jeudi 18 octobre 2012
Soutien au M23 : l’Ouganda, drôle de négociateur !
Soutien au M23 : l’Ouganda, drôle de négociateur !
Kigali et Kampala continuent de soutenir les rebelles armés du Mouvement du 23 mars, M23, dans l'est de la RDC, selon un nouveau rapport jugé confidentiel et attribué à un groupe d'experts des Nations unies. La publication de cet énième rapport de l’Onu, aussi retentissant que les précédents sur l’implication du Rwanda et, particulièrement, de l’Ouganda dans le soutien matériel et en hommes qu’ils ne cessent d’apportent aux rebelles du M23, met en cause la crédibilité de la médiation dont Kampala a été chargé par ses pairs lors des sommets sur la crise congolaise qui se tiennent dans la capitale ougandaise.
Lorsqu’un pays ou une personnalité chargé d’assurer la médiation ou la négociation entre deux belligérants est cité dans un rapport comme étant de mèche avec l’un des belligérants, il ne faut pas être juge pour comprendre que la crédibilité de ce négociateur est fort douteuse. Comment s’attendre à un aboutissement heureux et satisfaisant dans un conflit où est impliqué un pays portant deux casquettes : de négociateur et cette d’agresseur ?
Depuis quelques mois, la communauté internationale a engagé les différentes parties impliquées dans la guerre d’agression dont Congo Kinshasa est victime dans la logique de la négociation en chargeant le président Yoweri Museveni Kaguta, dont le pays est l’hôte de différents sommets qui traitent la question de la crise congolaise, de mener les négociations entre le M23 et Kinshasa et en organisant le 27 septembre un mini-sommet à New York, en marge de la dernière assemblée générale de l’Organisation des Nations unies.
Une démarche très savamment mise en place pour que les belligérants y soient impliqués sans qu’ils n’aient pas le temps ni l’occasion de réagir à une démarche pour laquelle la partie congolaise, par exemple, n’a pas opté. Alors que les rebelles du M23 y ont accédé dès le premier jour que cela avait été annoncé, déclarant qu’ils étaient favorables à des négociations en exigeant même la présence personnelle de Joseph Kabila.
Alors que la démarche a déjà fait du chemin, voilà qu’aujourd’hui, des experts de l’Onu viennent renforcer l’implication de l’Ouganda dans la guerre d’agression contre la RDC, par les rebelles du M23 interposés. En effet, il y a quelques semaines, des ONG et la Société civile du Nord-Kivu avaient déjà accusé Kampala d’être impliqué dans la guerre que mènent les hommes du général renégat Bosco Ntaganda et de Sultani Makenga, qui reçoivent tous deux leurs instructions du général de l'armée rwandaise (FRD) Charles Kayonga, lui-même sous les ordres du ministre de la Défense, James Kabarebe.
A Kampala, le porte-parole de l'état-major ougandais, Felix Kulayigye, a rejeté les conclusions des experts de l'Onu en parlant à leur sujet de "sottises totales". Le rejet par les autorités ougandaises des accusations onusiennes ne changement rien à la réalité qui est vécue sur le terrain. La RDC n’a cessé de porter des accusations contre son voisin ougandais sur son ingérence dans ses affaires intérieures.
Depuis qu'un rapport d'étape de l'Onu a mis au jour, en juin, des liens entre Kampala et les rebelles du M23, l'Ouganda a récemment cherché à faciliter une solution négociée au conflit.
Dans un entretien accordé aux journalistes congolais en juillet dernier, le président de la RDC, Joseph Kabila avait dit envisager « toutes les solutions » pour mettre fin à la guerre, évoquant notamment des solutions politiques, diplomatiques et militaires ou la combinaison des trois. Une position qu’il a du reste soutenue au cours d’une conférence de presse qu’il a organisée en marge du XIVe sommet de la Francophonie.
Cette position avait tranché net avec celle des évêques catholiques qui s’étaient exprimés contre toute négociation avec ceux qui ont agressé leur pays, ainsi celle du gouvernement qui avait rejeté toute démarche tendant à négocier avec les rebelles du M23.
Des sanctions et des condamnations improductives
La publication du rapport des experts de l’Onu a poussé les autorités congolaises de réclamer des sanctions à l'encontre du Rwanda et de l'Ouganda. Une énième réclamation, parmi tant d’autres antérieurement faites, qui n’ont rien apporté sinon quelques sanctions et des condamnations si timides que les deux pays incriminés n’en ont jusqu’à présent senti les a coups au point de les pousser à abandonner leur entreprise fort contreproductive. Le porte-parole du gouvernement congolais, Lambert Mende, a demandé que les personnalités mentionnées dans le rapport de l'Onu comme soutenant la rébellion fassent l'objet de sanctions des Nations unies. "C'est plus important que jamais, étant donné que nous disposons aujourd'hui des preuves que le drame qui se joue actuellement au Nord-Kivu est l'objet de manipulations de criminels occupant des positions de pouvoir", a-t-il déclaré.
Le XIVe sommet de la Francophonie tenu à Kinshasa les 12, 13 et 14 octobre, a, pour sa part, condamné l’agression rwandaise. Mais cette condamnation a pour autant changé quoi que ce soit sur la position de l’agresseur ? D’autant plus que les chefs d’Etat et de gouvernement n’ont fait condamner le Rwanda sans prendre contre lui une quelconque sanction.
En définitive, depuis que Kigali et Kampala sont pointés du doigt, depuis que l’un et l’autre sont condamnés avec la dernière énergie –selon l’expression consacrée – pour leur soutien présumé aux rebelles du M23, avons-nous remarqué un changement de position de leur part ? Les choses se sont améliorées dans le sens souhaité par l’agressé ? Rien. Sinon, des démentis et des rejets des allégations et accusations en cascade.
Pourquoi alors continuer à prendre des sanctions qui restent improductives et dont le Rwanda et l’Ouganda se sont toujours moqués ? Pourquoi continuer à les condamner dès lors que les choses restent inchangées sur le terrain ?
Mais bien des observateurs se demandent pourquoi Kinshasa tarde à rompre ses relations diplomatiques avec Kigali, en dépit de tout le vent mauvais qui souffle entre les deux pays ?
C’est ce que demande le président national de l’Association africaine de défense des droits de l’homme (Asadho). Pour Jean-Claude Katende, le gouvernement doit rompre les relations diplomatiques avec le Rwanda accusé de soutenir la rébellion dans l’Est de la RDC. Ce qui va exprimer la désapprobation de Kinshasa face au comportement fort troublant d’un voisin peu vivable.
J.-C Katende, qui revenait du Sommet de la Francophonie à Kinshasa, a fustigé le comportement peu responsable des pays membres de l’OIF, qui ont juste condamné l’agression de la RDC par le Rwanda dans leurs discours sans qu’ils n’aient pris de sanctions à l’encontre de ce pays, dans leur déclaration finale, sinon leur appel au Conseil de sécurité de l’Onu à prendre des sanctions contre les différents groupes armés dont le M23.
Kléber Kungu
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