Transports
en commun
« Esprit de vie» ou l’école de
Matata
Lorsqu’il ya plus d’une année, le
Premier ministre Matata avait annoncé la disparition progressive sur les
artères de Kinshasa des taxis-bus Mercedes 207 vulgairement appelés
« Esprit de mort », tout Kinshasa s’est levé pour crier au scandale.
Aujourd’hui, tout Kinshasa réalise à peine que l’école de Matata commence de
porter ses fruits. En effet, « Esprit de vie » est venu apporter un
nouveau mode de vie dans le quotidien des Congolais ; voyager autrement et
dignement.
Quelques mois après la mise en circulation
des minibus de marque Hyundai aux privés affiliés à l’Association des
propriétaires de véhicules privés affectés aux transports en commun au Congo
(APVCO) sur les artères de la capitale congolaise, l’opinion kinoise n’a pas
tardé de féliciter la clairvoyance et la gouvernance du gouvernement Matata
sous l’impulsion du chef de l’Etat Joseph Kabila.
Tous ceux qui prennent chaque jour
place à bord de ces minibus Hyundai « Esprit de vie » pimpant neuf ne
tarissent pas d’éloges ni d’admiration à l’endroit du chef du gouvernement
qu’ils ont, quelques mois plus tôt vilipendé pour leur avoir interdit d’importer leurs
« 207 » chéris.
L’admiration vient de tous. A
commencer par les propriétaires à qui Matata Ponyo à céder des véhicules à des
conditions alléchantes. Au prix d’acquisition de 56 000 dollars
américains, chaque acquérir est appelé à rembourser le crédit pendant quatre
ans à raison de… 50 dollars américains chaque jour, après avoir versé, le jour
de l’acquisition, un montant de 8 000 dollars qui a été ramené à
6 500 dollars. Ce qui représente 15% du prix du véhicule, à verser dans un
compte public spécial, afin de permettre de perpétuer le processus.
Le chauffeur à
l’école de Transco
Les chauffeurs, qui pour la plupart,
sortent de la vieille et tristement célèbre garde de « 207 » sont
obligés de passer à un recyclage au centre de conduite de la société Transco
avant de pouvoir toucher au volant d’ « Esprit de vie ».
Question de leur laver quelque peu le cerveau bourré de pratiques tant
décriées par les usagers des taxi-bus « 207 » : mauvais
stationnement, mauvais dépassement, vitesse excessive…
En plus de cela, la majorité de ces
chauffeurs se réjouissent de conduire aujourd’hui des véhicules neufs de leur
vie. Tout se défaisant de la dépendance de receveurs devenus de rétroviseurs.
Les receveurs, à leur tour,
remercient Matata Ponyo d’avoir fait d’eux de travailleurs dignes, au même
titre que les autres travailleurs d’autres secteurs. Plus question – du moins
pour l’instant à l’embarquement – de crier aux passagers les lignes à
desservir. Ces derniers se servent de leurs yeux pour découvrir la ligne à
desservir ou peuvent se renseigner auprès du receveur ou d’autres passagers.
Le receveur made by Matata, bien
habillé, peut désormais s’asseoir durant tout l’itinéraire, à l’opposé du
receveur traditionnel qui n’a cure de sa tenue vestimentaire, le boulot primant
sur tout : tenue vestimentaire souvent sale, ligne à desservir à informer
en criant à tue-tête…
Receveur respectueux
de passagers
En plus, ce receveur « Esprit
de vie » est fort respectueux des passagers. Aussitôt le bus rempli, c’est
respectueusement qu’il demande aux passagers ceux qui ne « paient »
pas de se montrer, car le bus n’autorise que deux par course. S’ils sont plus
de deux, aux autres il demande respectueusement de prendre place à bord d’un
autre bus…
Les mieux servis par Matata sont
sans conteste les passagers. Après avoir voyagé durant des décennies à bord des
véhicules, assis sur des bancs en bois et confinés comme des prisonniers, à
bord de « Esprit de vie » les passagers peuvent désormais voyager
dans des conditions humaines car assis sur des sièges et bien espacés.
Ce qui a fait dire, un jour à un
certain passager « comme si nous sommes dans un avion », alors que de la bonne musique jouait. Et un
deuxième d’ajouter : « Fini
l’orgueil des « 207 ». Ils
doivent tirer déjà des leçons ».
Matata a dû inculquer une autre
notion capitale à ces aspirants à la classe moyenne : le travail en
groupe. Les bus « Esprit de vie » qui desservent sur une même ligne,
comme ceux de la ligne Sainte Thérèse – Zando/Commerce, embarquent les
passagers à tour de rôle, alignés les uns derrière les autres. Comme s’il s’agissait
des bus d’une même entreprise. Il en est de même lorsqu’ils arrivent au
terminus : ils s’alignent attendant que le premier arrivé parte le premier
et que le dernier-venu parte également le dernier. Quelle leçon de gestion
!
Un seul couac : c’est qu’à bord
d’ « Esprit de vie », certains receveurs, sinon tous, refusent de
prendre le dollar et des billets de FC à valeur faciale élevée (5 000 FC
et 10 000 C). Raison : ces billets souffrent d’une si incroyable
contrefaçon.que plusieurs faux billets sont en circulation sur le marché
monétaire.
Quelques conditions
d’éligibilité au crédit
Toute personne désireuse d’acquérir
un véhicule Hyundai « Esprit de vie » est soumise à quelques
conditions d’éligibilité, notamment « être un transporteur (c’est-à-dire ne pas
être en retraite ou en cessation d’activités), être membre effectif de l’APVCO
et être recommandé par elle. Il faudra, en sus, avoir été membre de
l’APVCO avant le 30 juin 2014, pour mettre hors tous les opportunistes qui se
sont rués au portillon de l’APVCO depuis l’arrivée des derniers bus dans la
capitale, désireux d’acquérir à tout prix un véhicule neuf..
En dehors de cela, tous les
bénéficiaires sont tenus d’ouvrir un compte dans l’une des banques désignées
par le Gouvernement pour loger les fonds du Programme ‘’Esprit de vie’’ ;
s’engager à libérer la traite mensuelle du crédit qui sera déterminée, étant
entendu que ledit crédit sera remboursable en quatre ans. Un retard de
paiement de dix jours donnera lieu à une mise en demeure par le cabinet
comptable.
En cas d’absence d’exécution dans
les dix jours suivant la mise en demeure, le véhicule sera retiré, par voie
d’huissier de justice; produire la preuve minimale de solvabilité : un bien
immeuble ou un compte bancaire (dans une banque ou un établissement de
micro-crédit), alimenté régulièrement et mouvementé sur une période d’au moins
6 mois, à dater de la demande de crédit ».
Tout compte fait, par son programme
‘’Esprit de vie’’, « le gouvernement voudrait voir, entre autres, l’émergence
d’une classe moyenne congolaise, objectif phare du chef de l’Etat, en initiant
déjà les petits entrepreneurs au processus du crédit, avec toutes les exigences
requises en matière de gestion et d’orthodoxie managériale ».
Voilà les leçons que l’école de Matata Ponyo est en train d’inculquer à la
population congolaise via ces transporteurs privés. En plus de leçons de
gestion, Matata montre dans quelles conditions humaines peut voyager dans le secteur
des transports en commun.
Des conditions qui ne tardent pas de
réjouir tous les passagers qui prennent joyeusement et quotidiennement place à
bord de « Esprit de vie », à l’image du dessin placé sur chaque flanc
du véhicule, montrant des personnes criant de joie !
Kléber Kungu
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