mercredi 12 janvier 2011

Procès Bemba : les audiences reprennent ce 11 janvier 2011

Après une suspension de quelques semaines
Procès Bemba : les audiences reprennent ce 11 janvier 2011
Le procès Jean-Pierre Bemba à la Cour pénale internationale (CPI) reprend ce mardi 11 janvier, après un temps de répit dû aux vacances judiciaires. C’est le mercredi 8 décembre que des membres de la CPI sont partis en vacances judiciaires. Bien avant ce report, la CPI s'était offert une période de quelque 17 jours, soit du 22 novembre au 8 décembre, pour recevoir les différentes dépositions des témoins.
A la reprise de l'audience ce mardi 11 janvier, le témoin numéro 87 passera devant les juges. Il importe de rappeler que jusqu'à la date de la suspension des audiences, trois personnes ont déjà été auditionnées lors des précédentes audiences. Il s'agit principalement du témoin numéro 38, d'une experte en traumatologie et une femme présentée comme l'une des victimes du viol. Le témoin a expliqué le contexte de ce qui s'est passé en République centrafricaine alors que l'expert a expliqué les conséquences physiques, morales et psychologiques des violences sur les victimes, notamment le viol. Une précision de taille à apporter, les trois personnes ont été interrogées aussi bien par la défense que par l'accusation.
Selon les observateurs, ce temps de trêve a certainement permis aux différentes parties au procès de mieux affûter leurs moyens de défense.

"Jean-Pierre Bemba a sciemment permis des centaines de viols"
Pour la Cour pénale internationale de La Haye, "Jean-Pierre Bemba a sciemment permis des centaines de viols". L'ancien vice-président de la RDC, Jean-Pierre Bemba, a été accusé d'avoir "permis sciemment" à sa milice de commettre des centaines de viols en Centrafrique en 2002 et 2003, à l'ouverture de son procès devant la CPI à La Haye. "Jean-Pierre Bemba a sciemment permis aux 1.500 hommes qu'il commandait de commettre des centaines de viols, des centaines de pillages", a déclaré le procureur de la CPI, l'Argentin Luis Moreno-Ocampo, dans sa déclaration liminaire. Selon Luis Moreno-Ocampo, "Jean Pierre Bemba était le commandant militaire avec l'autorité effective et le contrôle des troupes qui ont commis les crimes". "Bemba a créé sa milice, il la possédait", a-t-il souligné.
L'opposant congolais, candidat malheureux à l'élection présidentielle de 2006 en RDC, est accusé de crimes de guerre et de crimes contre l'humanité, à savoir des viols, pillages et meurtres, commis en 2002 et 2003 par sa milice du Mouvement de libération du Congo (MLC) en Centrafrique, où elle soutenait les troupes du président Ange-Félix Patassé, victime d'une tentative de coup d'État du général François Bozizé.

Premières audiences : satisfaction des victimes
Après les premières audiences, les avocats des deux parties avaient livré leurs impressions sur le déroulement du procès de l'ancien vice-président de la RDC. Les victimes, par la voix de leur représentante, se sont dit satisfaites des travaux en revenant sur la responsabilité de Jean-Pierre Bemba sur ses troupes. La défense, quant à elle, a dénoncé la partialité du procureur Luis Moreno O'Campo. Me Marie Edith Douzima a estimé que les victimes qui ont témoigné sont revenues sur l'identification de leurs bourreaux et du chef à qui ils obéissaient, allusion faite à Jean-Pierre Bemba. Ce qui implique, selon elle, le pouvoir qu'exerçait Jean-Pierre Bemba sur ses hommes. " Nous ne pouvons pas nier que c'est le président Patassé qui a fait appel à Jean-Pierre Bemba pour que les troupes de ce dernier se retrouvent sur le territoire centrafricain. Il était démontré par les témoignages… Eux-mêmes [les militaires de Bemba] sont allés, ils ont mis leur base à certains endroits et c'est eux-mêmes qui dirigeaient les troupes et les militaires centrafricains étaient complètement effacés ", explique-t-elle.
La représentante des victimes a admis, pour sa part, que c'était bien le gouvernement centrafricain qui a fourni les armes, en précisant toutefois que Jean-Pierre Bemba aurait pu éviter les exactions commises par ses troupes, mais il ne l'a pas fait. Du côté de la défense, Me Aimé Kilolo était revenu sur les faiblesses de l'accusation et sur la partialité du procureur. Pour lui, le procureur a écarté les témoins qui peuvent déculpabiliser son client : "On est dans une affaire de commandement militaire. Nous avons des officiers centrafricains qui étaient sur le terrain, qui disent que c'est l'état major-général centrafricain lui-même qui s'occupait de toutes ces questions-là. Nous regrettons que le procureur, qui a pourtant l'obligation de mener des enquêtes à charge et à décharge, donc une obligation d'impartialité, se refuse de retenir ces personnes-là qu'il a lui-même interrogées, tout simplement parce que ces personnes finalement déchargent".
Me Kilolo a affirmé avoir un sentiment amer de constater finalement qu'on a à faire à un bureau du procureur qui semble avoir bâclé les enquêtes.





Quatre cents viols recensés par l'accusation
Cinq mois durant, jusqu'en mars 2003, les troupes du MLC ont, selon l'accusation, violé des femmes, des enfants, des hommes et des vieillards, pillé et tué ceux qui leur opposaient une résistance. L’accusation a recensé au moins quatre cents viols. "Des groupes de deux à trois soldats se sont introduits dans une maison après l'autre", a affirmé le procureur : "Ils ont violé les femmes (...) indépendamment de leur âge. Quand les civils résistaient, ils étaient tués." "Les viols massifs n'étaient pas seulement sexuellement motivés, c'étaient des crimes de domination et d'humiliation contre les femmes, mais aussi contre les hommes qui avaient de l'autorité", a asséné le procureur.
La CPI a autorisé la participation de 759 victimes au procès, a indiqué la présidente, selon laquelle "653 demandes sont en attente d'une décision des juges". "C'est la première fois dans l'histoire de la justice internationale qu'un groupe aussi nombreux est autorisé à participer", avait souligné Paolina Massidda, responsable du Bureau de conseil public pour les victimes, lors d'une conférence de presse à la CPI. Les victimes sont représentées par deux avocats centrafricains en fonction de leur origine géographique. Elles peuvent obtenir des réparations devant la CPI, premier tribunal pénal international permettant la participation des victimes aux procédures.
Jean-Pierre Bemba, qui avait fui la RDC en 2007, avait été arrêté le 24 mai 2008 à Bruxelles en vertu d'un mandat d'arrêt de la CPI, saisie en 2004 par François Bozizé, au pouvoir en Centrafrique depuis 2003. En détention provisoire depuis son arrestation, Jean-Pierre Bemba n'a pas été reconnu indigent par la CPI. Ses avoirs et ses biens ont été gelés à la demande de la Cour qui avance l'argent nécessaire à sa défense, 30.150 euros par mois. Le procès de Jean-Pierre Bemba est le troisième procès de la CPI, entrée en fonction en 2002. Les deux premiers procès, en cours, sont ceux de trois chefs de milice de RDC, Thomas Lubanga, Mathieu Gudjolo et Germain Katanga.
S’il est reconnu coupable, Jean-Pierre Bemba risque la réclusion criminelle à perpétuité.
Selon Paul Madidi, chargé de communication de la CPI, ce procès reprend là où il s’est arrêté, c’est-à-dire à l’audition des témoins et des experts.
Kléber Kungu

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