Uvira, le malade aux mains des psychosociaux et des socioéconomistes
Comment le théâtre de SFCG soigne les malades d’Uvira (4)
(Par Kléber Kungu, envoyé spécial à Uvira/Sud-Kivu)
Les malades, Uvira, comme le reste du Sud-Kivu, en compte plusieurs milliers. Des malades de toute sorte. Autant de malades, autant de traitants. Nous en avons rencontré un à Luvungi (une localité entre Uvira et Kamanyola) : un psychosocial, Search For Common Ground, RDC [Recherche d’un terrain d’entente, NDLR], appuyé par le HCR. Son médicament le plus redoutable, c’est le théâtre. Par lequel il véhicule le message qui essaie de guérir tant de plaies qui rongent les populations civiles d’Uvira. A notre arrivée, une banderole surplombait l’endroit où se produisait le groupe théâtral et disait ceci en swahili : « Jirani ni ndugu. Je unakubali maneno nayo ? » [Le voisin, c’est mon frère. Pourquoi tu acceptes ça ?, NDLR] Ca veut dire les violences, les viols, les pillages…
C’est tout sourire, très concentré, manchonnant du chewing-gum, que nous avons rencontré le chef bureau de SFCG-Uvira, Alessandro Totoro. Il était en train de suivre la production de son groupe théâtral, composé de 6 acteurs, dont 4 garçons et 2 filles pour la plupart des étudiants), entouré d’une grande foule de la population de Luvungi toute joyeuse de suivre le message que le groupe lui transmettait sous forme de comédie ou d’humour. Le destinataire du message en riait à gorge déployée…
« Le voisin, c’est mon frère. Pourquoi tu acceptes ça ? » Le message en disait long sur la situation sécuritaire de cette partie de la République démocratique du Congo. L’Est est en proie, depuis plusieurs années, à des conflits de toute sorte qui écartèle la population. Au-delà de ce message, le groupe théâtral était en train de sensibiliser la population sur la prise de conscience sur certains problèmes. Par exemple, des parents dont les enfants restés au village se sont battus, pendant qu’eux étaient aux champs, sont rentrés et ont commencé à se battre à leur tour à cause de ce problème.
Ce genre de problèmes, la région en vit en nombre important au point où ils dégénèrent en conflits très aigus qui aboutissent parfois à des meurtres. Pendant la production, les acteurs font intervenir la population en lui demandant parfois des solutions pour tel ou tel problème posé. La population intervient en proposant elle-même des solutions : c’est le théâtre participatif, nous explique Alessandro Totorino.
« Le théâtre aide des gens, va-t-il nous expliquer, à être eux-mêmes acteurs du changement de leur comportement ». Le numéro un de SFCG RDC – une ONG américaine qui existe en RDC depuis 2001– estime que cette partie – le psychosocial – est souvent négligée par les humanitaires et qu’on pense plus médical, finance. « Cette partie est nécessaire, renchérit-il, dans cette déchirée pour reconstruire le tissu social pour être acteurs de leur propre destin ».
Donc, selon Alessandro Totoro, la partie psychoscociale du traitement des maux qui rongent les habitants des deux Kivu est très capitale, d’autant qu’elle les amène à chercher, par le message que véhicule les acteurs de théâtre, la solution à leurs problèmes.
Un des acteurs, assistant au programme, Mwarabu Amin Paul, va renchérir en ces termes. « Les enfants qui affectent les parents par leurs conflits et ces conflits affectent des villageois. En jouant avec la population, nous la sensibilisons sur leurs propres problèmes »I, nous a-t-il expliqué.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire