Stabilisation de la République centrafricaine
Kinshasa envoie 850 militaires pour le compte de la Misca
«Quand la case du voisin brûle, va vite l'aider à l'éteindre, sinon l'incendie touchera tout le monde», dit un vieux dicton du continent: Kinshasa n’a pas attendu longtemps pour envoyer un contingent de 850 militaires en République centrafricaine (RCA) en vue d’aider le président centrafricain Michel Djotodia à faire face à l’insécurité causée par les hommes qui l’ont porté au pouvoir, les rebelles de la Séléka.
La République démocratique
du Congo a envoyé huit cent cinquante militaires en République centrafricaine
dans le cadre d’une mission africaine de maintien de paix. Ces soldats, qui
doivent former, avec des soldats d’autres pays africains, la Mission internationale de
soutien à la Centrafrique
(Misca), ont la lourde mission de stabiliser ce pays dont la situation
sécuritaire est précaire depuis la chute de François Bozizé en mars dernier.
Cette mission est la toute première
pour l’armée congolaise qui n’a jamais participé à une mission internationale
de maintien de paix.
En envoyant
ses militaires en RCA, le gouvernement congolais compte faire d’une pierre deux
coups en protégeant également sa population contre des éventuels débordements
de la situation sécuritaire et humanitaire qui prévaut dans ce pays
voisin. Les militaires congolais se rendront en République centrafricaine
dans quinze jours au maximum.
Misca forte de
3 700 hommes
Forte de 3700
hommes et mandatée par l’Onu, la
Misca a officiellement succédé jeudi 19 décembre à la Fomac, la Force jusqu’alors déployée
par l’Afrique centrale en RCA.
Donc, comme
dit ce dicton africain, « Quand la case du voisin brûle, va vite l'aider à
l'éteindre, sinon l'incendie touchera tout le monde», il n’y a pas de raison
pour le gouvernement congolais d’être spectateur en regardant la situation se
détériorer en RCA sans rien faire.
De plus, la RDC qui partage avec la RCA une frontière de 1577 km ne pouvait pas laisser ce pays
continuer de s’enflammer au risque de déstabiliser profondément sa propre
tranquillité qui est loin d’être stable, car à peine sortie d’une guerre qui
l’a profondément ruinée.
« Un
autre raison vient s’ajouter à celle-là, c’est la proximité de la République Centrafricaine
et l’impact des désordres qui y surviennent sur la situation sécuritaire et
humanitaire dans la partie Nord de notre pays. Nous avons une frontière de 1577
km avec la RCA. Elle
s’étend de Libenge en province de l’Equateur à Ndu dans le territoire de Bondo
en Province Orientale, c’est une raison suffisante pour que nous puissions nous
préoccuper des précautions à prendre pour que ces conflagrations qui ont
déstabilisé la République
centrafricaine, ne débordent pas dans notre pays comme nous l’avons vu en 1994 »,
a indiqué le porte-parole du gouvernement congolais au cours d’une conférence
de presse.
Près de 50 000
réfugiés centrafricains en RDC
La
situation en RCA est plus préoccupante que plus de 47 000 réfugiés
centrafricains vivent actuellement en RDC, dont environ plus de 20 000 ont déjà
été transférés dans les quatre camps de réfugiés créés par le HCR à l’Equateur
et en Province Orientale, selon la chargée des Relations extérieures au Bureau
régional du HCR, Céline Schmitt.
Les
réfugiés centrafricains avaient traversé la frontière pourtant fermée par les
autorités centrafricaines depuis jeudi 5 décembre, fuyant les affrontements
entre les militaires fidèles à l’ex-président François Bozizé et les
ex-rebelles de la Seleka,
qui ont pris le pouvoir à Bangui depuis mars dernier.
Placé au
pouvoir en mars dernier par les rebelles de la Seleka, le président de la
transition, Michel Djotodia, peine à rétablir la sécurité dans un pays qui
sombre dans le chaos des tueries interreligieuses.
Aussi
Michel Djotodia a-t-il appelé samedi au "sursaut national" et
renouvelé son offre de dialogue aux milices chrétiennes, alors que le pays
menace de nouveau de s'embraser après une reprise des tueries interreligieuses.
En début de
soirée, des tirs et de fortes détonations étaient audibles en provenance des
quartiers Gobongo et PK12, dans le nord de la ville, à proximité de l'aéroport.
"Nous sommes condamnés à enclencher la bataille de la
réconciliation nationale pour le triomphe du bien sur le mal. Mais pour y
arriver, il nous faudra une plus grande dose de patriotisme et un sursaut
national", a lancé le président Djotodia, dans une déclaration lue aux
médias à sa résidence de Bangui.
"Transformons
dès maintenant nos machettes, nos fusils et autres armes en bulletins de vote
et gardons notre mal en patience", a plaidé l'ancien chef rebelle, arrivé
au pouvoir par les armes en mars 2013 à la tête de la Séléka, une coalition
hétéroclite de groupes armés musulmans.
"Je renouvelle mon entière disponibilité à discuter
avec tous ceux qui ont pris les armes, à tort ou à raison, pour qu’enfin tous,
sans exception, nous soyons désarmés", a-t-il poursuivi: un désarmement
physique mais aussi et surtout un désarmement de cœur, car la survie de notre
nation en dépend".
C'est la
seconde fois que le président Djotodia fait une telle offre de dialogue aux
milices d'autodéfense chrétiennes "anti-balaka" (anti-machette, en
lutte contre les Séléka) depuis les massacres à grande échelle qui ont éclaté
le 5 décembre à Bangui et fait près d'un millier de morts dans le pays.
La plupart
des victimes ont été tuées dans des représailles de la Séléka, mais également dans
les atrocités des milices anti-balaka contre les civils musulmans. M. Djotodia
avait alors été sévèrement critiqué, notamment par la France, pour ne pas avoir
pu ou voulu contrôler ses hommes de l'ex-Séléka.
Ces
violences ont précipité l'intervention militaire de la France, dont les 1.600
militaires, qui ont déjà perdu trois des leurs, et sous lannaière de
l’opération Sangaris (papillon en langue locale), tentent depuis lors de
désarmer les belligérants et opèrent en appui à la Misca, forte de 3.700
hommes.
Les
déclarations de M. Djotodia interviennent au lendemain d'un nouveau regain de
violences dans la capitale centrafricaine, où une trentaine de personnes ont
trouvé la mort dans des affrontements à proximité de l'aéroport, impliquant des
soldats tchadiens de la force africaine.
La
situation à Bangui est tellement explosive que les musulmans, privés de la
protection des Séléka dans la rue, furieux, se sentent abandonnés et se disent
à la merci des représailles des anti-balaka, reprochant à l'armée française de
les priver des moyens de se défendre.
Les
ressortissants tchadiens sont également victimes des représailles des
Centrafricains, notamment les anti-balaka qui les accusent d’être des musulmans
et d’avoir amené la Séléka
au pouvoir. Une patrouille tchadienne a même été attaquée jeudi soir par des
anti-balaka, un officier tchadien tué dans l'embuscade et plusieurs soldats
blessés.
Depuis
N'Djamena, le président tchadien Idriss Déby a confirmé l'incident, et appelé
les Centrafricains "à ne plus s'en prendre aux militaires tchadiens qui
sont là pour les aider à sortir de leur situation".
C’est dans
un tel contexte mêlé de violences, d’insécurité et de représailles que les
militaires congolais vont intervenir dans une Centrafrique bouillonnante et en
flammes.
Kléber Kungu
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