Comme poursuivi par un signe
indien
Beni endeuillé par un nouveau massacre
Dix-sept personnes au moins ont été
tuées à l'arme blanche dans la nuit de mardi 3 à mercredi 4 février dans le
territoire de Beni qui ne cesse de perdre ses habitants depuis octobre 2014 après plusieurs massacres attribués à des
rebelles ougandais des ADF-Nalu.
Ce dernier massacre a
eu lieu dans un quartier périphérique de la ville de Beni.
La police de Beni a retrouvé
dix-sept corps massacrés à coups de machettes, alors que la fouille continue. Il
s'agit du premier massacre signalé dans la région de Beni depuis l'annonce, le
13 décembre, de la reprise d'une offensive conjointe de l'armée congolaise et
de la Monusco contre les rebelles ougandais des Forces démocratiques alliées
(ADF).
D'octobre à décembre, la région de
Beni avait été le théâtre d'une série de massacres imputés à ces rebelles
musulmans opposés au président Yoweri Museveni et présents en RDC depuis 1995.
Ces attaques, qui ont coûté la vie à plus de 260 civils, ont été
essentiellement perpétrées à l'arme blanche (machettes, haches, houes)
L’offensive armée conjointe FARDC-
Monusco a fait subir de lourdes pertes aux rebelles ougandais des ADF au
premier semestre 2014. Les rebelles ougandais ont dû reprendre les poils de la
bête après un relâchement de ces opérations à la fin du mois d'août.
La reprise de l'offensive de l'armée
congolaise et de la Monusco en décembre a contribué à ramener le calme et le
couvre-feu imposé chaque soir à la ville de Beni a été levé le 23 janvier
Des massacres attribués aux ADF ont
néanmoins été signalés par la Monusco dans une région de la Province-Orientale
limitrophe du territoire de Beni, où, selon l'ONU, trente personnes ont été
tuées fin décembre.
Pourquoi une reprise des massacres
dans le territoire de Beni. ? s’interrogent les habitants de Beni. Sans
doute parce que, selon un observateur militaire international, "on
n'entend plus beaucoup parler de l'opération [militaire contre les ADF] ces
temps-ci"
A environ 250 km au nord de Goma,
Beni, qui est une place commerciale importante pour la région, est le fief des
Nande, une communauté dont les dirigeants s'étaient ralliés massivement à une
milice soutenue par l'Ouganda pendant la deuxième guerre du Congo (1998-2003).
Massacres attribués aux ADF
Les massacres perpétrés à Beni sont
généralement attribués aux rebelles ougandais des ADF-Nalu. Mais où sont les
ADF aujourd'hui ? Etaient-ils en mesure de mener ces attaques? Avant la prise
de leur principal camp, en avril 2014, leur chef - Jamil Muluku - et sa famille
se seraient éclipsés, mais seraient selon les experts onusiens toujours au Nord-Kivu,
précise RFI.
Un deuxième groupe - constitué de
plus d'un millier d'hommes et dirigé par le commandant en second Seka Baluku -
aurait trouvé refuge dans la forêt. Par ailleurs, poursuivis et attaqués par
l'armée congolaise, deux cents d'entre eux seraient morts de faim, entre fin
juin et août 2014, selon le groupe d'experts.
Les ADF seraient donc affaiblis,
mais leur commandement resterait intact. Néanmoins, malgré les opérations
menées par l'armée congolaise, en 2014, le leadership et les réseaux de soutien
des ADF n'ont été que très peu touchés, ce qui pourrait leur permettre de se
reconstituer et de mener ces attaques meurtrières contre le populations civiles
de Beni.
Qui
sont les ADF ?
Le rapport du groupe d'experts des
Nations Unies, dont RFI s’est procuré une copie, permet, pour la première fois
- à travers les témoignages d'une quarantaine d'ADF et la saisie de documents
et d'armes dans leurs camps - de mieux comprendre le groupe armé le plus
mystérieux de l'est de la RDC.
Les ADF sont bel et bien un groupe
armé, essentiellement ougandais avec pour noyau dur le chef Jamil Muluku, sa
famille - et notamment ses fils –, ainsi que les membres historiques de cette
rébellion.
Dans les différents camps qu'ils
occupaient jusqu'aux opérations des FARDC, ils s'entraînaient, cultivaient,
priaient. C’est toute une organisation que l'on découvre au fil des pages de ce
nouveau rapport. Ils ont ainsi été capables de recruter jusqu'en 2014 en
Ouganda et en RDC.
Certaines recrues ont joint
volontairement la rébellion, parfois même avec leur famille ; pour d'autres, on
leur a fait miroiter des opportunités économiques ; d'autres encore ont été
enlevées et obligées de suivre une formation militaire. Ceux qui refusaient
étaient détenus et menacés jusqu'à céder. On découvre aussi les Bazana - les
civils kidnappés - qui devenaient les esclaves personnels du chef des ADF et
qui étaient forcés de se convertir à l'islam.
Réseaux de soutien en RDC, en Ouganda
et au Rwanda
Dans les deux cours de justice -
dont l'une était présidée par Jamil Muluku lui-même - refuser de se convertir,
chercher à s'enfuir ou bien commettre un adultère étaient des crimes passibles
de la peine de mort.
Ce groupe islamiste n'a toutefois
pas de liens apparents - disent les experts - avec des organisations
terroristes étrangères comme les shebabs ou al-Qaïda.
En revanche, ces experts onusiens montrent - documents à l'appui - que les ADF ont un réseau de soutien en RDC, en Ouganda et au Rwanda qui semble se déplacer librement. Ils ont également un réseau en Grande-Bretagne qui envoie de l'argent et des armes dont certaines proviennent des stocks de l'armée congolaise. Il s’agit d’armes chinoises que Pékin destinait à Kinshasa, mais qui oubliait malgré l'embargo de le mentionner au groupe d'experts.
En revanche, ces experts onusiens montrent - documents à l'appui - que les ADF ont un réseau de soutien en RDC, en Ouganda et au Rwanda qui semble se déplacer librement. Ils ont également un réseau en Grande-Bretagne qui envoie de l'argent et des armes dont certaines proviennent des stocks de l'armée congolaise. Il s’agit d’armes chinoises que Pékin destinait à Kinshasa, mais qui oubliait malgré l'embargo de le mentionner au groupe d'experts.
Kléber Kungu
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