Santé en
péril
L’Afrique malade de médicaments
contrefaits
Les prises les plus importantes ont
été réalisées entre autres en RDC et l’Inde et la Chine sont les principaux
pays fournisseurs de ces faux médicaments.
Environ
113 millions de dollars américains constituent la valeur globale des
médicaments contrefaits saisis par deux organisations mondiales : l'Organisation
mondiale des douanes (OMD), basé à Bruxelles, en Belgique et l’Institut de
recherche anti-contrefaçon (IRACM), dans une vaste opération de saisie de
médicaments contrefaits menée dans 14 pays africains, de fin mai à début juin
2014. Aujourd'hui, ce
trafic bénéficie de conditions favorables : marché lucratif, faiblesse des sanctions
pénales, l'absence d'accords transnationaux, des systèmes de couverture sociale
déficients, la porosité des frontières, une chaine d'approvisionnement
vulnérable, le manque d'information.
L’opération surnommée « Biyela II »
a été menée par les douanes des pays concernés dans les principaux ports
maritimes d'Afrique de l'Est, de l'Ouest et du sud. Elle a été qualifiée de
réussite dans son ensemble et les prises les plus importantes ont été signalées
au Bénin, en Tanzanie et en République démocratique du Congo (RDC). Selon un
communiqué de l’OMD, l'Inde et la Chine sont les principaux pays d’où sont
venus les médicaments contrefaits.
Parmi ces faux médicaments sur
lesquels l'OMD a mis la main et qui constituent un taux de 17% de cette saisie
globale record, se trouvaient surtout des antalgiques, des anti-inflammatoires
et des antibiotiques, mais également d'antituberculeux. Dans des pays comme le
Bénin, le Togo et le Mozambique, on a décelé, pour la première fois, un trafic
significatif de produits vétérinaires illicites.
En deux ans d’une coopération bien
ficelée, l’OMD et l’IRACM, qui se réjouissent d’avoir intercepté environ 756
millions de produits illicites en Afrique, déplorent de vivre des phénomènes
inquiétants et en forte croissance.
L’IRACM déplore qu’alors que la
tendance s’aggrave, les pays concernés ne font pour l'heure preuve « d'aucune
bonne volonté ». L'urgence est désormais de remonter les filières, de
sanctionner les trafiquants et de saisir leurs avoirs.
700.000
personnes tuées par an
Selon un rapport paru en 2013, le
trafic pesait pour 55 milliards d'euros en 2010. Dans certains pays d'Afrique,
plus de la moitié des produits en circulation sont des contrefaçons.
Il pourrait s'agir du
premier commerce illicite mondial devant la prostitution et la vente de
haschich. Selon une étude de
l'IRCAM à la même période,
les ventes de médicaments contrefaits auraient atteint 55 milliards d'euros en
2010 contre 26 milliards en 2005, soit 10% du marché pharmaceutique légal.
Citant l'OCDE, le document affirme que 75% des contrefaçons émaneraient de
Chine et d'Inde, la moitié d'entre elles transitant par Dubaï pour empêcher
toute traçabilité.
Toujours selon cette
étude, 30% des médicaments sont falsifiés dans certains pays africains,
asiatiques ou d'Amérique latine. Au Nigeria et en Guinée, le taux serait même de
60%. Mais le fléau ne frappe pas uniquement les nations en voie de
développement. Les pays développés sont aussi frappés par ce fléau.
En 2011, les douanes américaines ont
saisi pour près de 17 millions de dollars de marchandises, soit une
augmentation de 200% par rapport à l'année précédente. D'autre part, selon un
rapport de la Commission européenne paru en 2012, les médicaments contrefaits
étaient les premiers produits saisis aux frontières de l'Union européenne via
les échanges postaux.
16 herboristes arrêtés pour
vente de faux médicaments
Par ailleurs, en Ouganda, seize
herboristes, dont quatre Kenyans Masai, ont été arrêtés par l’Autorité
nationale des médicaments (NDA) à Kampala pour colportage de faux médicaments
potentiellement dangereux pour la santé.
Pour s’appuyer sur des preuves, la
NDA a testé certains des médicaments saisis en laboratoires et a constaté que
l’un d’eux contenait un mélange de pesticides utilisés pour traiter les
tomates. Un autre «traitement» censé soigner 50 maladies (y compris la syphilis
et la gonorrhée) contenait un mélange d’eau et de savon.
Même si certains des médicaments
contenaient les bons ingrédients, ces traitements ne sont pas autorisés dans le
pays et peuvent mettre la santé des patients en danger.
En Ouganda, le nombre d’herboristes
est estimé à 42 000 et la plupart d’entre eux sont supervisés par leurs
associations.
En Afrique, en RDC en particulier,
grouillent de nombreux tradi-praticiens et autres charlatans qui proposent une
gamme très variée de leurs produits à base d’écorces et feuilles d’arbres à des
clients souvent peu critiques, surtout masculins. Ces produits qui n’ont aucune
dose précise sont composés d’une mixture souvent visqueuse. Les charlatans
africains proposent leurs produits en
vantant leur capacité à guérir quasiment toutes les maladies, le sida y
compris.
Ils arrivent même à proposer des
médicaments capables d’élargir et de grossir les pénis et ceux capables de
soigner tous les troubles sexuels de l’homme.
Au fléau de la contrefaçon, il faut
ajouter le problème des conditions de vente des médicaments en Afrique. Dans
bien des pays africains, les gouvernements sont peu regardants sur les
conditions de vente des médicaments. On y trouve des médicaments qui sont
proposés à même le sol dans un environnement très insalubre qui n’inquiète ni
les vendeurs ni les acheteurs.
Kléber Kungu
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