Conséquences d’une situation mal gérée par la République du Congo
Brazzaville et
Kinshasa engagés dans une guerre de papiers
La République du Congo a
décidé de conditionner toute entrée sur son sol à tout Congolais de Kinshasa à la présentation d’un
passeport, tandis que la RDC
a rendu la monnaie de sa pièce à son voisin en imposant le port d’un passeport
et d’un visa à tout Congolais de Brazzaville désireux de fouler son territoire.
Décidément, la poussée de fièvre dans les relations entre Kinshasa et Brazzaville,
considérées comme les villes les plus rapprochées au monde est loin de baisser.
Depuis le refoulement musclé et dans des conditions inhumaines des
ressortissants congolais du territoire du Congo Brazzaville par ses autorités,
les relations bilatérales entre les deux pays ont eu coup de froid, à la limite
de rupture. Après la guerre des communiqués, aujourd’hui Kinshasa et
Brazzaville sont engagés de plain-pied dans un bras de fer des papiers.
C’est
mercredi 21 mai que le ministre de l'Intérieur, Richard Muyej, a annoncé cette
mesure exigeant aux ressortissants du Congo-Brazzaville voisin de se munir d’un
passeport et d’un visa s’ils veulent entrer sur son sol, le simple
laissez-passer exigé avant n’étant plus cours légal.
La
mesure des autorités de Kinshasa rendait ainsi la pareille à leurs homologues
qu’elles accusent d’avoir endurcies les conditions de voyage des Congolais de
RDC désireux de se rendre à Brazzaville en traversant le fleuve Congo,
frontière naturelle entre les deux pays.
Qui
viennent de se lancer dans ce que nous pouvons appeler bras de fer des papiers.
Une crise qui n’est pas sans entraîner des conséquences fâcheuses dont les
populations civiles sont les premières victimes. Même si une réunion interministérielle
entre représentants de Kinshasa et de Brazzaville est envisagée ce vendredi 23
mai, il y a à craindre une crise qui risque de s’éterniser.
Une
telle éventualité a toutes les chances d’être au détriment des Congolais de la République démocratique
du Congo et appelle plusieurs analyses qui doivent interpeller ses dirigeants
qui ont fait de l’obtention de ces deux documents un chemin de croix, une
démarche particulièrement éprouvante. En
effet, au Congo Kinshasa, si on connaît la date à laquelle on amorce des
démarches de l’obtention des deux documents, ce n’est pas le cas pour celle de
la fin des démarches.
Absence de cartes d’identité
Selon
certaines personnes, la décision des autorités de Brazzaville d’exiger un
passeport à tout Congolais de Kinshasa pour traverser dans leur territoire est
motivée par l’absence en RDC d’une carte d’identité, la carte d’électeur tenant
lieu de carte d’identité.
D’où
la lancinante question : pourquoi, depuis la disparition de la carte pour
citoyen à l’époque du régime Mobutu, aucune autre carte d’identité ne l’a
remplacée ? suivie d’autres : sa mise en circulation exige-t-elle des
moyens colossaux que le trésor public est incapable de prendre en charge ?
Si colossaux qu’ils dépassent ceux investis dans la fabrication des cartes
d’électeur ?
Que
se passe-t-il chez les voisins en matière des documents administratifs ? A
en croire une journaliste de la
RDC ayant fait ses études universitaires à Brazzaville, au
Congo-Brazzaville, l’obtention de tous les documents administratifs est
gratuite et que le délai d’obtention est entre une semaine pour des démarches
entreprises dans un circuit non officiel et moyennant quelques billets de
banque, et un mois dans le circuit officiel.
Conséquences
Au-delà
de tous ces aspects, le refoulement de Brazzaville ne sera pas sans
conséquences. Brazzaville connaît déjà une grande baisse d’activités de premier
plan. Toutes sortes de métiers peu qualifiés exercés alors par des Congolais de
Kinshasa ne le sont plus à ce jour.
Par
ailleurs, toutes les activités exercées dans une ambiance très animée au beach
Ngobila ont pris un sérieux coup. Par conséquent, tous ceux qui en tiraient des
dividendes, officiellement ou officieusement, ne peuvent que regretter la
survenue des événements malheureux de Brazzaville. Comme quoi, « ba
coop ebebi» (les affaires ont pris un coup), disent certains analystes
connaisseurs de ce milieu
En
plus, des activités commerciales qui nourrissaient des milliers de familles
aussi bien à Kinshasa qu’à Brazzaville, tournent actuellement au ralenti, sinon
pas du tout. Le secteur des sports n’en sort pas indemne de cette situation mal
gérée par les autorités de Brazzaville. Quatre équipes de hand-ball, versions
féminines et masculines, du Congo Kinshasa qui devraient participer aux 30èmes
championnats d’Afrique des vainqueurs de coupe à Oyo, au Congo-Brazzaville,
n’ont plus effectué le déplacement.
A tout
prendre, Brazzaville a mal géré une situation qui ne pouvait dégénérer en une
telle crise. Pour une grande opération policière baptisée "Mbata ya
bakolo" (la gifle des aînés, en lingala) depuis début, le
Congo-Brazzaville a cru tout se permettre, qu’il avait le droit de vie et de
mort sur les ressortissants de son voisin, par conséquent, qu’il pouvait les
malmener, au nom de la « gifle des aînés », comme il entendait.
Même si officiellement,
cette opération est destinée à combattre une recrudescence du banditisme
imputée aux étrangers, et entre autres aux "kuluna", ces délinquants
de Kinshasa armés de machettes réfugiés au Congo Brazzaville où ils avaient fui
l’opération « Likofi » (coup de poing en lingala) menée par la police
kinoise.
A ce jour,
plus de 170 000 ressortissants vivant à Brazzaville ont été refoulés et
sont rentrés au bercail, en situation régulière ou non. En effet, au début l’opération
concernait les personnes en situation irrégulière. Mais craignant une expulsion
de force, même en règle, et face à la montée d'une hostilité manifeste de la
population brazzavilloise, des dizaines de milliers de ressortissants du Congo
Kinshasa sont rentrés de gré au bercail, abandonnant pour la plupart tout sur
place.
Kléber Kungu
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