jeudi 7 février 2013
Kinshasa et le M23 adoptent le rapport sur l’évaluation de l’accord du 23 mars
Pourparlers de Kampala
Kinshasa et le M23 adoptent le rapport sur l’évaluation de l’accord du 23 mars
Après deux mois de discussions, Kinshasa et le M23 ont signé mercredi 6 février à Kampala un premier texte où chacun reconnaît que l'accord du 29 mars 2009 (entre Kinshasa et la rébellion du CNDP d’où est issu le M23) et dont l’application ou la non-application par le gouvernement congolais avait été la revendication principale du M23, n'a pas été totalement appliqué. Mais à ce stade, la médiation et les deux parties parlent déjà de la réconciliation qui pointe à l’horizon, tout en s’engageant à poursuivre les pourparlers jusqu’au bout. Kinshasa et le M23 sur la voie de la réconciliation, alors qu’il reste encore trois points à l'ordre du jour ?
Le gouvernement congolais et le M23 ont donc examiné et adopté le rapport sur l’évaluation de l’accord de paix signé le 23 mars 2009 entre Kinshasa et l’ancienne rébellion du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP).
Cette évaluation constitue le premier point à l’ordre du jour des négociations entre les deux parties qui ont lieu à Kampala depuis le 9 décembre 2012. Les rebelles avaient refusé de l’adopter au mois de janvier, accusant le secrétariat de la facilitation d’avoir falsifié les termes utilisés par les deux délégations. Le M23 avait alors exigé la « présentation d’un autre texte avec des termes fidèles ».
L’accord du 23 mars 2009 prévoyait notamment la reconnaissance des grades des anciens rebelles du CNDP au sein de l’armée congolaise, le retour des réfugiés mais également la pacification du Nord-Kivu.
Selon le communiqué de la CIRGL, après la treizième réunion plénière des pourparlers de Kampala, les deux parties se sont finalement exprimées sur la mise en œuvre de cet accord, article par article. Le facilitateur a regroupé les dispositions de l’accord en trois catégories. Il s’agit : des dispositions pleinement mises en œuvre, des dispositions partiellement mises en œuvre et des dispositions qui n’ont pas été bien traitées.
Cripsus Walter Kiyonga, ministre ougandais de la Défense et facilitateur de ces pourparlers, a relevé que sur les trente-cinq points de l’accord de Goma, le gouvernement a totalement réalisé quinze. Il a notamment cité l’intégration des ex-militaires du CNDP au sein des FARDC et la mutation de ce mouvement politico-militaire en parti politique. Cripsus Kiyonga a également évoqué la création par le gouvernement des comités locaux permanents de conciliation.
Il a ajouté que huit points ont été «partiellement réalisés». Parmi les points non réalisés, le facilitateur a évoqué la non-création de la police de proximité et le non-retour des réfugiés dans leur terre d’origine.
Douze points de cet accord, a poursuivi le facilitateur, n’ont jamais été réalisés ou réalisés de manière inadéquate. Au regard de cette constatation, Cripsus Kiyonga a recommandé la mise en place d’un mécanisme de suivi et d’évaluation.
La satisfaction de Kinshasa
La délégation gouvernementale s’est réjouie de l’adoption de ce rapport. « Je suis content que les éléments du M23 ont fini par reconnaître les réalisations du gouvernement. Ce qui n’est pas réalisé se retrouve sûrement dans l’agenda du gouvernement pour une réalisation future », a indiqué le sénateur Thekys Mulaila de la Majorité présidentielle.
De son côté, le porte-parole de la délégation du M23, Bertrand Bisimwa, a estimé que l’évaluation présentée dans le communiqué est une preuve que son mouvement avait raison d’affirmer que le gouvernement congolais n’avait pas respecté l’accord conclu en 2009.
Kinshasa a toujours soutenu avoir appliqué en grande partie cet accord. Pour sa part, le député Konde Vila, un autre délégué gouvernemental, a déclaré que Kinshasa avait respecté ses engagements à 75 %.
Lors de la création du M23, les rebelles revendiquaient l’application de l’accord du 23 mars. Par la suite, ils ont ajouté d’autres points relatifs notamment à l’état de droits, à la sécurité et à la gestion socio-économique du pays.
Optimisme diplomatique
Même si le médiateur ougandais Crispus Walter Kiyonga affiche un optimisme « diplomatique » sur l’avancée des pourparlers de Kampala, il y a lieu d’observer une grande prudence et une réserve, d’autant plus que le plus dur est devant les négociateurs.
Si pour traiter un seul point des quatre prévus durant ce dialogue il a fallu aux négociateurs deux mois, de combien de temps auront-ils besoin pour épuiser les trois autres points restants qui sont inscrits à l’ordre du jour de ces négociations ?
Ce qui reste à traiter est considéré par les rebelles comme les problèmes de fond. Ces problèmes de fond, c’est la sécurité, la politique, le social et l’économie. Quoiqu’il en soit, Kinshasa campe toujours sur sa position de départ : il n’est pas question de « répondre positivement aux revendications qui ne tiennent pas compte de la Constitution ».
Est-ce les hommes de Jean-Marie Runiga sont prêts à l’entendre de cette oreille ? C’est là toute la problématique dont dépend la suite, mieux l’aboutissement des pourparlers dont on ne cesse de prédire l’échec.
Menace sur Goma
Entre temps, des nouvelles en provenance du Nord-Kivu et du Sud-Kivu ne prédisent rien de calme ni de quiétude. Il y a quelques jours, l’on a appris que les rebelles du M23 et leur parrain ne sont distraits et se préparent dans l’éventualité d’un échec de Kampala. Une nouvelle menace d’attaque de Goma, chef-lieu du Nord-Kivu, par les hommes de Sultani Makenga, est toujours imminente, et que des militaires rwandais sont également prêts à les soutenir dans cette entreprise suicidaire.
Pendant ce temps, les Sud-Kivutiens ont emboité le pas à leurs frères du Nord-Kivu en créant une coalition meurtrière qu’ils ont dénommée Union des forces révolutionnaires du Congo (UFRC), un ramassis de 12 groupes rebelles dont le président du Comité de Coordination et du Haut conseil provisoire est Gustave Bagayamukwe Tadji Bagus, un candidat député national de 2011. L’UFRC ambitionne de prendre les armes pour déstabiliser le régime de Kinshasa…
Quoique ce mouvement « politico-militaire » assure n’avoir aucun lien avec le M23, il est vrai qu’il représenterait en réalité un nouveau front, portant la même exigence : la déstabilisation des institutions nationales.
Au Katanga aussi des mouvements armés ont été réactivés tandis que dans la capitale congolaise on parle de l’arrestation il y a plus d’une semaine des groupes d’« infiltrés » venus de Brazzaville. A plusieurs centaines de kilomètres de Kinshasa, une autre affaire inquiétante fait état de l’arrestation par la police sud africaine de 19 « comploteurs », des rebelles présumés du M23 qui suivaient un entraînement militaire dans une zone isolée de la province de Limpopo, dans le but de renverser le régime du président Kabila.
Dans tout cela, l’avènement de la Force internationale neutre (FIN) censée éradiquer tous les groupes armés qui pullulent dans l’Est de la RDC semble ne plus préoccuper la communauté internationale. Qui en parle de moins en moins. Et si elle arrive à en parler, on sent que la forme de cette force est loin d’être la même qu’au moment où en était née l’idée de sa formation. Aujourd’hui, l’option est levée : composée de 2 500 hommes, la FIN sera intégrée dans la Monusco.
Près de trois mois ont passé depuis la prise d'assaut des rebelles du mouvement du 23 mars (M23) sur Goma, à l'est de la République démocratique du Congo (RDC), sous le regard impuissant des casques bleus, et l'Onu se dit déterminée à ne plus revivre cet affront. "Nous n'avons pas vocation à combattre et l'entrée dans la ville de ces rebelles armés sous nos yeux a eu un effet désastreux", admet un haut fonctionnaire des Nations unies. "Si le M23 menait demain une nouvelle offensive ...
Aujourd’hui, l’idée de la création de la Force neutre a évolué au point que l’Onu, refroidie par les critiques acerbes qui lui avaient été assénées après la prise de la ville de Goma par les rebelles du M23 sous le regard impuissant des casques bleus de la Monusco. Trois mois plus tard, toute honte bue, l’Onu se dit déterminée à ne plus revivre cet affront et envisage de créer une brigade d’intervention rapide.
Dans son dernier compte rendu au Conseil de sécurité, mardi 5 janvier, le chef du département des opérations de maintien de la paix, Hervé Ladsous, l’a confirmé, évoquant un « vide sécuritaire » qu’il a appelé à combler. « Nous n’avons pas vocation à combattre et l’entrée dans la ville de ces rebelles armés sous nos yeux a eu un effet désastreux », admet un haut fonctionnaire des Nations unies. « Si le M23 menait demain une nouvelle offensive contre Goma, nous ne pourrions faire beaucoup mieux qu’en novembre 2012.. »
D’où l’urgence d’une action militaire contre les groupes armés, insiste cette même source.
Pour ne plus voir de grande ville tomber aux mains de groupes armés, l’Onu veut intégrer à sa Mission pour la stabilisation du Congo (Monusco) une brigade d’intervention rapide de 2 500 hommes chargés d’« imposer la paix », autrement dit de mater toute rébellion armée devenue menaçante. Et parce que l’Onu se veut « dans l’offensive », des drones seront déployés.
Jusqu’ici, les 17 000 casques bleus présents en RDC intervenaient « en appui de l’armée congolaise », surtout pas pour s’y substituer.
Kléber Kungu
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