mercredi 28 novembre 2012

Le M23 commence enfin d’évacuer Goma

Une semaine d’occupation après Le M23 commence enfin d’évacuer Goma Selon l'Onu et des témoins, les rebelles du M23 ont entamé le retrait progressif de Goma pour se replier au nord de cette ville, un préalable exigé par Kinshasa pour entamer des négociations de paix. Le chef des opérations de maintien de la paix de l'Onu, Hervé Ladsous en a fait la confirmation. Selon lui, c’est mardi 27 novembre que les rebelles du Mouvement du 23 mars 2009 (M23) ont entamé le retrait de la ville de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu. Ainsi, comme l’estiment certains observateurs, l'injonction des dirigeants de la région des pays des Grands commencent à porter ses fruits, à la suite de leur ultimatum de 48 heures lancé samedi 24 novembre à la rébellion de quitter la ville. Le retrait du M23 a été également confirmée par des sources au sein des FARDC, selon lesquelles les rebelles avaient commencé effectivement à se retirer de certaines zones dans le Masisi depuis mardi 27 novembre. Des habitants de Goma ont également confirmé mercredi le départ de plusieurs dizaines de camions civils de marque Fuso et de l’Office des routes contenant des munitions et des vivres des rebelles du Mouvement du 23 mars (M23). Ces camions se dirigeaient vers Rutshuru et Rumangabo, au nord de Goma. Des habitants de certains quartiers affirment que certains hôtels et maisons de particuliers qui hébergeaient les rebelles ont été vidés la nuit dernière. « On nous a demandé de nous retirer à 20 kilomètres et nous allons le faire », a assuré le chef militaire des rebelles, le général Sultani Makenga, précisant que le M23 commençait à transférer sa « logistique - munitions, nourriture, médicaments - de Goma » vers le territoire de Rutshuru. « Nous sommes en train de quitter Sake, nous sommes en train de quitter Masisi. Nous avons entamé le retrait de nos troupes qui sont très loin de Goma [...] Goma viendra après », a-t-il ajouté à Radio Canada. De son côté, sans se réjouir de ce début de retrait, le gouvernement congolais reste sur ses gardes, question d’éviter toute mauvaise surprise de la part des hommes de Jean-Marie Runiga, le président du M23. Cependant, précise-t-on, aucun retrait massif de troupes rebelles n'a jusque-là été observé, dont le nombre total au Nord-Kivu est estimé à environ 1 500 combattants, selon une source militaire occidentale. Dans les rues de la ville l'activité était normale mercredi matin, les commerces sont ouverts, des motos-taxi circulent comme à l'accoutumée. Quelques rebelles ont été vus à des carrefours, mais leur présence est très discrète comme depuis plusieurs jours. Parmi les exigences du M23 figurent notamment la libération de prisonniers politiques et la dissolution de la Commission électorale. Vianney Kazarama a annoncé que le gros de troupes qui occupait les localités de Ngungu, Umure, Mushaki, Kirolirwe ainsi que les collines de Muremure dans le territoire de Masisi aurait été regroupé mercredi 28 novembre à Saké, 27 km à l’Ouest de Goma. Etat-major à Kibumba Selon le porte-parole militaire du M23, son mouvement allait établir son état-major général à Kibumba, une localité située à 30 km au Nord de Goma. Il est prévu que le principal conseiller militaire de l’Onu, le général Babacar Gaye se rende dans la région depuis mercredi 28 novembre ainsi qu’au Rwanda en vue de régler les modalités militaires après le retrait des rebelles de Goma. Ces modalités, précise-t-on, porteraient notamment sur la situation de l’aéroport de Goma, contrôlé pour l’instant par la Monusco, de l’établissement d’une zone neutre une fois les rebelles retirés et du concept d’une force neutre internationale pour stabiliser la région. Les chefs d’Etat des Grands lacs avaient lancé samedi 24 novembre un ultimatum de 48 heures au M23 pour quitter la ville de Goma que la rébellion occupe depuis le mardi 20 novembre. L’ultimatum avait expiré le lundi à minuit sans que les rebelles ne se retirent de la ville. Les rebelles du M23 ont essayé de justifier le retard pris dans le retrait de la ville de Goma, expliquant que le temps accordé par les chefs d’Etat était court, selon Sultani Makenga. Les présidents des pays de la Conférence internationale sur la région des Grands lacs (CIRGL), réunis dans un sommet extraordinaire à Kampala samedi 24 novembre, avaient également décidé du déploiement d’une force composite comprenant une compagnie de la force internationale neutre, une compagnie des FARDC et une compagnie du M23 à l’aéroport de Goma, actuellement tenu par la Monusco. Tandis qu’ils avaient prévu le déploiement d’un bataillon de l’armée congolaise et un autre de la police dans la ville de Goma Mais le chef politique du M23, le pasteur Jean-Marie Runiga a confié que son mouvement acceptait de quitter Goma si l’armée congolaise ne revenait pas dans la ville qui, selon lui, devrait rester sous administration politique et administrative de la rébellion. Retrait sur fond des pillages… Alors que les rebelles du M23 ont commencé à se retirer de Goma, après une semaine d’occupation, le gouvernement congolais les a accusés mercredi 28 novembre le M23 de se livrer à des pillages et à des razzias systématiques à Goma, comme on pouvait le craindre, et d'emporter son butin au Rwanda. Le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, a ajouté qu'il comptait voir les auteurs de tels actes de barbarie en répondre devant la Justice tant nationale qu'internationale. Selon le porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, des dizaines de camions destinés à la construction des routes et à l'entretien des voiries ont été emportés vers le Rwanda, avec le butin des pillages. Il a affirmé, dans une conférence de presse, que des dizaines de véhicules et de camions semi-remorques sont dédouanées à vil prix avec la bénédiction des rebelles du M23. Il a estimé que 50 véhicules franchissaient chaque jour la frontière depuis l'arrivée du M23 à Goma. Le système frigorifique de la morgue de l'hôpital de Katindo a été démonté et emmené hors de notre pays, a encore accusé M. Mende. Selon lui, une tentative de pillage de la chambre forte de la Banque Centrale à Goma débutée dimanche dans la journée avait échoué jusqu'à hier (mardi) soir mais les coups de burins et les marteaux piqueurs se sont relayés même de nuit avec de puissants groupes électrogènes installés autour de l'institution bancaire. Il a accusé également le M23 d’avoir pillé de fond en comble plusieurs immeubles dont celui abritant l'assemblée provinciale. Selon M. Mende, les stocks de minerais qui étaient saisis par les services de l'Etat ont aussi traversé la frontière alors qu'ils étaient frappés par une interdiction d'exportation du fait de la non-déclaration du site de provenance. … et des décomptes macabres Alors qu'aucun bilan des affrontements entre l'armée congolaise et la rébellion n'a été dressé jusqu'à présent, la Croix-Rouge congolaise a indiqué mercredi que dans les jours ayant suivi la prise de Goma par les rebelles, quasiment sans combats, elle a enterré 62 corps "de civils et militaires, que des adultes" ramassés dans les rues, selon le président de la Croix-Rouge, Dominique Lutula. La déclaration du sommet - qui réunissait les cinq États de l'Afrique des Grands Lacs (l'Ouganda, le Rwanda, la RDC, la Tanzanie et le Kenya) - demandait aux rebelles de mettre un terme à la guerre et de se retirer de Goma dans les 48 heures. Le sommet de Kampala leur demandait également de demeurer à 20 km au nord de la ville qu'ils avaient prise le 20 novembre dernier. Mais le chef politique du M23, Jean-Marie Runiga, a posé par la suite de nouvelles conditions pour concrétiser le retrait de la ville, dont l'ouverture de négociations avec le gouvernement de Kinshasa, la libération de prisonniers politiques et la dissolution de la Céni en échange du retrait. Le gouvernement congolais du président Joseph Kabila a qualifié cette demande de véritable « farce ». Et Jean-Marie Runiga a réitéré qu'il « continuera d'exiger des négociations directes » avec le président. Le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende, a dit attendre « de voir l'effectivité du retrait avant d'y croire ». « Une fois qu'ils [les rebelles] se seront retirés, le président [Kabila] va les écouter, il va procéder à un réexamen des accords de 2009, et il va répondre aux griefs qu'il juge légitimes [...] nous nous y sommes engagés », a-t-il ajouté. Sake toujours occupée Alors que Goma se vide petit à petit de ses envahisseurs, la localité de Sake, à une trentaine de kilomètres à l’ouest du chef-lieu du Nord-Kivu, sur la route menant à la capitale du Sud-Kivu, Bukavu, était toujours en fin de matinée sous occupation des rebelles du M23. Des rebelles ont été vus dans des collines autour de Sake et une dizaine d'autres à un point de contrôle à l'entrée de la ville. Un colonel du M23 a indiqué n'avoir pas reçu l'ordre de quitter Sake. Les chefs d'état-major des armées des pays de la région des Grands Lacs sont attendus vendredi à Goma pour s'assurer du retrait des rebelles. Il est prévu une réunion vendredi 30 novembre à Goma des chefs d'état-major des armées des cinq États de l'Afrique des Grands Lacs pour s'assurer du respect des engagements du M23. Les soldats du M23, des ex-rebelles en majorité tutsi congolais intégrés dans l'armée après un accord de paix en mars 2009 et qui ont repris le maquis en avril 2012, avaient à l'origine diverses revendications. Ils exigeaient notamment de rester dans leur région du Kivu (est) pour protéger leurs familles, au lieu d'être envoyés dans des régiments sur tout le territoire de la RDC. Mais leur chef politique Jean-Marie Runiga a posé mardi de nouvelles "conditions" au retrait, en réclamant "une enquête sur la tentative d'assassinat du Dr Denis Mukwege à Bukavu, à son domicile, le gynécologue réputé pour son aide aux femmes violées -, "la liberté de mouvement pour l'opposant Etienne Tshisekedi" ou encore "la dissolution de la Commission électorale", la libération sans conditions des détenus politiques et d’opinion, dont le pasteur Fernando Kutino, Gabriel Mokia. La RDC a déjà été le théâtre de deux guerres régionales (1996-97 et 1998-2003). Le second conflit a opposé Kinshasa, soutenue par le Zimbabwe et l'Angola, à différentes rébellions soutenues par les armées rwandaise, ougandaise et burundaise. Cette fois encore, le Rwanda et l'Ouganda sont accusés par Kinshasa et l'Onu de soutenir le M23. Des allégations que Kigali et Kampala ont toujours démenties. Kléber Kungu

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