vendredi 4 juin 2010

Centre de Panzi : des femmes vulnérables gagnent leur vie avec l’argile (4)

Bukavu livre ses autres secrets
Centre de Panzi : des femmes vulnérables gagnent leur vie avec l’argile (4)
(Par Kléber Kungu)
Bukavu cache bien des choses dont il nous a livré une bonne partie lors de notre dernier séjour dans cette ville. Au centre de Panzi, nous sommes étonnés de voir un groupe de femmes, toutes joyeuses, chanter en travaillant à notre arrivée. Ces femmes manipulent à la main de l’argile avec une telle dextérité qu’elles en tirent ce que nous croyions être l’apanage des industries européennes. Des pots de fleurs de toutes les dimensions, des braseros, des carreaux, des porte-bougies, tous en argile, sont fabriqués par des…femmes. Panzi nous livre une autre face des femmes violées : des femmes qui, encadrées par l’ONG Women For Women (WFW), sont tournées vers une autre vie d’espoir.
C’est Gertrude Mudekereza, directrice de programme, accompagné de Gilbert Kajabika, Income Generation Manager, de Women For Women, qui nous fait découvrir les merveilles du Centre Panzi. A notre arrivée, un groupe de femmes qui suivaient une séance sur la nutrition, se mirent à chanter. D’ici, notre guide nous conduit vers un autre groupe de femmes, aussi joyeuses que les autres. A la seule différence que ce groupe-ci est à pied d’œuvre, manipulant de l’argile et du sable à même le sol avant d’en faire des pots de fleurs, des carreaux, des braseros, de porte-bougies et autres objets d’art habitués à nos yeux, mais dont nous ignorions comment ils sont fabriqués ni avec quelle matière.
Nous sommes à l’intérieur de l’atelier. Un groupe de femmes nous accueille par des chansons. Les chants terminés, elles reprennent l’activité. L’argile malaxée, comme de véritables machines, les femmes s’affairent à lui donner la forme voulue. Chantant, parlant, blaguant, les femmes modèlent l’argile, calmement, soigneusement. Après cette étape, les objets sont séchés pendant quelques jours avant leur cuisson dans un four devant l’atelier. Suivra l’étape de la peinture de l’objet avant d’être exposé.
« Voici des carreaux commandés par Women For Women du Rwanda », nous indique l’un des collaborateurs de Gertrude Mudekereza. « A combien revient un carreau ? » « Je ne sais pas, mais c’est beaucoup d’argent car c’est une grande commande», nous répond-on. Lorsqu’un brasero peut coûter jusqu’à 35 dollars et un pot de fleurs jusqu’à 50 dollars, pour ne prendre que ceux-là, l’on peut comprendre que ces mamans ne sont pas en train de perdre leur temps.
Une des formatrices nous en donne cette explication rassurante. « Quand elles avaient commencé ce métier, les autres femmes se moquaient d’elles car disaient-elles, elles avaient choisi la boue comme métier. Aujourd’hui, elles gagnent leur vie avec la fabrication de tout cela : les enfants sont scolarisés, elles assurent bien la restauration de la famille », nous raconte-t-elle, ajoutant qu’elle est prête de renoncer au mariage si son mari s’oppose. « Au début son mari s’était opposé, mais aujourd’hui, c’est le mari qui la réveille le matin pour l’encourager à aller au travail », termine-t-elle.
En tout, 200 femmes travaillant à la céramique sont encadrées par un formateur finaliste de l’Académie des beaux arts (Aba).
Le Centre accueille environ 1 200 femmes regroupées en activités ou métiers : des activités génératrices des revenus et des activités de renouvellement des capacités (économie, social, santé et nutrition, politique, notamment les élections). Les femmes reçoivent une formation de 26 thèmes avec 8 métiers (agropastorale, salon, céramique, petit commerce, coupe et couture). La formation en agropastorale dure 5 mois, celle des autres métiers prennent environ 2 mois. Les femmes arrivent 2 fois par semaine ou 8 fois par mois. Toutes les femmes reçoivent une formation sur les notions de base sur le petit commerce, en dehors de toutes les autres formations et celles qui excellent sont recrutées par WFW, les autres s’organisent d’elles-mêmes.
Les femmes sont sélectionnées selon certains critères : être veuve, illettrée, porteuse de VIH/Sida, chef de famille, retournée…
L’objectif du Centre est d’amener les femmes à être économiquement et socialement indépendantes.

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