nourris. « Je suis fier car je sais ce que les gens que j’ai formés pensent de moi. Une pensée est positive. Je suis très content de partir aujourd’hui comme le vieux Simeon de la Bible et maintenant je peux me reposer en paix », se réjouit-il, applaudi frénétiquement. Tout en demandant au recteur Jean-Lucien Kitima de hisser l’Ifasic au rang d’université en ces termes : « Chacun pose un acte pour construire le pays avant de disparaître. Pour qu’on puisse parler de vous comme bâtisseur comme moi. » Les moments d’émotion passés, le nouveau docteur honoris causa de l’Ifasic va faire son discours inaugural pendant une quarantaine de minutes sur un sujet: Secret privé et secret public. Un sujet aussi sensible qu’important sur le métier de journaliste, lié à la question de conscience, au droit à l’information, au droit au secret. Au cours de sa leçon, il va montrer les limites que les lois imposent à l’informateur pour livrer l’information et à l’informé pour en recevoir, quoique l’instruction soit le premier besoin d’un peuple, après le pain. L’informateur n’a pas le devoir de tout dire et l’informé le droit de tout apprendre. Peut-il le dire ? Doit-il le dire ? Telles sont les questions que l’informateur doit se poser avant de livrer tout secret privé. Aussi l’indiscrétion peut-elle entraîner des conséquences négatives. Elle peut devenir une faute professionnelle très grave. L’informateur doit retenir que le droit au secret n’est pas plus absolu au droit à l’information et qu’en divulguant le secret de la vie privée, il doit penser au contrecoup que doit subir la famille concernée. L’informateur n’a le droit ni le devoir de divulguer la vie privée d’autrui. Il en est de même du secret public, par exemple, le secret de la défense nationale, les tractations diplomatiques… 14h5. Quatre longues heures ont suffi au Comité de gestion de l’Ifasic de rendre, de son vivant, tous les hommages mérités au professeur émérite Paul Malembe Tamandiak pour sa contribution exceptionnelle au secteur des médias, du journalisme et de la communication en RDC, pour son œuvre monumentale qu’il a accomplie, en tant que journaliste, rédacteur en chef, consultant, indépendant, enseignant, chercheur et autorité académique. Une cérémonie que l’orchestre de l’Institut national des arts (Ina) va aider à égayer de temps en temps avec des intermèdes musicaux attrayants. Une seule fausse note : pour une manifestation des communicateurs, la sonorisation n’a pas répondu suffisamment à l’attente.

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