jeudi 24 mai 2012

Le gouvernement congolais peut-il réussir le pari de ce secteur ?

Transport en commun à Kinshasa
La paralysie des activités dans la capitale de la République démocratique du Congo (RDC) à la suite du mouvement de grève déclenché par les automobilistes de Kinshasa a permis de se rendre compte de la vulnérabilité du gouvernement congolais dans ce secteur, en même temps de sa dépendance vis-à-vis des automobilistes privés qui ont monopolisé ce secteur. Que deviendrait Kinshasa avec ses nombreux habitants le jour où les automobilistes décideraient, pour une raison ou une autre, de déclencher un mouvement de grève d’une semaine ? Pour contrer ce genre de surprises, il est temps que le gouvernement congolais s’investisse dans le secteur de transport. Il peut s’inspirer des anciennes sociétés publiques qui avaient fait la pluie et le beau temps il y a plusieurs décennies. Au nombre desquelles Sotraz, Transzam, STK, OTCZ (TCL)… Mais peut-il réussir ce pari ? Retour sur l’expérience du passé dans ce domaine. Le 23 septembre 1968 va naître la Société des transports kinois (STK) à l’initiative de monsieur Poto Galo avec en circulation 30 bus complété dont le nombre sera porté à 40 nouveaux en1969. par un deuxième charroi de 40 nouveaux bus. La population de Kinshasa, à cette époque, n’était pas aussi nombreuse que celle de nos jours. STK va connaître une telle apogée que son propriétaire va étendre ses activités en ouvrant des agences à l'intérieur du pays, notamment à Kisangani, à Mbandaka et à Lubumbashi. Malheureusement, les activités de la compagnie ne vont pas tarder à péricliter très vite vers l'année 1972 avant de disparaître complètement en 1982. Le pays a connu également l'Office des transports en commun du Zaïre, OTCZ, qui va exploiter un important charroi automobile de près de 500 autobus. Cette compagnie de transport public, qui va naître sur les cendres de la société des Transports en commun à Léopoldville (TCL), va aussi connaître son apogée avant de disparaître, corps et biens, victime de son gigantisme, des difficultés de gestion, du contrecoups de non versement par l'Etat de la subvention tarifaire, de la mauvaise gestion du parc et des approvisionnements, de la destruction méchante et de l'incendie des bus par les étudiants lors de multiples soulèvements. D'autres entreprises de transport public vont voir le jour par la suite: la Société des transports Zaïrois (Sotraz), une société d'économie mixte franco-zaïroise née en 1979 à la suite d'un arrangement politico financier entre l'Etat zaïrois, la Société zaïroise de commercialisation des minerais (Sozacom) et la Régie des véhicules Renault (RVl); City-Cars (Société privée à capitaux belges), la Société des transports zaïro-marocains (société d'économie mixte) en 1989, City-Train (régie publique) créée en 1989, qui ne va pas durer. La mission dévolue à l'ensemble de ces sociétés était de desservir prioritairement les communes urbaines et périphériques à un coût modéré. Mais les ressources financières suffisantes faisant défaut, ces sociétés publiques et d'économie mixte continuent à utiliser des véhicules d'occasion amortis, très souvent en panne et leurs ateliers de réparation ne font que réparer les véhicules en panne sans jamais assurer l'entretien régulier. Ainsi, de nos jours, la majorité d'autobus restent immobilisés faute de pièces de rechange. En conséquence, ces sociétés ont disparu. Depuis les années 1990, ces transports urbains n'étaient plus assurés que par des transporteurs privés. Qui, en vue de suppléer à ce vide sectoriel de transport urbain créé par la défaillance de grandes sociétés de la place, aménagent des véhicules de toute marque. Grâce à eux, cette défaillance n'est pas fort ressentie d'autant plus que ces particuliers sont tellement bien organisés qu'ils desservent la ville dans toutes les directions et en arrivant même là où les autobus n'accèdent pratiquement pas. Ils ont, d'ailleurs, l'avantage d'ouvrir de nouvelles lignes selon les besoins des usagers. Relance du transport en commun en RDC Il faut attendre quelques années pour voir naître d’autres sociétés. En 2004, le gouvernement congolais va relancer le transport en commun en créant la Société des transports urbains du Congo, Stuc, est une société d'économie mixte créée pour assurer les transports urbains dans les grandes villes de la RDC, en particulier Kinshasa. Le 5 juin 2006, la société reçoit un lot de 228 nouveaux autobus de la marque Tata Motors, grâce à un crédit de 33 500 000 dollars US de l’Inde, payable dans un délai de 25 ans. La gestion de la Stuc est confiée à Charles Lututa Ilongosi. Désigné le 9 août 2004 comme mandataire spécial de l’État avec pour mission principale de chercher divers partenaires étrangers et internationaux intéressés afin de mettre en place une nouvelle société de transport en commun, dénommé STUC sarl. Ce mandat n’impliquait aucune charge financière à l’égard de l’État congolais. Plusieurs contacts ont été pris avec les investisseurs belge, français et italiens. Grâce à un contact pris avec le Conseil exécutif des transports urbains de Dakar (CETUD), le Mandataire spécial a pu révéler au gouvernement congolais, par sa note d’information du 23 février 2005, la possibilité d’acquérir des bus neufs à travers un crédit d’État à État que consentirait le gouvernement indien à celui de la RDC. Malheureusement, la gestion de l’ADG de la Stuc sera si calamiteuse que la société va sombrer après quelques mois de gestion. Coupant ainsi la joie des Kinois qui ont applaudi de deux mains l’avènement de cette société. Deux modes de transport sont actuellement utilisées dans la ville de Kinshasa : le transport urbain par véhicule automobile et le transport par chemin de fer. La plupart des déplacements effectués en ville par les Kinois sont dépendants de la circulation roulière. Mais aujourd’hui, face à l’augmentation exponentielle de la population kinoise, les moyens de transport en commun sont insuffisants. Et face aux moyens dérisoires de la population congolaise, les transporteurs kinois préfèrent acquérir des véhicules de seconde, donc déficients. Le transport urbain par autobus est caractérisé actuellement par l'inefficacité, la précarité et des véhicules assurant le transport en commun conventionnel et formel. Toutes les grandes entreprises de transport en commun conventionnel (entreprises publiques et celles d'économie mixte) ont des difficultés énormes et sont pratiquement en cessation d'activités. Par conséquent, l’Etat étant absent dans ce secteur, les transporteurs privés s’y sont investis à cœur joie. D’où la prolifération des transports en commun privés ou informels qui exploitent d'une façon artisanale, sans beaucoup de respect de la réglementation, les taxis, taxis-bus et quelques autobus. Et depuis quelques années – environ 6 ans, les mototaxis sont entrés en danse, à la rescousse d’un secteur à mal. Avec tous les dégâts que l’on ne cesse de déplorer… L'état général du matériel est vétuste et, dans la plupart des cas, ne répond pas aux normes des transports urbains; mais faute de mieux et vu l'ampleur de la situation de ces transporteurs continuent à assurer la majeure partie des déplacements dans la ville. Dans ce secteur, Kinshasa présente une piètre mine. Faute de véhicules, les conducteurs font souvent des "demi-terrains “et remplissent leurs véhicules des passagers sans considération du respect de la dignité de la personne humaine. Ils traitent parfois leurs passagers de "mpese", de ‘’faux têtes’’. Pas de transport sans bonnes routes L’on ne peut jamais parler de transport sans de bonnes routes. Le gouvernement congolais s’est beaucoup investi dans la réhabilitation des principales artères de la capitale. Ce qui facilite le déplacement des Kinois, en dépit de ce qu’est le secteur de transport. Mais beaucoup reste à faire dans le secteur des infrastructures routières. En effet, beaucoup de communes, à l’instar de Kimbanseke, estiment que le gouvernement les a oubliées. En ce moment, par exemple, la route principale menant du Quartier I au cimetière de Kimbanseke est dans un tel état qu’il est honteux de la présenter comme une des routes de la capitale d’un grand pays. Pourquoi l’Hôtel de ville, se demande l’opinion, ne peut pas organiser ce secteur comme cela se fait dans les grandes villes du monde. Incapacité ou manque de moyens ? Nous nous rappelons toutefois que quelques timides initiatives dans ce secteur ont vu le jour, mais qui n’ont vécu que quelques mois. Redynamiser le secteur de transport public en relançant les activités des sociétés City Train et Stuc est une chose, mais veiller à leur bonne gestion par leurs dirigeants, c’en est une autre. Et c’est cela l’une des grandes faiblesses des autorités congolaises qui refusent de sanctionner les mauvais gestionnaires de la chose publique. Que la paralysie des activités dans la ville de Kinshasa pendant deux jours occasionnée par le mouvement de grève des transporteurs privés ait pas permis au Gouvernement de tirer des leçons pour le pousser à organiser ce secteur ! Kléber Kungu

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