dimanche 18 août 2013
Pasteur Esther Luhunu : « La carrure des délégués ne me stresse pas »
Modératrice du Synode de la CEC
Pasteur Esther Luhunu : « La carrure des délégués ne me stresse pas »
Le Synode 2013 de la Communauté évangélique du Congo (CEC) tenu du 26 juillet au 2 août à Luozi est au passé. Ceux qui y ont participé ont retenu quelques noms des personnes qui y ont participé. Celui de la révérende Esther Luhunu Nzabani née Mahema, principalement. Modératrice du Synode de la CEC, cette femme de caractère, 53 ans, a mis d’accord bien des délégués au Synode par sa manière de diriger les débats. Diplômée de la prestigieuse faculté de théologie évangélique de Bangui (FATEB) en République centrafricaine, cette femme, fille d’un pasteur, d’apparence inoffensive sort ses griffes une fois à l’œuvre : ses prédications en français particulièrement font mouche et ses modérations forcent le respect et l’estime, affirme un ami. Depuis 2005 qu’elle préside à la tête de cette instance de l’Eglise, les assises du Synode de la CEC qu’elle modère s’achèvent sur des notes de satisfaction. L’Observateur a rencontré l’une des 10 pasteurs que compte la CEC, après le 16ème synode de l’après centenaire de cette communauté religieuse. Interview-portrait.
Après le Synode 2013, quelque chose est resté gravé dans la mémoire de plus de 300 participants. Si les assises se sont bien achevées, la révérende Esther Luhunu, modératrice de ce Synode, depuis 8 ans, y a été pour beaucoup. Lorsqu’on lui demande si c’est facile pour une femme d’être modératrice, elle répond, son sourire éternel aux lèvres, arme essentielle pour détendre souvent un climat chaud des débats houleux : « En ce qui me concerne, c’était facile, parce que le statut d’une femme mariée ne constitue pas un obstacle dans la modération. En outre, mon mari, le révérend Nzabani Benadiela, est souple ; il m’encourage beaucoup dans l’exercice de mes fonctions et m’aide pour mon épanouissement. »
Une tête aux multiples responsabilités
Et pourtant cette mère de famille aux yeux voilés derrière des verres légèrement teintés qui cachent mal une personnalité aussi intelligente que sage et qui mettent en exergue un regard scrutateur, ne chôme pas. Sa démarche à pas comptés et silencieuse accuse une tête aux multiples responsabilités que des épaules fortes portent avec succès. En dehors des charges de son Eglise, elle assume la direction générale et la représentation légale du Centre évangélique de coopération (Ceco) à Kimpese. La révérende Esther Luhunu peut s’enorgueillir d’être la première femme à occuper ce poste depuis la création de ce Centre en 1908, donc plus de 100 ans après.
En quoi consiste le travail de modérer ? « Mon travail consiste à diriger les débats, maintenir l’ordre, apaiser les tempéraments, orienter, orienter les débats pour les gens à prendre une décision concertée. J’ai été choisie modératrice depuis le Synode de la CEC tenu en juillet 2005. Les critères sont : voir article 10 des Statuts de la CEC (version française), à savoir : être expérimenté, savoir lire et écrire, être humble et brave, être rassembleur et non pas désorganisateur, être membre de l’organe pour lequel on est désigné modérateur », répond celle que les fidèles de sa communauté appellent affectueusement Ma Esther.
Polyglotte, elle manie avec perfection le kikongo, langue de travail pendant le Synode. Son parler au débit lent procède d’une personne qui ne dit pas n’importe quoi ni comment sans l’avoir pesé au préalable. Modérer des assises durant des longues journées appelle une préparation morale, matérielle et spirituelle. Esther Luhunu Mahema, fille d’un pasteur et aînée d’une fratrie de 5 enfants, dont 2 filles et 3 garçons, s’y prépare à fond. « Sur le plan moral, il faut avoir des dispositions positives, être optimiste que les choses vont bien se dérouler par la grâce de Dieu. Sur le plan matériel, je prends le temps de lire, de comprendre et de maîtriser les différents documents liés au Synode. Sur le plan spirituel, je prends beaucoup de temps dans la prière avant et pendant mes assises du Synode. Je me confie totalement à Dieu en comptant sur son intervention efficace », convie-t-elle, la voix fluette.
« Ce qui me stresse, ce sont quelques questions de certains participants qui sont parfois hors sujet ou qui tendent à créer la subversion, les conflits »
Ni voix ni taille imposantes, mais d’une personnalité qui fait le reste, Esther Luhunu est loin d’être stressée en modérant les assises. Elle détient plusieurs secrets, dont son caractère qui l’aide à s’imposer devant les carrures des délégués. Mais il lui arrive d’avoir quand même du stress. Pourquoi ? « La carrure des délégués ne me stresse pas. Ce qui me stresse, ce sont quelques questions de certains participants qui sont parfois hors sujet ou qui tendent à créer la subversion, les conflits », se défend-elle. Mais les secrets de ses compétences reconnues par la plupart des participants au Synode 2013 résident dans « la confiance totale en Dieu, la maîtrise de la matière à débattre, la maîtrise de soi et de la langue de travail, les expériences du passé, le respect des principes de la modération, le niveau d’études et l’esprit de synthèse. »
En définitive, « le tout réside dans la méthodologie du travail. Pour arriver à la décision concertée, il ne s’agit pas seulement de le faire par force ni contrainte, mais il faut la motivation et la synthèse du sujet à voter. C’est-à-dire aider les délégués à bien comprendre le sujet du débat en vue de les pousser à prendre une décision conséquente sans contrainte. On ne doit pas pousser les délégués à prendre une décision sous pression », conclut-elle en démonstration de ce qui l’aide à mettre tout le monde d'accord, à s’imposer sans effort, sans utiliser la méthode forte, sans hausser la voix.
Pasteur aumônier et professeur à l'école secondaire et à l’Université protestante de Kimpese (UPK), pasteur de paroisse et modératrice de la pastorale communautaire de la CEC forte d’une centaine de pasteurs (hommes et femmes), Ma Esther ne manque pas d’expériences. Mais en dépit de toutes ces expériences qu’elle a emmagasinées au fil des années, elle ne peut pas briguer la magistrature suprême de son Eglise. Son âge en est le principal frein. « Ce n’est plus possible selon le critère de l’article 64, point 3 des Statuts de la CEC (version française) qui stipule que chaque candidat présidentiable doit remplir les conditions suivantes : -…être âgé d’au moins 40 ans et n’être pas à un an, 2 ou 3 ans de la retraite. En ce qui me concerne, quand le mandat de 4 ans (2013-2017) accordé à nos mandataires à la présidence prendra fin, j’aurai 58 ans, donc, il me restera seulement 2 ans pour que j’aille en retraite selon les dispositions légales de la CEC (60 ans pour les femmes et 65 ans pour les hommes) », regrette-t-elle.
Propos recueillis par Kléber Kungu
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