Le sommet de Luanda sur la RDC annulé
L’offensive contre les FDLR peut-elle attendre ?
Dix jours après l’expiration de
l’ultimatum imposé aux FDLR par la CIRGL et la SADC de se rendre
volontairement, l’offensive des FARDC appuyées par la Monusco tarde à être
déclenchée. Conditionnée finalement à la tenue du sommet de la CIRGL et de la
SADC prévu cette semaine, la traque annoncée des rebelles hutu rwandais est
finalement urgente, le sommet ayant été annulé. Alors que l’Onu piaffant
d’impatience de voir l’offensive lancée
a sommé Kinshasa de le faire dans l’immédiat.
Alors que l’attention de l’opinion
nationale et internationale reste focalisée dans la partie orientale de la
République démocratique du Congo (RDC) attendant
les premiers coups de feu annonçant le début de l’opération militaire des FARDC
appuyées par la Monusco, le sommet de Luanda censé donner le feu vert à cette
traque tant réclamée par Kigali notamment, vient d’être annulé. Par qui ? Par
Luanda. Pourquoi ?
Kigali se réjouit de l’annulation du sommet
Pourquoi Luanda qui avait annoncé la
tenue de cette rencontre cruciale vient de l’annuler, se limitant à dire
laisser la main à l’Onu ? Comme l’on pouvait s’y attendre, l’annulation de
ce sommet qui devait se tenir à la mi-janvier a
réjoui le pays qui ne cesse de réclamer à cor et à cri la traque des
FDLR, en l’occurrence Kigali.
En effet, Louise Mushikiwabo, la
ministre rwandaise des Affaires étrangères avait estimé,, la veille, dans les
colonnes du New Times que le sommet de Luanda était une
« perte de temps et
d’argent » et qu’il fallait agir contre les Forces
démocratiques pour la libération du Rwanda (FDLR). Cependant, l’annulation du
sommet de Luanda a agacé l’Afrique du Sud dont le président en avait confirmé
la tenue.
Et pourtant, c’est cette rencontre
de la CIRGL et de la SADC qui devait confirmer l’option militaire contre les rebelles
hutu rwandais des FDLR sur laquelle insiste le Conseil de sécurité.
Faudrait-il voir dans cette décision
l’une des retombées de la visite en décembre du président rwandais, Paul
Kagamé, en Angola ? Une rencontre qualifiée d’ « historique » par le
chef de la diplomatie angolaise et qui avait permis le rapprochement de Kigali
et de Luanda.
Pourquoi Luanda a-t-il annulé cette
rencontre ? En a-t-il averti le gouvernement congolais, comme Kigali ? Toutefois,
Kinshasa avait évoqué ce sommet, le même vendredi, par la voix de son
porte-parole, Lambert Mende, lors d’une conférence de presse.
Pour le patron de la Monusco, Martin
Kobler, quoique évasif sur la tenue ou non du sommet de Luanda, a réaffirmé que
les Casques bleus de la Monusco étaient prêts à se lancer dans les opérations
militaires contre les FDLR attendant seulement le feu vert de Kinshasa.
Mécontentement
sud-africain
Du côté de Pretoria, l’annulation du
sommet de Luanda a provoqué le
mécontentement. Ce qui pousse Jacob Zuma, en charge des problématiques de sécurité et de défense au sein de la SADC
(Communauté de développement d’Afrique australe), à demander des explications à Luanda. D’autant plus
que Kigali a toujours accusé l’Afrique du Sud qui est membre de la SADC - comme
la RDC - de tout faire pour éviter les
opérations militaires contre les FDLR.
Des accusations qui n’échappent pas également à la
Tanzanie qui est aussi membre de la SADC et fournit des troupes à la brigade de
l’Onu en RDC. Kigali a toujours accusé les autorités tanzaniennes de parti pris
envers les FDLR.
Alors que samedi 10 janvier courant, le ministre
tanzanien des Affaires étrangères, Bernard Membe, a estimé que son pays n’était
pas prêt à prendre part aux opérations militaires immédiates contre les FDLR si
les populations civiles rwandaises parmi les FDLR n’étaient pas clairement
identifiées et protégées.
La Tanzanie favorable à la reddition et au désarmement
Auparavant, le président
tanzanien Jakaya Kikwete a affirmé être favorable à leur reddition et à leur désarmement
volontaire.
Devant le corps
diplomatique à Dar es-Salaam vendredi soir, M. Kikwete a voulu "rétablir
les faits sur la position et le rôle de la Tanzanie dans l’évolution de la
situation sécuritaire dans l’est de la RDC et l’exercice de reddition et de
désarmement volontaire des rebelles des FDLR", les Forces démocratiques de
libération du Rwanda
"Nous avons toujours
soutenu et continuerons de soutenir les efforts pour faire en sorte que l’est
de la RDC soit libéré des groupes armés qui menacent la sécurité du Congo et
des voisins du Congo", a-t-il poursuivi, d'après le discours publié par la
présidence devant le corps diplomatique à Dar es-Salaam vendredi soir.
"Toute déformation de la position de la Tanzanie est le fait de gens
qui prétendent lire dans l’esprit de la Tanzanie" et sont "mal
intentionnées", a-t-il ajouté"
Il est vrai que les
relations entre Jakaya Kikwete et Paul Kagame se sont dégradées depuis 2013,
quand le président tanzanien a suggéré la tenue de pourparlers entre le
gouvernement rwandais et les FDLR
En 2013 également, la
Tanzanie a déployé un bataillon en RDC dans la brigade d’intervention de l’Onu,
qui a défait les rebelles pro rwandais du M23 accusés par les experts onusiens
d’avoir bénéficié de l’appui du Rwanda et de l’Ouganda.
Dix jours après l’expiration de l’ultimatum lancé aux
FDLR pour se rendre, la réalité est que la traque des rebelles hutu rwandais
tarde a être lancée. En dépit du discours très ferme tenu par l’équipe des envoyés spéciaux pour la région
des Grands Lacs dirigée par Said Djinnit quelques jours avant l’expiration de l’ultimatum.
En effet, ceux-ci ont appelé es Forces armées de la
RDC (FARDC) et la Monusco à lancer des opérations militaires.
Plus de 300 FDLR seulement ont déposé les armes
De l’avis général, le désarmement volontaire longtemps
prôné par Kinshasa et la Monusco est loin d’avoir apporté les effets escomptés.
Depuis mai dernier, 337 combattants seulement pour la plupart jeunes et inexpérimentés ont déposé les armes
soit 26% des quelque 1 300 FDLR comptabilisés par les autorités
congolaises en octobre 2012. L'Onu, quant à elle, parle d'au moins
2 000 FDLR et le Rwanda de plus de 3 000.
Quoiqu’il en
soit, l’effectif des FDLR n’est aujourd’hui ce qu’il était hier. Le mouvement souffre entre autres de l'arrestation de ses
deux principaux chefs en Allemagne en 2009, de la reddition de plusieurs de ses
commandants militaires – même si tous ceux qui se sont rendus ne sont pas des
combattants -, des opérations de l'armée congolaise - récemment avec le soutien
des Casques bleus déployés dans le pays, des combats avec d'autres milices en
grand nombre en RDC, et du processus de désarmement et de réinsertion au Rwanda
mis en place par l'Onu.
Quoiqu’on dise, l’option militaire contre les FDLR reste
d’actualité du côté de Kinshasa, même si la date du déclenchement des
opérations n’est pas encore dévoilée sur fond de la pression de la communauté
internationale.
En attendant, la question de savoir pour quelle raison
Luanda a annulé le sommet de la CIRGL et de la SADC sur ce dossier reste encore
sans réponse.
Kléber Kungu
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