Administrateur du territoire de Luozi
Jean-Germain Kapula : « Si la Sodema joue bien son rôle, elle pourra être un salut pour Luozi »
Jean-Germain Kapula, administrateur du territoire de Luozi, est parmi les dirigeants de ce pays qui aiment tellement ce qu’ils font qu’ils vous donnent l’impression de travailler dans de bonnes conditions. Sourire permanent, très accueillant, Jean-Germain Kapula, sur son 1,90 m, aime s’habiller simplement. Il n’hésite pas à enfourcher sa moto ou de prendre le volant de sa Jeep pour aller là où les intérêts de sa population sont en jeu. Nous avons abordé cet homme à l’issue de la rencontre de la Sodema avec les notables de Luozi au cours de laquelle il a joué la modération. Comme un poisson dans l’eau, Jean-Germain Kapula est à l’aise à Luozi, où il vient d’accomplir plus de 5 ans. Et pourtant, il est à la tête d’un territoire qui est loin d’être un paradis, avec ses nombreux problèmes. Jean-Germain Kapula nous en a parlé sincèrement, dans une interview, fondant beaucoup d’espoir sur la Sodema qu’il appelle à bien jouer son rôle de lobbying.
L’administrateur du territoire de Luozi, Jean-Germain Kapula est à sa sixième année à la tête du territoire de Luozi. Lorsque nous lui demandons les causes de cette longévité, c’est tout sourire qu’il nous répond : « C’est la confiance que les chefs hiérarchiques, le ministère de l’Intérieur, ont placée en moi, cette cohésion, cette sympathie avec la population entière de Luozi » où il évolue donc comme un poisson dans l’eau.
Des moments douloureux passés avec le phénomène BDK
Il n’hésite pas à affirmer qu’à « Luozi, je ne me sens pas comme étranger. Au contraire, je m’estime comme chez moi ». Et pourtant, comme numéro un d’un territoire avec une population estimée à plus de 200 000 habitants, il fait face à de nombre défis qui n’ébranlent pas sa volonté de travailler durement, notamment le feuilleton des Bundu dia Kongo (BDK) qu’il appelle « phénomène ».
« Oui, c’est vrai, mais ce sont des problèmes qui ne viennent pas de nous, déclare-t-il. Vous savez que le cas BDK est un phénomène. Il y a eu des gens qui se sont crus éclairés et qui se sont mis à faire des choses qui n’entrent pas dans la loi. Et le gouvernement a pris des dispositions pour que l’autorité de l’Etat soit réhabilitée ». Il avoue avoir passé des moments douloureux. « C’est une époque très malheureuse, un moment douloureux que j’ai vécu, parce que ce sont des gens qui ont défié pratiquement toutes les lois du pays, des gens qui ont bafoué des libertés individuelles et l’esprit kongo en se mettant, par exemple, à brûler vif des personnes. Ce qui n’entrait pas dans la culture kongo. Je suis heureux que le gouvernement ait, à son temps, pris des dispositions pour que l’autorité de l’Etat soit rétablie ainsi que la paix et l’ordre public », a-t-il déclaré.
L’AT de Luozi a expliqué pourquoi en recevant la délégation de la Sodema, il ne cessait de lui répéter : « Ne venez pas avec des promesses, venez plutôt avec des actions concrètes. Je suis prêt à vous accompagner, pourvu que vous preniez en compte les préoccupations de la population ». Par le passé, il y a eu des gens qui sont passés à Luozi faire des promesses à la population, mais qu’ils n’ont jamais tenues. « Vous savez qu’il y a toujours des gens qui viennent à Luozi. Compte tenu du fait que Luozi est toujours éloigné de grands centres, ils viennent se faire passer pour des gens qui évoluent dans les cercles où se prennent des décisions. Ils font des promesses, peut-être à la quête d’une certaine légitimité populaire, ils font des promesses qui demeurent malheureusement non tenues jusqu’à ce jour », a-t-il accusé. « Nous a Luozi, nous sommes réveillés et nous disons que nous n’acceptons plus de promesses. Quelqu’un qui vient, il faudrait qu’il nous apporte des actions concrètes en disant ‘’moi je viens pour telle route, pour tel pont’’ et directement les travaux commencent. Au lieu de dire ‘’Je viens pour construire un stade ou un marché’’ en laissant une pancarte. Une année, deux années et rien ne se fait. Nous la population de Luozi, nous n’accepterons jamais cela, parce que nous agissons et nous parlons au nom de cette population ».
« Nous n’avons pas besoin que des gens viennent ajouter des promesses sur celles que nous avons déjà entendues ».
Et pour ne pas verser dans une polémique stérile et, par conséquent, rouvrir des plaies déjà cicatrisantes, Jean-Germain Kapula refuse de nous citer ni les noms de ces personnes donneuses de promesses non tenues ni ces promesses. « Non, non ! Je ne me permettrai pas de citer les noms, mais ceux qui ont fait des promesses pourront se reconnaître dans ces propos et nous pensons qu’il est temps de pouvoir montrer à chacun son pragmatisme », a-t-il tranché. Mais au sujet de promesses, sans les rappeler, l’AT de Luozi a tout simplement précisé qu’elles « sont multiples : elles sont relatives aux ponts, aux routes, à la construction des stades, bref, beaucoup de promesses qui sont restées non tenues jusqu’à présent. C’est pourquoi, aujourd’hui à Luozi, nous observons cette prudence : nous n’avons pas besoin que des gens viennent ajouter des promesses sur celles que nous avons déjà entendues ».
Quant au sujet de la Sodema, Jean-Germain Kapula croit-il en cette plateforme ? « Nous faisons confiance parce qu’elle évolue dans le cadre du développement. Si aujourd’hui nous avons insisté pour qu’elle nous ne fasse pas de promesses, c’est justement parce que nous voulons la voir à l’œuvre, nous voulons qu’elle puisse jouer le rôle de lobby auprès des autorités politico-administratives, des décideurs, des partenaires et autres bailleurs de fonds pour le développement. Parce que nous savons que la Sodema en elle-même n’a pas de moyens pour pouvoir jeter des ponts là où il faut, faire des routes, créer des structures qui puissent générer des recettes. Mais je suis en train de croire, en tant qu’administrateur de territoire, que s’il y a des actions de lobbying menées par la Sodema, le territoire de Luozi ne sera plus oublié », a-t-il déclaré.
Le territoire de Luozi connaît des problèmes, parmi les plus cruciaux, le numéro un de cette entité administrative en cite quelques-uns. « Des problèmes, il y en a plusieurs : ce sont des infrastructures de base. Vous savez que le territoire de Luozi est un grenier. Nous avons aujourd’hui la plus grande 2ème vallée en RDC, après celle de la Ruzizi [dans le Sud-Kivu, NDLR ], c’est la vallée de la Luala qui, à elle seule, peut nourrir toute la population de la RDC. Mais aujourd’hui, exploite-t-on, même à 50 %, cette vallée ? Il y a eu de grandes unités de production, telles que le Programme national riz [PNR, NDLR], le Service national de mécanisation agricole, il y a eu d’autres unités de production dans la vallée de la Luala qui sont devenues des canards boiteux. Donc, ce sont des problèmes. A ceux-ci s’ajoutent aussi des problèmes d’infrastructures et de communication, de routes, de ponts », a-t-il énuméré.
« Luozi a toujours été oublié par les exécutifs provinciaux qui se sont succédé à la tête de la province »
A ce sujet, l’administrateur du territoire de Luozi a salué les efforts que le gouverneur de la province du Bas-Congo, Mbatshi Batshia, et son gouvernement provincial ne cessent de déployer face à ces problèmes. A leur actif, il a cité ces réalisations. « Beaucoup de ponts sont jetés : le pont Luhela, le pont Mfumu, le pont Mfiolongo, le pont Manguvu, le pont Mbundu, le pont Ndende, des infrastructures telles que le Centre de santé à Mbanza-Ngoyo, une école à Lufuku, la réhébilitation de la route RN 12 Nsundi-Nsangu-Kimbanza ». Malgré cela, les besoins de Luozi restent importants car, selon l’AT de Luozi « Luozi a toujours été oublié par les exécutifs provinciaux qui se sont succédé à la tête de la province. Aujourd’hui, avec l’arrivée du gouverneur Simon-Floribert Mbatshi Batshia et son gouvrnement, nous sommes en train de voir que Luozi est de plus en plus intégré dans le concert des territoires de la province du Bas-Congo », a souligné Jean-Germain Kapula, qui ajoute « donc les problèmes sont là, quelques-uns sont déjà attaqués par le gouvernement provincial et d’autres demeurent. Et pour ceux-ci et d’autres qui sont attaqués partiellement, nous sommes en train de dire que si la Sodema joue bien son rôle de lobbying, elle devra être le salut pour le territoire de Luozi. »
Notre interlocuteur n’a pas oublié d’évoquer les problèmes dus au manque d’électricité et d’eau potable. « Je ne sais pas où vous avez trouvé de l’eau pour vous laver. La Regideso à Luozi tourne avec une aile cassée. Le plus grand problème, c’est l’électricité car avec l’électricité, nous aurons facilement de l’eau potable, nous aurons des unités de production qui vont générer des recettes et des emplois et Luozi va décoller ».
Propos recueillis par Kléber Kungu
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