Et si la police
lançait une autre opération « Likofi »
Depuis plus d’un mois, l’insécurité a refait surface
dans la plupart des communes de Kinshasa, rendant les résultats de la retentissante opération
« Likofi » presque nuls. Partout, ce sont de cris de détresse poussés
par des populations victimes d’agressions multiples. Les kuluna qui infestent
la ville en y semant une insécurité sans pareil ont trouvé un nouveau mode
opératoire : ils opèrent désormais en caleçon et torse nu, munis de
longues machettes. La population terrorisée appelle Célestin Kanyama et ses
hommes à relancer du moins l’opération « Likofi » nouvelle version,
sinon l’opération « Makofi » (coups de poing).
De partout, dans la ville de
Kinshasa, la terreur que font régner les détrousseurs à armes blanches est
telle comme si cette bourgade n’avait pas été, il y a quelques mois, nettoyée
de cette racaille qui ne cesse d’endeuiller de nombreuses familles innocentes.
Lorsque les autorités de Brazzaville
se sont mises à refouler de la manière la plus brutale et inhumaine les
compatriotes congolaises qui y résidaient, des inquiétudes n’ont pas tardé à
naître au même moment sur une recrudescence de l’insécurité aussi bien à
Kinshasa par où passait cette marée humaine que dans d’autres villes, centres
urbains et villages qui accueillaient, in fine, la majorité des refoulés.
Des refoulés dont personne n’était
capable de distinguer véritablement de quelles catégories ces refoulés étaient
composés. Personne n’était dupe d’une chose certaine : ces refoulés
n’étaient pas composés seulement d’enfants de chœur. Au sein des centaines de
milliers d’eux, grouillaient également de nombreux enfants au cœur de malfrat.
Si bien qu’à peine les expulsions
terminées, que les expulsés recasés calmement chacun dans son coin, le moment
est venu pour les kuluna et les autres malfrats de se faire parler d’eux.
Plusieurs communes de Kinshasa,
réputées paisibles, connaissent plus
d’insécurité à ce jour qu’avant l’inoubliable opération « Likofi ».
C’est le cas notamment de la commune de N’djili où, avec la complicité
d’intempestifs délestages, des kuluna y sèment un terreur infernale.
Les endroits les plus dangereux y
sont nombreux. A partir de 21 heures 30, par exemple, il est interdit à toute
personne, ndjiloise soit-elle, de s’aventurer sur le paisible couloir Zénit qui
va de la grouillante place sainte Thérèse à Simba. Ces quelques milliers de
mètres sont devenus, depuis quelques semaines, un repaire de kuluna. Les arbres
qui bordent ce couloir constituent, la nuit tombante, de dangereuses embuscades
de ces détrousseurs, alors que, le jour, les habitants y passent des heures
entières sous leur ombrage, surtout à des moments de canicule.
Des journalistes
victimes d’agressions
A ce jour, il est déplorable que les
journalistes soient devenus parmi les premières victimes d’agressions des
kuluna. Non qu’ils soient de potentielles victimes visées par ces malfrats,
mais qu’ils sont parmi les potentielles victimes en raison de la nature de leur
métier. Ceux de la presse écrite ont battu le record des agressions de
dernières semaines.
Sur le couloir Zénith, plusieurs
personnes se sont fait dépouiller de leurs biens de valeur. L’avenue Kinzau est
l’un des endroits de prédilection des bandits de N’djili. C’est ici que, dans
la nuit de dimanche 31 août à lundi 1er septembre, j’étais agressé
par deux kuluna en caleçons et torses nus, munis de longues machettes, qui ont
emporté mon appareil de photo. J’ai eu la vie sauve grâce à l’intervention
d’une famille qui s’est réveillée ayant entendu dans ma voix celle de son
proche qui était hors de la maison et à qui elle a téléphoné à.21heures 30, le
prévenant de ne pas revenir à la maison, ayant jugé la situation sécuritaire
dangereuse.
Après mon agression, deux autres
agressions se sont produites à cet endroit. Selon les habitants de cette rue,
les malfrats ont eu à arracher à leurs victimes tout ce qu’elles avaient sur
elles, y compris les habits qu’elles portaient !
Toujours dans le district de la
Tshangu, mais au quartier Kingasani, sur la route Mokali dans la commune de Kimbanseke,
un autre confrère du journal Le Phare, Jacques Kimpozo, a été à un doigt de la
mort après avoir été grièvement blessé à la machette par des kuluna à quelques
mètres de sa parcelle, dans la nuit de mardi 2 à mercredi 3 septembre. Il a eu
la vie sauve grâce à l’intervention des voisins. Il est sorti de cette
agression, outre plusieurs plaies et dépouillé de ses téléphones, avec le bras
droit cassé qui l’immobilise pendant trois mois hors de sa rédaction.
Un troisième journaliste, Lukaku
Lalabi, du groupe L’Avenir, a été, une semaine plus tôt, victime de l’agression
des détrousseurs, toujours dans le quartier de Kingasani, commune de
Kimbanseke. Ce confrère est à sa énième agression, certainement la troisième,
dans sa vie.
En dépit de quelques interventions
de la police, aucune autre intervention concertée et programmée des agents de
l’ordre n’est enregistrée. Il semble même que l’ampleur de la reprise des
activités des kuluna donne de la chair de poule aux policiers.
Autre époque, autre
mode opératoire
A faire foi aux agressions actuelles
des kuluna, ceux-ci ont changé de méthodes d’opération. Pour éviter d’être
attrapés par la police lors des patrouilles, les bandits portent désormais des
caleçons et opèrent torse nu. Quant aux armes blanches utilisées, ils se
servent de longues machettes. En réalité, ils soudent deux machettes en une
seule, question d’attraper facilement leurs victimes.
Le quartier Kingasani de la commune
de Kimbanseke est, selon certaines sources bien renseignées, infesté de
nombreux kuluna organisés en écuries. Chaque écurie est sous la direction d’un
chef de gang dont l’activité principale est la vente du chanvre et des
liqueurs, principalement le « Zododo ». Ainsi enivrés et drogués, ces
malfrats n’hésitent pas d’opérer même la journée. A en croire ce cas qui s’est
produit, il y a quelques semaines, tout près de la place Sainte Thérèse, dans
la commune de Ndjili. Le jeune Patrick, habitant la commune de Kimbanseke, commerçant ambulant, de son état, revient du
marché de Lufu, dans le Bas-Congo. Il est tard. Ainsi tous les passagers et
l’équipage du véhicule passent-ils le reste de la nuit dans un dépôt derrière
l’immeuble L’Homme, sur l’avenue Kinkuzu.
Vers 4 heures du matin, Patrick et
les autres passagers sont surpris par une meute de kuluna. Le jeune Patrick est
grièvement blessé au bras à la machette par les malfrats qui parviennent à lui
arracher sac contenant toutes les recettes réalisées au marché de Lufu et autres
objets de valeur, avant de prendre le large.. Patrick crie au secours et tous
les lève-tôt (receveurs, chargeurs, autres shégués…) présents à la place sainte
Thérèse parviennent à mettre la main sur quatre des malfrats, dont un handicapé
physique avec béquilles.
Comme le malheur de ceux qui causent
le malheur aux paisibles citoyens ne vient jamais seul, il est arrivé que ce
jour-là, la nouvelle de cette agression arrive aux longues et attentives
oreilles du très bouillant Célestin Kanyama revenant d’une patrouille vers
Ndjili-Brasserie. Il n’hésite pas à descendre sur les lieux pour accueillir les
malfrats. Entre temps, il prend en charge les premiers soins de Patrick avant
de recommander à sa maman de l’acheminer à l’hôpital militaire du camp Kokolo…
Un geste rare et digne d’éloges.
Alors qu’il est embarqué dans la
Jeep de la police, le kuluna handicapé a le culot de lancer des menaces à la
maman de Patrick. « Attends-moi, à mon retour, la menace-t-il, tu verras
le sort que je te réserverai avec ces béquilles ». « Aie la chance de
revenir », lui rétorque Kanyama.
Ces sources rapportent que ces gangs
seraient en connivence avec certains policiers de qui ils bénéficient
protection et complicité contre espèces sonnantes et trébuchantes, sinon une
partie du butin. Il arrive souvent que ces kuluna défient les paisibles
passants en leur lançant ceci : « Bino bokende na mosala, biso
na butu toko récupérer mbongo wana » (Vous, vous allez au boulot, nous,
nous allons récupérer cet argent la nuit, NDLR)
Si certaines communes sont
terrorisées par des kuluna, c’est-à-dire des voyous opérant avec des armes
blanches, d’autres communes sont investies par des hommes à main armée. Dans
tous les cas, les deux sortes de bandits opèrent partout. La commune de
Bandalungwa est l’une de ces coins de la capitale qui connaissent l’insécurité
au bout des armes. Il y a quelques jours, l’un de mes amis en a fait les frais
après avoir été victime d’un braquage des hommes à main armée qui circulaient à
bord d’une voiture…vers 21 heures 30.
Gabi Nsilulu qui venait de garer sa
Jeep blanche sur l’avenue Balari pour remettre un document à une personne, se
voit braquer par deux hommes munis d’armes de guerre qui venaient de descendre
d‘une voiture garée près de la Jeep. Entre temps, les deux coins de la rue étaient
investis par deux complices en armes, alors que deux autres veillaient au grain
dans la voiture, prêts à toute éventualité...
Les bandits prennent la fuite en
trombe et sans inquiétude après avoir arraché le sac de l’ami, son trousseau
des documents de bord du véhicule, ses deux téléphones, de l’argent, ses pièces
d’identité.. . Les malfrats ont réussi facilement leur coup grâce à
l’obscuritécomplice dans laquelle le quartier était plongé.
Endroits de
prédilection d’opération des kuluna
Les kuluna n’opèrent pas n’importe
où. Ils ont des endroits de prédilection qui leur permettent de surprendre
leurs victimes. Ils choisissent notamment des ruelles plus ou moins étroites
qui restent souvent dans le noir et qui sont bordées ou d’arbres ou de poteaux
de câbles électriques derrière lesquels ils se postent dans des embuscades auxquelles des passants distraits
sont incapables d’échapper.
Les malfrats adorent encore se
cacher derrière des véhicules garés sur des avenues ou rues. La plupart des quartiers
des communes de Kinshasa en sont abondamment pourvus.
Des terrains vagues ou ce que les
Kinois appellent des couloirs servent également des repaires dangereux des
kuluna. Pour l’instant, le couloir Zénith du quartier IV dans la commune de
Ndjili est l’un des endroits les plus dangereux de la ville de Kinshasa. Un
couloir paisible il y a quelques années, y compris toute la commune, des kuluna
ont fait de ce couloir leur site d’opérations fructueuses.
Depuis la recrudescence de la
criminalité ces derniers jours, plusieurs cas d’agression viennent d’être
opérés sur ce couloir, au grand dam de la population de Ndjili.
Des
cas pareils, parfois plus dangereux au cours desquels des personnes sont
envoyées ad patres sans autre forme de procès sont légion. Comme ceux au cours
desquels des victimes sont grièvement blessées par des kuluna qui abhorrent de
laisser leurs victimes sans signatures !
Ces cas ne sont qu’un échantillon
d’un nombre très important de la vague d’agressions et autres vols de toutes
sortes qui s’opèrent dans cette ville, de jour comme de nuit. Des cas qui
doivent interpeller les agents de l’ordre que les malfrats semblent défier.
Voilà pourquoi la population appelle
à la relancer de l’opération « Likofi » de bonne mémoire que tout
Congolais épris de paix et de sécurité a saluée frénétiquement. En dépit de
tout ce que les oiseaux de mauvais augure ont tenté de répandre sur son compte
pour lui jeter de l’opprobre.
S’il n’est pas possible de relancer
la même opération, c’est-à-dire sous la même dénomination, la population
souhaite qu’une autre opération de plus grande envergure, à la mesure de
l’ampleur prise par l’insécurité, vienne remplacer l’opération
« Likofi ». Tant mieux si les
géniteurs de ‘opération « Likofi » peuvent la dénommer opération
« Makofi ». Les bandits sont devenus plus dangereux et même plus
nombreux qu’il faut de nombreux coups de poing pour venir à bout d’eux. La
population piaffe d’impatience de la voir commencer.
Dans leur nouvelle croisade
meurtrière, les kuluna croient-ils défier le général Célestin Kanyama, un homme
qui adore les défis de ce genre, c’est-à-dire des malfrats ? De ce
général, la population attend une autre opération. Peu importe la dénomination,
ce qui importe, c’est les résultats !
Kléber Kungu
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