Sur environ 30 000 véhicules Mercedes 207 circulant à
Kinshasa
Quelque 185 taxis-bus 207 seulement ont passé le contrôlé technique
* A 9 jours du 15
mars, date butoir du sursis de Matata Ponyo, les propriétaires de 207 attendent
la dernière minute pour se rendre au contrôle technique.
* André Kimbuta est
catégorique : à partir du 16 mars prochain, aucun véhicule non soumis au
contrôle technique ne pourra circuler.
* Alors que Kinshasa compte quelque 400 000
véhicules en circulation, il avait seulement plus ou moins 3% de ces véhicules
qui passaient au contrôle technique.
* Environ 90% de
taxis-bus 207 n’ont pas de freins arrière
Neuf petits
jours seulement nous séparent de l’expiration du sursis que le Premier ministre
Matata Ponyo a imposé aux transporteurs en général et aux propriétaires de
taxis-bus de marque Mercedes 207 en particulier. Nous avons fait le tour de
trois centres de contrôle technique agréés à Kinshasa : la Société congolaise de
contrôle (SCCT) sur l’avenue des Poids lourds à Kingabwa, Trinity 3 SPRL au pavillon 19 à la Foire internationale de Kinshasa (Fikin) et le
Centre de formation et de contrôle
technique automobile (CFCTA) de l’Institut national de préparation
professionnelle (INPP) sur la 11ème rue Limete. La constatation
faite est fort décevante. Depuis février, environ 185 véhicules seulement sont
passés au contrôle technique pour quelque 30 000 véhicules
« 207 » circulant à Kinshasa : 135 pour la SCCT, 30 pour le CFCTA et
moins de 20 pour Trinity 3 SPRL. En dépit de la réticence totale des
propriétaires de véhicules de passer au contrôle technique, le gouverneur de la
ville de Kinshasa est sans pitié. « Aucun
véhicule non soumis au contrôle technique ne pourra être autorisé à circuler à
Kinshasa à partir du 16 mars ». Ce qui entrevoit, par conséquent, des
perturbations de transport après le 15 mars.
En dépit du
sursis de Matata Ponyo qui expire dans 9 jours, les propriétaires de véhicules
et autres chauffeurs sont déterminés à engager un bras de fer avec le
gouvernement, question de lui infliger un autre camouflet après celui ayant
abouti à un mouvement de grève de trois jours déclenché en mai 2012 par les
chauffeurs du secteur des transporteurs en commun fatigués d’être victimes de tracasseries
diverses de la part de la brigade routière.
Ils
continuent de traîner les pas, attendant la dernière minute pour se précipiter
dans les trois centres de contrôle technique agréés par le gouvernement
central. Me Jacques Angbaya, consultant juridique à la SCCT attribue cette situation
aux habitudes des propriétaires de véhicules qui veulent toujours venir au
dernier jour pour faire le « nzombo
le soir ». En plus, continue-t-il, les clients ou les assujettis
pensent que le contrôle ne sera pas effectif. La troisième raison est que les
assujettis sont sous informés en pensant qu’en allant au contrôle technique,
leurs véhicules risquent d’être garés ou jetés à la fourrière s’ils sont
déclarés en mauvais état.
Depuis
février, date du début de cette mesure, environ 185 véhicules seulement sont passés
au contrôle technique pour quelque 30 000 véhicules « 207 »
circulant à Kinshasa : 135 pour la
SCCT, 30 pour le CFCTA et moins de 20 pour Trinity 3 SPRL.
Dans ce lot, quelques minibus Hiace, mais aucun Combi, déplore Jupile Alentum.
Malgré la réticence totale des propriétaires de véhicules de passer au contrôle
technique, le gouverneur de la ville de Kinshasa est sans pitié. « Aucun véhicule non soumis au contrôle
technique ne pourra être autorisé à circuler à Kinshasa à partir du 16
mars ». Ce qui entrevoit, par conséquent, des perturbations de
transport après le 15 mars.
Le contrôle technique
coûte moins cher
Selon la
loi, le contrôle technique se fait deux fois l’an, c’est-à-dire après 6 mois. En
plus, ils pensent que le contrôle technique est cher. « Le contrôle
technique ne coûte pas cher », rassure-t-il. « Pour un véhicule 207,
c’est moins du montant de versement quotidien, en dessous du montant qu’ils
versent quotidiennement », ajoute-t-il. Quant à la durée du contrôle
technique, Jacques Angbaya précise qu’il dure au maximum 15 minutes, ajouter
les autres formalités (paiement des frais à la banque notamment), il peut
atteindre les 20 minutes.
Au sujet
des frais de contrôle technique, du reste fixés par le gouvernement, tous les
centres de contrôle technique visités, les frais sont les mêmes pour tous les
véhicules, de la moto au véhicule spécial en passant par la voiture, toutes
catégories confondues, en plus de 6 000FC des frais bancaires et le prix
de la vignette à 3 500 FC. « Aucun
véhicule ne paie 100 dollars ou au-delà », a conclu-t-il.
La
tarification actuelle se présente comme suit :
Moto : 44,4 dollars
Voiture :, 65,28 dollars
Camionnette, jeep, minibus : 76,56 dollars
Camion, bus, taxi-bus, remorque, véhicule spécial :
87,68 dollars
Que tous
ceux qui pensent que le contrôle technique ne sera pas effectif se détrompent,
conseille Me Jacques Angbaya et que le gouvernement se laissera faire. A ce sujet, il a répété les propos du
gouverneur de la ville de Kinshasa, le jour de l’inauguration du guichet
unique, selon lesquels aucun véhicule non contrôlé ne pourra circuler à partir
le 16 mars prochain.
En outre,
il les conseille de faire contrôler leurs véhicules car le contrôle technique
est loin d’être une blague se fondant sur le fait que le commissaire général de
la police, l’ADGA de la Sonas
et le gouverneur de Kinshasa ont procédé au contrôle technique de leurs
véhicules. « Si le numéro un de la police, l’assureur national et le
premier citoyen sont passés au contrôle technique, ce n’est pas de la blague.
Il rassure les assujettis sur le fait que le centre de contrôle n’est pas une
fourrière. Son rôle s’arrête au contrôle technique des véhicules pour vérifier
leurs états sécuritaires.
Pour Jupile
Alentum, directeur technique et expert en contrôle technique automobile au
centre Trinity 3 SPRL, la réticence des propriétaires de véhicules à procéder
au contrôle technique de leurs véhicules est due à l’état très défaillant de
ces véhicules. Sachant d’avance cela, ils hésitent à se présenter au centre
attendant la dernière minute pour provoquer l’engouement. Il précise que
l’argent est loin d’être la cause de la réticence des chauffeurs de faire
contrôler leurs véhicules. Ils abhorrent le contrôle technique car il prend du
temps.
Prêt à débourser près
de 4 000 dollars pour corrompre !
Dans ce
genre de circonstance, la corruption est toujours présente. Jupile Alentum nous
a fait part des tentatives de corruption de la part des propriétaires de
véhicules. A l’instar de ce propriétaire de 75 taxis-bus de marque Mercedes 207
qui s’est présenté au centre Trinity 3 pour solliciter sa compréhension en lui
proposant de payer 120 dollars pour chaque véhicule. Ce qui aurait donné un
montant de…9 000 dollars américains. Un montant que le propriétaire corrupteur
était près de payer à une seule condition que ses véhicules ne passent pas au
contrôle technique et obtiennent les certificats de contrôle technique.
Alors que
le montant total à payer pour faire contrôler ses véhicules est de 5 742
dollars ! Pourquoi, doit-on se demander, cet homme est-il prêt à payer
9 000 dollars que 5 742 dollars, soit une différence de 3 258
dollars de plus ? La réponse est simple à découvrir : l’homme craint
fort pour ses 75 Mercedes 207 qui ne sont pas en bon état !
La constatation
de Jupile Alentum sur l’état général des « 207 » est dangereusement
amère. « Environ 90% de taxis-bus
207 n’ont pas de freins arrière », déplore-t-il. Allez-y comprendre la
suite pour la vie des passagers et des passants !
Il va me
raconter une autre anecdote. Certains chauffeurs viennent au centre avec le
receveur. Ils se cachent en envoyant le receveur en éclaireur pour tâter le
terrain. A la vue de la manière dont se fait le contrôle, il se met à
téléphoner au chauffeur en le prévenant que si d’aventure leur véhicule venait,
il ne tiendrait pas le coup.
Il y en a
même des plus « malins » - j’en ai vu un alors que j’étais au centre
– qui prennent la précaution de se présenter avec le véhicule débarrassé de
tous les bancs.
Certificat de contrôle
parallèle
Comme pour
narguer l’autorité des Transports et ainsi minimiser le travail fourni par les
centres techniques. Certains chauffeurs et propriétaires de véhicules
n’hésitent pas de déclarer tout haut qu’ils vont acheter ces certificat de
contrôle technique, comme cela se faisait auparavant. Le centre Trinity 3
déplore, en plus la réticence des propriétaires de véhicules, l’émission des
certificats de contrôle parallèles. Pour contrer cette maffia, le centre a mis
en circulation une vignette difficilement falsifiable, en plus d’un certificat
de contrôle technique de la ville.
Malheureusement,
déplore Jupile Alentum, nous sommes combattus par ces mêmes agents de l’hôtel
de ville qui délivrent les certificats de contrôle technique, se sachant dépouillés
d’une grosse ressource financière, se sont arrangés pour obtenir aussi
l’exclusivité de la fabrication de cette vignette. Vive donc le certificat de
contrôle parallèle ! Vive la maffia !.
Voilà
pourquoi le centre en appelle à la coopération du gouvernement. « Que le gouvernement nous approche car le
contrôle technique que nous faisons est le travail du gouvernement. C’est
pourquoi nous lui demandons de faire la sensibilisation », déclare le
directeur technique de Trinity 3.
Etapes du contrôle
technique
Le contrôle
technique est effectué en deux principales étapes : le contrôle visuel et
le contrôle à l’aide des équipements. Le contrôle visuel consiste à vérifier
l’état extérieur et intérieur du véhicule, le châssis et la fixation de
différents organes du véhicule, nous précise Yvon Mafuta, technicien en ligne à
la SCCT.
Le contrôle
à l’aide des équipements, quant à lui, comporte plusieurs étapes dont les plus
importantes :
- l’analyse de l’émission du gaz à effet de serre au moyen de l’analyseur des gaz ou l’opacimétre : Ce contrôle sert à vérifier le degré de pollution de l’environnement.
- le plaque de ripage : il sert à vérifier la stabilité du frein avant en ce qui concerne les 3 angles de direction.
- la bande de suspension pour vérifier l’efficacité des amortisseurs, des ressorts à boudin, des bandes de suspension…
- le freinomètre sert à vérifier l’efficacité du système de freinage (freins de service et freins de stationnement)
- le réglophare : cette machine sert à vérifier l’intensité de la lumière des phares, l’orientation des feux lumineux sur les plans horizontal et vertical.
- la fosse ou le pont élévateur est le dernier contrôle technique. Il s’agit de la sous caisse. Le technicien vérifie la direction, la transmission, la suspension, l’état du châssis, des rotules…
Mais
auparavant, le contrôle commence par l’identification du véhicule et celle du
propriétaire sur la base d’une fiche technique.
Les chauffeurs
méritent aussi un recyclage
La nécessité et l’importance du contrôle technique
des automobiles font l’unanimité. Sauf des chauffeurs qui rechignent toujours à
faire contrôler techniquement leurs véhicules. Pour Laurent Bea Mwayila,
adjoint technique au CFCTA/INPP, « le contrôle technique, oui, mais il y a
le problème de l’homme [le chauffeur]. Les chauffeurs, propose-t-il, doivent
être recyclés. Ainsi va-t-on remettre aux chauffeurs, en plus du permis de
conduire, un document attestant son recyclage. Car, il existe cette
trilogie : homme-véhicule-route.
Les trois
composantes de cette trilogie sont si intimement liés que tout excellent que
puisse être un chauffeur, s’il conduit un véhicule qui n’est pas soumis au
contrôle technique, son expérience risque d’être prise au dépourvu. En plus,
que valent un bon chauffeur et un véhicule en bon état technique si la route
est en mauvais état ?
La réponse
d’un taximan à qui j’ai demandé s’il a déjà soumis sa voiture au contrôle technique,
pourquoi et combien coûte les frais de ce contrôle, a été toute surprenante. Il
a simplement accusé l’Hôtel de ville de vouloir étouffer les chauffeurs en leur
imposant le contrôle technique de leurs véhicules. « Pourquoi ce contrôle technique ? Elles [les autorités] vivent bien et veulent nous provoquer », tonne-t-il. Quant aux frais, ils
coûtent 100 dollars.
Par contre,
un autre du Bas-Congo, plus réaliste et responsable, m’a répondu, après avoir
appris ce que coûte un contrôle technique d’une voiture, qu’il allait le faire
aussitôt rentré à Kinshasa. Car, a-t-il
soutenu, le contrôle technique est important et avantageux pour les usagers de
la route.
Tout compte
fait, habitués à opérer dans un climat de désordre, les propriétaires de
véhicules congolais sont prêts à faire tout, sauf à soumettre leurs véhicules
au contrôle technique. Sachant d’avance que ces véhicules sont en mauvais état,
ils préfèrent corrompre en payant plus que ce qui est exigé, pourvu qu’ils
obtiennent les certificats de contrôle.
Ce n’est ni
l’argent pas l’argent qui fait défaut. Leur réticence ou le retard pris pour
faire contrôler leurs véhicules est expliqué par leur volonté de rééditer leur
triste exploit de mai 2012 pour faire plier l’autorité.
C’est à un
bras de fer entre les chauffeurs et l’autorité que nous nous apprêtons à vivre
à partir du 16 mars. Les chauffeurs espérant à un autre sursis de Matata Ponyo,
attendent la dernière minute pour faire la queue devant les centres de contrôle
technique.
Sans nul
doute, si l’autorité maintient sa mesure, le secteur des transports en commun
connaîtra de fortes turbulences après 15 mars.
Kléber Kungu
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