Campagne électorale à haut risque
Le décor déjà planté : injures, invectives, provocations, affrontements, violences, intolérance…
Quelque 4 mois nous séparent des élections dont nous cessons de parler chaque jour. Si nous parlons de ces élections qui seront les deuxièmes démocratiques que nous aurons à organiser après celles - les premières – de 2006, certains esprits éveillés craignent qu’elles ne se déroulent pas comme nous les souhaitons : apaisées, paisibles. Des signes précurseurs de ce qu’elles seront, à commencer par la campagne, parlent déjà d’eux-mêmes. Le Katanga semble donner le coup d’envoi de ce que sera une campagne électorale que je crains être à haut risque. Par-ci par-là, des feux couvent et des allumeurs de ces feux ne lésinent pas sur les moyens pour qu’ils –feux – brûlent haut. Injures, invectives, provocations, affrontements, violences, intolérance, voilà des ingrédients qui vont envenimer la campagne.
Il y a quelques jours, ce que nous pouvons appeler la guerre entre les partisans de J-C. Muyambo et ceux de Moïse Katumbi, a défrayé la chronique, mettant à nu l’intolérance politique de certains politiciens que la RDC compte, à quelques mois seulement des élections qui s’annoncent très houleuses, dangereusement houleuses.
Il a fallu que Jean Claude Muyambo se mît à critiquer la gestion ou le mandat de Moïse Katumbi Chapwe. Pour l’ancien ministre des Affaires sociales, l’actuel gouverneur du Katanga, dont les œuvres ont traversé les frontières du Katanga, a déçu les attentes des électeurs. Voilà l’étincelle qui a allumé ce feu.
Sans se laisser prier deux fois, les partisans de second sont descendus dans la rue. Femme, hommes, filles, garçons, jeunes et vieux, pour la plupart des personnes identifiées comme appartenant aux supporters du Tout-puissant Mazembe appelés «Cent pour Cent » s’y sont donné rendez-vous. Destination : le siège de la télévision de celui qui a osé critiquer les leur. Une descente punitive qui a failli coûter très cher au patrimoine de cet homme politique si l’intervention des agents de l’ordre était arrivée fort en retard.
D’autre part, quelques jours auparavant, comme pour donner le ton de ce que lui voudra que soient les élections, le très bouillant président de l’assemblée provinciale du Katanga et président de l’Union des fédéralistes nationalistes congolais (Unafec), Kyungu wa Kumwanza, s’est arrogé le droit de demander à ses militants de s’en prendre à ceux qui ne voteraient pas en faveur de leur candidat lors des prochaines élections. Un discours qui n’est rien d’autre qu’une incitation à la haine. Seigneur, merci que tu pousses ceux qui avaient chassé Mobutu pour avoir instauré le parti unique, à cheminer lentement vers cette voie périlleuse !
« Si Kabila échoue, il faut commencer à rentrer chez vous vous-même, car ici c’est le fief de Joseph Kabila… », avait menacé Kyungu wa Kumwanza. Une menace à peine voilée qui cache difficilement les mauvaises intentions du président de l’Assemblée provinciale du Katanga.
La situation de l’intolérance politique semble se généraliser à travers toutes les provinces de la RDC. Deux autres provinces ont connu une situation pareille. Le Bandundu a vécu des moments tendus entre les partisans d’Olivier Kamitatu et ceux de Tryphon Kin Kiey Mulumba, tous deux de la Majorité présidentielle (MP), y compris le Kasaï oriental où des conflits sont signalés entre le CCU de Lambert Mende et le MSDD de Christophe Lutundula. Comme quoi, la famille politique présidentielle est rongée par l’intolérance politique, à quelque 4 mois des élections qu’elle veut à tout prix remporter haut la main.
Le secrétaire intérimaire de la Majorité présidentielle (MP), Louis Koyagialo, peut beau avoir appelé à la dédramatisation de cette situation, le mal est déjà fait et le crédit politique de la famille politique du chef de l’Etat est fort entamé.
De quoi la campagne électorale des élections de 2011 sera-t-elle faite ? Le décor semble déjà planté quelques mois avant les échéances qui s’annoncent très chaudes avec des discours de haine, d’exclusion, de discrimination, de violence.
Le jeu démocratique, qui paraît un couteau à double tranchant en appelant les adversaires à la tolérance et au respect de la liberté d’expression et d’opinion, reste dans la pratique un exercice difficile et périlleux.
L’intolérance politique qui vient d’élire domicile au sein de la famille politique de Joseph Kabila est si criante que le silence de donneurs de leçons nous semble incompréhensible, aussi coupable que complice.
Il est de l’intérêt de l’autorité morale de la MP de rappeler à l’ordre tous ceux qui, inutilement trop zélés, risquent de mettre tout en feu, au point de remettre en cause tout le processus électoral. Il appartient également au pouvoir d’éviter de donner l’impression de prendre fait et cause pour ceux de la MP. Assurer la sécurité de personnes et de leurs biens sans discrimination liée notamment à l’appartenance politique, tribale, ethnique provinciale et raciale doit être leur préoccupation majeure durant cette période très cruciale.
Car, si aujourd’hui les partis politiques de la MP, par des partisans des leaders de ces partis interposés, n’hésitent pas à s’affronter, demain, nous craignons d’assister à la guerre entre les partisans des leaders des partis politiques de la MP et de l’opposition.
Ce qui risque de faire beaucoup de dégâts que nous nous mettrons à regretter plus tard.
Kléber Kungu
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