jeudi 21 mars 2013
Ntaganda hors d’état de nuire, est-ce le retour de la paix dans la région ?
Ntaganda hors d’état de nuire, est-ce le retour de la paix dans la région ?
L'ex-général Bosco Ntaganda se trouve au Rwanda depuis lundi 18 mars. Il se terre précisément à l’ambassade des États-Unis à Kigali. Sous le coup de deux mandats d'arrêt de la CPI pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité en RDC. Mieux, lui-même est allé plus loin. Il ne veut pas rester au Rwanda. Il tient à terminer sa carrière de tueur au centre pénitentiaire de Scheveningen de La Haye. Mais Bosco Ntaganda écarté de la scène politique congolaise, peut-on parler d’un retour de la paix dans une région que la cruauté de ce seigneur de guerre et de ses hommes a contribué à déstabiliser des décennies durant ? Pas sûr. Même s’il existe l’accord-cadre signé dernièrement à Addis-Abeba par 11 chefs d’Etat de la région. Ce qui est sûr, c’est le fait que Bosco Ntaganda est hors d’état de nuire définitivement.
À l'ambassade américaine à Kigali, Bosco Ntaganda est dans l’attente du sort qui lui sera réservé. Depuis qu'il s'est rendu, les réactions fusent de partout pour saluer cette reddition. Mais surtout pour réclamer que l’extradition de Bosco Ntaganda à la CPI soit effective et immédiate. Quel impact pourrait avoir cette mise hors-jeu du chef rebelle sur la crise en RDC ? s’interrogent des esprits avertis.
Pour bien des analystes, la reddition de Bosco Ntaganda constitue un "tournant décisif vers la paix". C’est ce qu’estime la fédération d'ONG de la société civile du Nord-Kivu, l’une des régions les plus instables de la RDC, mais très riches en matières précieuses qui aident à alimenter la guerre et qui provoquent la convoitise des uns et des autres. Sous le coup, depuis 2006, de deux mandats d'arrêt international pour crimes de guerre et crimes contre l'humanité, Bosco Ntaganda devra répondre à la CPI de crimes de guerre et crimes contre l'humanité perpétrés dans l'est de la RDC en 2002 et 2003.
Pour Aloys Tegera, directeur de la section recherche de Pole Institut, l'Institut interculturel dans la région des Grands Lacs, cité par la radio allemande Deutsche Welle (DW), le départ de Bosco Ntaganda ouvre la voie à plusieurs possibilités pour la rébellion en RDC.
« Il avait un rival avec lequel il se battait au sein du M23. Tout ce qui pesait sur le mouvement à cause du passé de Ntaganda ne sera plus quelque chose qui jouera contre eux. Maintenant, ils ont la latitude soit de discuter avec Kinshasa, soit de trouver un compromis avec lui. » Comme quoi, la rébellion du M23, du moins la faction Makenga, a désormais les coudées franches pour pouvoir trouver un accord avec Kinshasa.
Tous les démentis des rebelles du M23 sur l’ascendance qu’a eue Bosco Ntaganda sur le Mouvement n’ont pas empêché de nombreux experts de soutenir que Bosco Ntaganda jouait un rôle de premier plan au sein du mouvement.
Depuis le 9 décembre 2012, des pourparlers de sortie de crise sont en cours à Kampala. Selon un projet d'accord, il est prévu une réintégration de certains éléments du M23 dans l'armée, où ils étaient entrés aux termes de l'accord du 23 mars 2009. Un accord dont ils réclament la pleine application.
Un « pion du Rwanda et de l'Ouganda » ?
Pour certains esprits, la mise à l’écart de « Terminator » ne changera rien dans la région en matière de sécurité. D’autant plus que Bosco Ntaganda n’est qu’un pion à la solde du Rwanda et de l’Ouganda. Donc, les vrais commanditaires de l’insécurité dans la région étant encore libres de leur mouvement, c’est-à-dire leur capacité de nuisance étant encore intacte, la région ne pourra connaître qu’une accalmie.
Ainsi pour Fernandez Murhola, secrétaire national du réseau national des ONG de défense des droits de l'Homme de la RDC, la détention de Bosco Ntaganda ne va rien changer pour le moment à la situation dans l'est du pays. Il s’en défend : « Bosco Ntaganda n'était qu'un pion. Le conflit dans l'est du pays, c'est le Rwanda et l'Ouganda. Ce sont ces deux pays qui doivent respecter les clauses du pacte sur la paix et la sécurité et le développement dans la région des Grands Lacs. Ils doivent être aussi en mesure de respecter aussi le dernier accord d'Addis Abeba. »
Des experts de l'Onu ont toujours soutenu dans plusieurs rapports que le Rwanda et l'Ouganda soutenaient des mouvements de rébellion dans la partie orientale de la RDC. Des allégations que ces deux pays voisins de la RDC ont toujours niées.
Quoi qu’il en soit, la reddition de Bosco Ntaganda et, bientôt, son transfert à la CPI, aura pour effet d’atténuer l’activisme des groupes armés qui pullulent dans cette région. Ce qui est arrivé à Bosco Ntaganda, un grand des seigneurs de guerre les plus craints et les plus influents de la région va donner matière à réflexion à tous ceux qui croient que l’arrestation ou l’assassinat, voire le séjour à la CPI pour un beau procès qui prend souvent plusieurs années, n’arrivent qu’aux autres. Bosco Ntaganda était, il y a quelques jours, de ceux qui croyaient ainsi.
Aujourd’hui, il est en train de réfléchir sur ce qu’il va raconter aux juges de la CPI sur tous les crimes qu’il a commis sur la population congolaise durant plusieurs années. Sans inquiétude.
Kléber Kungu
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