Est-ce un hasard ou une simple coïncidence ?
Pourquoi tous les chemins mènent à Luanda en passant par Kinshasa ?
En ce début du mois de mai, Luanda
et Kinshasa étaient devenues des étapes indispensables qu’ont empruntées deux grandes personnalités
politiques qui se sont succédé d’une manière étonnante : le secrétaire
d’Etat américain John Kerry et le président tanzanien Jakaya Kikwete. A un
rythme tel que les plus avisés des observateurs n’ont pas manqué de se demander
si c’est une coïncidence ou un simple fait fortuit.
Comme qui dirait, depuis un certain temps,
tous les chemins mènent désormais à Luanda en passant par Kinshasa. C’est John
Kerry, secrétaire d’Etat américain, qui a ouvert cet axe politico-diplomatique.
Le patron de la diplomatie américaine est rentré dans son pays, en passant par
la capitale angolaise après un séjour de deux jours dans la capitale congolaise
où il s’est entretenu avec le président congolais, Joseph Kabila.
Il sera relayé, quelques jours plus
tard, par le président tanzanien, Jakaya Kikwete, qui a emprunté le même
itinéraire. D’où la lancinante question qui taraude les esprits : Qu’est-ce
qui se trame dans les deux capitales :
congolaise et angolaise ? D’autant plus que la stature de ces deux
personnalités n’est pas de moindre.
Commençons par la République
démocratique du Congo où, avant l’Angola, Josh Kerry a rencontré son président
Joseph Kabila avec lequel il s’est entretenu sur plusieurs questions, notamment
politiques. Les deux personnalités ont parlé d’élections pour lesquelles les
Etats-Unis d’Amérique ont déboursé une bagatelle de 30 millions de dollars
américains qu’ils souhaitent « libres, démocratiques et
transparentes ». John Kerry a demandé à Kinshasa d’éviter toute
perturbation du processus démocratique en tentant, notamment, d’apporter des
modifications à la Constitution actuelle.
En plus, depuis décembre dernier, la
sécurité en RDC s’est stabilisée dans sa partie orientale, en dépit de quelques
poches de résistance entretenues par d’autres groupes armés réfractaires à
l’appel à la démobilisation que Kinshasa leur a lancé. Une stabilité
sécuritaire à laquelle les Casques bleus de la Monusco – dont les Etats-Unis
d’Amérique sont les grands contributeurs - ont grandement contribué.
L’émissaire d’Obama avait donc tout intérêt à venir féliciter Joseph Kabila
pour cette victoire et l’encourager, par conséquent, à conserver cet acquis
chèrement obtenu.
Ascendance sur la région
Quant au président angolais, José
Eduardo dos Santos, son pays ne cesse de
prendre de l’ascendant sur la sous-région en assumant la présidence tournante
de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs, assumant et
consolidant ainsi son leadership régional de manière évidente.
Tout ce regain d’influence de Luanda
peut donc s’expliquer à première vue par la présidence de la CIRGL qu’il assume
actuellement. De ce point de vue, Luanda passe pour le centre des opérations
pour toute initiative de stabilisation de la région des Grands Lacs.
Fort de tous ces atouts, l’Angola,
dont la grande influence dans la région n’est plus à démontrer, passe pour la
clé de voûte de la stabilisation de la région. C’est à Luanda que John
Kerry, a bouclé son premier voyage en
Afrique, après une escale de 48 heures à Kinshasa. Quelques jours plus tard, le
président tanzanien, Jakaya Kikwete, a emprunté le même parcours. Il est allé,
à l’instar de l’émissaire de Barack Obama, rencontrer le président angolais,
José Eduardo dos Santos, après s’être entretenu à Kinshasa avec Joseph Kabila.
Toutes ces visites effectuées l’une
après l’autre dans un temps record est loin d’être une coïncidence de
calendrier ou un simple fait du hasard, concluent bien des observateurs. Qui
pensent qu’elles procèdent d’un schéma préalablement conçu à l’échelle
internationale. Sans plus de précision.
La seule précision est que,
ajoutent-ils, la RDC de Joseph Kabila a été tour à tour au centre des
entretiens, à Luanda, entre Dos Santos et John Kerry puis, entre Dos Santos et
Jakaya Kikwete. Sur quoi ont porté ces entretiens ? Mystère. C’est la
partie cachée de l’iceberg.
Gendarme de la région
L’Angola occupe, par conséquent, une
place très stratégique en Afrique centrale. Sur les plans économique et
militaire. Première puissance économique et militaire indéniable, l’Angola a tous
les atouts pour jouer véritablement le rôle de gendarme dans la région. D’où,
son influence grandissante dans tous les dossiers brûlants de la région,
particulièrement ceux de la RDC, toujours en proie à une instabilité chronique
dans sa partie orientale et avec laquelle Luanda partage plus de 2 000 km de
frontières, en raison de la proximité des deux pays. Voilà qui peut expliquer le
caractère de plus en plus incontournable de Luanda dans l’épineuse crise du
Congo Kinshasa.
Voilà qui peut expliquer que tous
les chemins mènent désormais à Luanda en passant par Kinshasa et que devaient
suivre John Kerry et Jakaya Kikwete pour un objectif précis.
A tout prendre, les observateurs
avisés pensent qu’il existe quelque chose qui se trame à Luanda, notamment en
ce qui concerne la place de la RDC dans le nouveau puzzle qui se dessine dans la
région. En effet, le passage quasi simultané de l’homme d’Etat américain et du
président tanzanien dans les capitales congolaise et angolaise, ajoutent-ils,
tient à un schéma bien précis, dont les contours ne devraient pas tarder à
paraître au grand jour.
Barack Obama avait-il un message à
transmettre à Joseph Kabila et à José Eduardo dos Santos par l’entremise de
Jakaya Kikwete ? s’interrogent-ils, perspicaces. Ou qu’il avait fait
transmettre par son ministre des Affaires étrangères et sur lequel il devait
insister en envoyant le Tanzanien Jakaya Kikwete ? ajoutent-ils.
Un Jakaya Kikwete dont le rôle et
l’aura politico-stratégique dans la région sont évidents. Pour rappel, au plus
fort de la crise en RDC confrontée avec la rébellion de fabrication rwandaise,
Jakaya Kikwete a pris position de manière responsable et d’un ton ferme en
faveur de la RDC en demandant au Rwanda, réfractaire au dialogue avec les
génocidaires présumés de 1994, notamment les rebelles des FDLR, de dialoguer
avec eux. Et face à la désinvolture de Paul Kagamé, Jakaya Kikwete n’a pas
manqué de brandir l’arme de la menace.
En plus, la Tanzanie est l’un des
pays contributeurs en contingents de la Brigade d’intervention rapide de l’Onu
qui appuient militairement les FARDC dans leur traque des groupes armés dans
l’Est de la RDC.
Est-ce à dire que l’Angola commence
à prendre la place qu’occupait jadis l’Afrique du Sud ? Quoiqu’il en soit,
tout porte à croire qu’il existe quelque chose – sans nom – qui fait courir autant
de dirigeants sur l’axe Kinshasa-Luanda et que Luanda est devenu un partenaire
important dans la stabilisation de la région des Grands Lacs.
Kléber Kungu
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