Agriculture, eau, hygiène et assainissement, éducation
L’inégalité des sexes contribue à l’insécurité alimentaire
En dépit de leur rôle central dans l’alimentation, les femmes n’ont pas les mêmes opportunités économiques et sociales. Aussi faut-il renforcer l’efficacité de l’aide en sécurité alimentaire par la prise en compte de l’égalité des sexes. La constatation est faite par un collectif d’ONG humanitaires internationales (FAO, ACF Usa, Unicef) au cours d’un café de presse organisé dernièrement à Kinshasa par le Bureau de la Coordination des affaires humanitaires des Nations unies (Ocha). Pour ces ONG, l’inégalité des sexes constituent, donc, un facteur qui contribue à l’insécurité alimentaire.
La FAO, le Pam et 11 ONG nationales et internationales (ACF Usa, Afedem, Approna, Caritas, CRS, Diobass, Heal Africa, NRC, VSF, Women for Women, World Vision), membres du cluster sécurité alimentaire du Nord-Kivu mènent, depuis avril 2010, une enquête participative avec les communautés pour comprendre les rôles et les besoins spécifiques des paysannes et des paysans.
Les résultats de cette analyse réalisée sur 138 groupes de discussion séparés animés avec 355 femmes et 295 hommes, et portant sur les questions suivantes : quelle est la division des tâches ? Qui utilise, qui décide et qui possède les ressources et bénéfices essentiels à la sécurité alimentaire du ménage ? montrent que les femmes sont loin d’être les plus bien loties.
Six points ont été pris en compte : la terre, les ressources, la finance, le temps, la formation et la décision. Pour le premier point, le résultat est tel que ‘’si la terre est cultivée par les deux conjoints, les hommes en ont la possession systématique et exclusive. Il en est de même pour la maison.’’ Quant à l’utilisation des ressources, il est constaté que les femmes n’utilisent et ne contrôlent que des biens de peu de valeur. « L’utilisation et le contrôle par les femmes des ressources du foyer est d’autant plus faible que le bien a de la valeur… Ainsi, le vélo, la machette, la radio, le téléphone sont avant tout utilisés par les hommes et exclusivement possédés par eux. Les femmes sont propriétaires d’objets de valeur moindre, en lien avec leurs responsabilités domestiques. Plus la valeur du bétail est importante, plus il appartient à l’époux […} Le petit élevage, assuré par les femmes, est davantage la possession du mari », note le document résumant les résultats de l’analyse, dont L’Observateur a obtenu copie.
L’inégalité en défaveur des femmes dans le secteur de la finance est patente. Le document souligne l’inégalité qui existe dans l’accès aux bénéfices de la production agricole. Si l’argent et l’épargne sont accessibles au couple, mais avec avantage marqué pour l’époux, ils restent du contrôle exclusif du mari. Le document note que les femmes ont des difficultés d’accéder au crédit.
Les femmes travaillent 17 heures/jour, les hommes 7heures
La répartition du temps du couple est faite inégalement. Le document fait observer que « les hommes effectuent les travaux physiques (souvent sur une période délimitée), tandis que les femmes assurent les tâches répétitives et gourmandes en temps [...] Les femmes, principales productrices agricoles et chargées des tâches domestiques, travaillent en moyenne 17 heures par jour contre 7 heures pour les hommes. » Par voie de conséquence, les hommes, qui travaillent peu, se reposent durant beaucoup de temps, tandis que les femmes ont peu de temps de repos, étant donné qu’elles travaillent beaucoup. « Notre grand loisir, c’est le sommeil », avait déclaré une femme, selon Delphine Brun, conseillère GenCap pour l’égalité des sexes dans l’aide humanitaire.
Quant à la formation, les hommes accèdent à la formation de façon privilégiée et ils ont la primauté de la décision à prendre sur la formation des membres de la famille. En plus, c’est le mari qui décide prioritairement sur ce qui doit être « produit, vendu ou consommé ». Et ce sont les hommes qui accèdent exclusivement aux réunions publiques et « prennent seuls les décisions qui concernent la communauté ».
Aussi, face à ces inégalités criantes à l’égard des femmes, les ONG humanitaires plaident en faveur d’une prise en compte des besoins différenciés des hommes et des femmes pour rendre l’aide humanitaire efficace et équitable.
Cela dit, lorsque les besoins et les priorités des deux sexes sont pris en compte, tout le monde y trouve son compte : acteurs humanitaires, la communauté. Les premiers gagnent en image qui reste positive, avec une réduction des impacts négatifs de leurs projets…
Abdou Dieng, coordonnateur ai de l’action humanitaire en RDC, a souligné le rôle que les médias, partenaires des ONG humanitaires pour relayer leur plaidoyer, sont appelés à jouer dans la sensibilisation sur les inégalités des sexes.
Kléber Kungu
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