Congo: Kinshasa
Loi électorale modifiée : ce qui a été modifié
Pendant plusieurs
jours, le peuple et les dirigeants se
sont affrontés dans un combat législatif qui a vu, semble-t-il, le peuple
remporter une victoire à l’arraché. Baissant du coup la situation tendue qui a
prévalu durant tous les rounds d’un combat qui a vu le pire éviter de justesse.
Mais qu’est-ce qui a été modifié dans cette Loi controversée présentée par le
Gouvernement et votée par L’Assemblée nationale ? Un alinéa litigieux a été
retiré, mais pas le reste, apprend-on.
Cette
incise à l'origine de trois jours de violences à
Kinshasa et dans d'autres villes du pays
depuis le 19 janvier, a été d'abord corrigée par le Sénat, avant d'être carrément
extirpée de la version finale et unique du projet de loi adoptée par le
Parlement.
D’après quelques sources
dont Jeune Afrique, la nouvelle loi électorale apporte quelques changements ou
innovations dans l'organisation des scrutins en République démocratique du
Congo. Une dizaine en tout. :
Les Congolais résidant à l'étranger pourront (enfin)
voter
Si
en 2006 et en 2011, les Congolais se
trouvant à l'étranger le jour du scrutin n’avaient pas voté, l'une des
conditions pour être électeur étant la présence sur le territoire national, la
nouvelle loi leur permet de voter cette fois-ci en en retirant cette obligation
– d’être présent sur le territoire national le jour du vote, uniquement pour
l'élection présidentielle. Du moins à condition de disposer d'une carte
d'identité et d'une carte consulaire.
Le recensement toujours exigé pour
l'organisation des législatives
Dans le projet de loi initial, il est prévu que la liste électorale soit "actualisée en tenant compte de l'évolution des données démographiques et de l'identification de la population". Une incise qui conditionne la tenue des prochains scrutins présidentiel et législatifs, en l'occurrence, à l'organisation préalable du recensement général dans le pays. C'est cett modification qui est à l’origine des émeutes qu’a connues la RDC et qui a divisé la classe politique congolaise.
Dans le projet de loi initial, il est prévu que la liste électorale soit "actualisée en tenant compte de l'évolution des données démographiques et de l'identification de la population". Une incise qui conditionne la tenue des prochains scrutins présidentiel et législatifs, en l'occurrence, à l'organisation préalable du recensement général dans le pays. C'est cett modification qui est à l’origine des émeutes qu’a connues la RDC et qui a divisé la classe politique congolaise.
Le Sénat a dû reformuler la
disposition controversée pour apaiser les esprits surchauffés. Mais la source
rapporte que cette option n'est cependant pas passée à la commission mixte
paritaire. Celle-ci a choisi de la supprimer du texte. Mais des voix s'élèvent
pour dénoncer le maintien du recensement comme préalable à l'organisation des
législatives en RDC.
Pour l'élection des députés
nationaux, le nombre des sièges à pourvoir dans chaque province ne sera plus en
effet déterminé par le nombre des électeurs enrôlés de la circonscription
considérée, mais suivant "les données démographiques actualisées".
Le fichier électoral doit être disponible sur internet
Contrairement à la loi électorale en vigueur, le projet de loi devant être
promulgué sous peu par le chef de l’Etat Joseph Kabila oblige à la Commission électorale nationale
indépendante (Ceni) de "[rendre] disponible sur [son] site internet"
le fichier électoral national.
Un parti doit être agréé au plus tard 12 mois avant
l'enregistrement des candidatures
Pour éviter tous les aventuriers
politiques, l nouvelle Loi électorale prévoit qu’un parti soit agréé au plus
tard 12 mois avant l’enregistrement des candidatures. Désormais, les partis politiques
nouvellement créées doivent être agréés par le ministère de l'Intérieur au
moins 12 mois avant le début de l'enregistrement des candidatures. Ce délai est
réduit à trois mois pour les regroupements politiques. Les transfuges
politiques de dernière minute sont donc prévenus. Par conséquent, si le projet
de loi est promulgué, ils ne pourront plus se présenter aux élections sous
l'étiquette d'un parti créé à la veille du scrutin.
Les Congolais ne pourront voter que le dimanche ou un
jour férié
Si les jours de vote sont laissés à la discrétion de la Ceni, cette
dernière est néanmoins tenue, pour le scrutin direct (la présidentielle et les
législatives notamment), d'organiser l'élection le dimanche ou un jour férié,
entre 6 heures et 17 heures.
Les amendes sont revues à la hausse
Tout perturbateur lors des scrutins seront frappés de fortes amendes
dont plusieurs ont été revues à la
hausse. Un membre de bureau de vote, par exemple, qui retarde ou interrompt le
déroulement du vote sera sommée à payer une somme maximum de 500 000 francs
congolais (environ 540 dollars), par exemple, pour.
Un diplôme de licence (Bac + 5) obligatoire pour être
candidat à la présidentielle
La nouvelle loi prévoit que tout candidat à la présidentielle soit porteur
d’un diplôme de licence (Bac + 5), à
defaut, il devra justifier d’une "expérience professionnelle d'au
moins cinq ans dans le domaine politique ou administratif". Le diplôme de
graduat (Bac + 3) ne suffira plus – comme ce fut le cas en 2006 et 2011 – pour
postuler à la magistrature suprême en RDC. .
Présidentielle : une caution non remboursable de
plus de 100 000 dollars
La
caution non remboursable pour se porter candidat à la présidentielle vient
d’être doublée, passant de 50 millions à 100 millions de francs congolais, soit
environ 108 000 dollars américains (86 000 euros). Question de
décourager des candidatures fantaisistes en grand nombre, comme on en a connu
aux présidentielles antérieures.
La parité homme-femme souhaitée dans les bureaux de
vote
Dans le projet de loi, il est demandé à la Ceni de "[tenir] compte de
la parité homme-femme" dans la composition de ses bureaux de vote
éparpillés dans l'ensemble du territoire national. La loi électorale en vigueur
est muette sur la question.
Des témoins seront associés à l'acheminement des
bulletins de vote
Pour "mieux garantir la vérité des urnes", dans son projet de
loi, le gouvernement autorise les témoins, "qui en font la demande",
à accompagner l'acheminement des bulletins de vote au centre de compilation.
Voici les 10 principales
nouveautés apportées à cette Loi dont la controverse a permis aux Congolais de
s’entretuer pendant trois jours comme dans un combat de boxe à cinq rounds.
Premier round : jeudi le 15
janvier, Kinshasa bruit de la nouvelle sur la modification de la Loi électorale
conditionnant la tenue de la présidentielle et des législatives de 2016 au
recensement de la population. La tension monte d’un cran au sein de
l’opposition politique qui appelle la population à marcher le lendemain.
Kinshasa est plongée dans une psychose qui tarde à se nommer. La plénière de
l’Assemblée nationale est vite reportée au lendemain.
Deuxième round : alors que ce
samedi 17 janvier courant, Kinshasa se réveille sous l’étonnement dû à la
nouvelle selon laquelle, dans la soirée du 16 janvier, date anniversaire de l’assassinat
de M’Zee Kabila, les députés vont se réunir au courant de cette journée dans un
Palais du peuple bien ceinturé par un imposant dispositif policier et
militaire.
Plénière jusqu’à 23 heures 30
La plénière ira, apprend-on, jusque
tard à 23 heures 30. Et la nouvelle tombe, surprenante : les députés -
excepté ceux de l’opposition - viennent d’amender, au forceps, la loi
électorale. Avec pour précision à l’article 8, la présidentielle et les
législatives sont conditionnées aux résultats du recensement de la population –
le premier après celui de 1984 -.. Un recensement, dont les opérations confiées
à l’Office national de l’identification de la population (ONIP), qui a la
chance de prendre plusieurs années et le mérite de permettre au chef de l’Etat
Joseph Kabila d’aller au-delà de son mandat qui expire en décembre 2016. Alors que la Constitution lui
interdit de se représenter pour un troisième mandat.
Troisième round : de lundi 19
au mercredi 21 janvier, la population déferle dans la rue pour manifester
contre le vote de cette loi. Des jeunes délinquants se donnent à cœur joie aux
pillages de certains magasins et boutiques des Chinois particulièrement. Les agents de l’ordre s’interposent dans des
affrontements violents qui font plusieurs morts et quelque 300 personnes
arrêtées..
Quatrième round : la Loi
électorale est envoyée au Sénat pour
examen. Entre temps, la RDC, dans son ensemble retient son souffle en attendant
le « verdict » ds sénateurs. Qui tombe vendredi le 23 janvier, après
un report de 24 heures : l’alinéa litigieux à l’origine des émeutes vient
d’être rejeté. La population lâche un petit ouf de soulagement. En effet, il faut
attendre qu’une Commission paritaire mixte Sénat-Assemblée nationale siège pour
faire le dernier toilettage pour avoir le texte final.
Cinquième round
Cinquième round : dimanche 25
janvier, en fin d’après-midi, la
Commission paritaire mixte annonce les résultats de ses travaux. Par la voix de
leurs présidents respectifs, Léon Kengo wa Dondo et Aubin Minaku, la Chambre
haute et la Chambre basse annonce la bonne nouvelle : les résultats du
recensement général de la population ne conditionnent plus la tenue de la
présidentielle et des législatives qui doivent se tenir en principe au même
moment.
L’annonce de cette nouvelle fait
baisser d’un coup la tension et désamorce en même temps la bombe de
l’opposition avec une nouvelle manifestation à laquelle le population est
appelée lundi 26 janvier.
Les deux protagonistes, groggy sur
le ring, lâchent un ouf de soulagement après trois jours d’émeutes presque sur
l’ensemble (Kinshasa, Goma, Bukavu, Mbandaka, Bunia, Uvira) Mais chacun reste sur ses gardes, à l’exemple
d’un crocodile qui, même endormi, garde un œil en éveil…
La
source rapporte également que ne sont pas modifiés les articles qui exigent des
candidats aux postes électifs des diplômes ou, à défaut, "une
attestation de services rendus délivrée par l’autorité compétente". La Société civile a dénoncé cette
disposition qui risque de déboucher sur l’arbitraire au profit des
candidats non méritants et bénéficiant de privilèges dus à certains critères
subjectifs.
Kléber Kungu
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