Guerre de la technologie audiovisuelle
Le Gabon doté de la TNT, la RDC toujours analogique !
Le Gabon vient d'étonner le monde en basculant vers la télévision numérique terrestre (TNT), alors que certains pays, qui étaient technologiquement plus avancés que lui, comme la RDC, sont encore à la traîne et continuent dans le monde analogique. Ce basculement fait du Gabon le tout premier pays d'Afrique centrale à se doter de la télévision numérique terrestre. Cette nouvelle doit faire réfléchir les autorités congolaises, qui ne cessent de signer accord sur accord et partenariat et partenariat avec certaines firmes qui se présentent comme expertes en la matière, sans qu’aucun signe
Tout est parti le 16 juin 2006, à Genève en Suisse, où s'était achevée la Conférence régionale des radiocommunications 2006, en sigle CRR 06. Durant 5 semaines, des délégués de 104 pays d'Europe, d'Afrique et du Proche-Orient, avaient, sous l'égide de l'Union internationale de télécommunications (IUT), défini et adopté un nouvel accord notamment sur les fréquences devant être exploitées pour la TNT par chaque pays et sur la période de la transition de la Télévision Analogique Terrestre (TAT) à la Télévision Numérique Terrestre. Connu sous le nom de «ACCORD GE 06 », cet accord avait, dans son article 12, fixé le début de la transition vers le numérique au 17 juin 2006 à 1heure UTC (cf. article 12.5) et la fin de la transition au 17 juin 2015 pour les fréquences UHF et jusqu'au 17 juin 2020 pour les fréquences VHF (cf. article 12.6). C’est suivant les recommandations de cet accord, que, contre toute attente, le Gabon vient de se doter de la TNT, étonnant ainsi le monde, alors que certains pays qui étaient technologiquement plus avancés que lui sont encore à la traîne.
Le Gabon, un bond de géant vers la TNT
A l’heure de la démocratisation des Nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC), la TNT est devenu un enjeu socio-économique très important au point que tous les pays du monde ou presque, membres de l’Union Internationale de Télécommunications, s’y investissent pour ne pas rater le rendez-vous du 17 juin 2015. Suivant à la lettre les recommandations de cet Accord, le Gabon d'Omar Bongo, s'était mis «silencieusement» au travail. Un opérateur de télécommunications français spécialisé en TNT avait élaboré un projet de plusieurs milliers d'euros relatif «à l'introduction et le développement de la Télévision Numérique Terrestre dans le paysage audiovisuel gabonais », avec Libreville comme site expérimental. Sans trompette, ni tambour battant, les autorités politiques gabonaises avaient pesé de leur poids pour que la TNT s’installe rapidement dans leur pays. Le 9 octobre 2009, ce qui devrait être un simple d'essai technique du signal expérimental de la TNT s'est alors transformé en un véritable basculement du paysage télévisuel gabonais de l'analogique vers le numérique. Les résultats enregistrés sur le terrain lors de cet «essai» ont dépassé tous les pronostics. Ainsi, au lieu de prolonger la période d'essai, les autorités gabonaises ont carrément choisi de passer directement à l'étape suivante, celle du «tout numérique». Et c’est la ministre de la Communication, Madame Laure Olga Gondjout, qui avait présidé, dans un hôtel de Libreville, la cérémonie officielle de lancement de la TNT à Libreville, faisant ainsi du Gabon le premier pays de l’Afrique centrale à se doter de cette nouvelle technologie audiovisuelle. Cette prouesse technologique inattendue lui a exceptionnellement valu une page entière dans l'incontournable Télé Satellite Numérique, dans son édition de décembre 2009, numéro 240, page 29, sous le titre évocateur « Gabon : la TNT débarque à Libreville ».
L'exploitation et la gestion de la TNT Gabon sont confiées à l'opérateur TNT Africa. Le «bouquet TNT gabonais » propose 40 chaînes publiques et privées, nationales et internationales confondues. Déjà à Libreville, plus de 140 000 foyers sont connectés au réseau TNT. Le chiffre avoisine 300 000 foyers au niveau national.
Pour faciliter l'accès de la TNT à toute la population gabonaise, l'opérateur TNT Africa s'est efforcé de s'adapter aux réalités socio-économiques du pays. Cette politique lui a permis de proposer un abonnement mensuel allant de 1 500 F CFA à 2 000 F CFA. Concrètement, la TNT gabonaise propose plusieurs « bouquets » : primo : le « Bouquet Informations généralisées » comprenant 5 chaînes pour 2 000 F CFA par mois, secundo : Un bouquet proposant 2 chaînes musicales pour un abonnement mensuel de 1 500 F CFA et le «Bouquet Mbolo» comprenant un assortiment de 14 chaînes internationales, en plus des chaînes nationales, pour 2 500 F CFA par mois. Le décodeur, quant à lui, est vendu à 50 000 F CFA. Hormis ces bouquets cryptés et donc payants, les chaînes nationales sont toutes reçues en clair et gratuitement.
Aujourd'hui, les autorités gabonaises se frottent les mains car des signes montrent que, du point de vue social et économique, l'implantation et l'exploitation de la TNT seront très rentables et dépasseront même les prévisions. En effet, dès la mise en exploitation de la TNT, des milliers de Gabonais ont envahi et continuent d'envahir les magasins spécialisés pour se procurer le fameux décodeur. De même, de nouveaux opérateurs Telecom se bousculent au portillon du Gabon pour proposer leurs services. Et le ministère gabonais des PTT trouve en la TNT une occasion de diminuer « la pollution visuelle » de Libreville grâce à l’harmonisation de l’espace urbain en réduisant le nombre de pylônes et des champs d’antennes qui « dénaturent » l’image de la capitale gabonaise.
La TNT en Afrique: état des lieux
La prouesse technologique que vient de réaliser le Gabon nous conduit à faire l’état des lieux de la TNT en Afrique. D’une manière générale, l’Afrique est le mauvais élève de l’UIT. D'après les données en notre possession, seuls 9 pays ont déjà pris le train de la TNT, mais 4 seulement sont vraiment dans le cercle restreint de la véritable TNT: l’Afrique du Sud, le Maroc, le Kenya et enfin le Gabon.
L'Afrique du Sud a débuté ses essais en février 2000. Le 1er novembre 2008, le pays de Nelson Mandela est devenu le tout premier pays africain à entrer «audiovisuellement » dans l'ère de la TNT numérique» et est décidé à basculer complètement au « tout numérique » le 1er novembre 2011. Depuis 2008, l'Algérie prépare timidement son entrée dans le monde de la TNT et estime terminer sa migration vers le « tout numérique » en 2014. Le Maroc, deuxième pays africain à se doter de la technologie TNT, avait entrepris ses essais en février 2007. Il estime abandonner complètement l'analogique en 2015.
L'Ile Maurice, qui a entrepris ses essais le 30 septembre 2005, est aujourd'hui très avancée dans sa chevauchée vers la TNT. Selon les autorités mauriciennes, l'année prochaine, plusieurs villes de cette île seront connectées au réseau TNT mis en place dans la capitale. La Namibie, malgré son économie en déliquescence, a commencé ses essais le 18 février 2005. Les observations techniques enregistrées sur le terrain sont prometteuses. Le Kenya, troisième pays africain à amorcer un virage de 180 degrés vers le numérique, estime achever sa migration en 2015. Le Nigeria qui avait aussi pris le train de la TNT a promis d’être prêt en 2015.
La Tunisie qui a entrepris ses essais expérimentaux en 2001 pourra bientôt devenir le 5me pays africain doté de la TNT. La première phase commencée en 2008 (mais annoncée dès 2004 pour 2006) a consisté en l’installation de 41 émetteurs numériques répartis sur tout le territoire du pays. La seconde phase concernant la numérisation des stations d’émission des programmes télévisés de façon à garantir une couverture numérique du pays à hauteur de près de 90% vient de se terminer.
La «véritable situation» de la RDC en matière de la TNT
Eu égard à ce qui précède, l’on ne peut que se poser cette question : « quelle est la véritable situation de la TNT en RDC ? » Nombreux de nos lecteurs connaissent déjà la réponse. Notre pays est encore au « point mort », nonobstant les annonces soporifiques de Téléconsult, sur son site, selon laquelle la « la TNT sera bientôt opérationnelle en RDC » ou encore «La RDC sur l’orbite des Nouvelles technologies de l’information et de la communication. Sur le terrain, aucun signe matériel n’est visible. Dans nos éditions n° 3271, 3272 et 3273 respectivement de mercredi 9, jeudi 10 et vendredi 11 à dimanche 13 décembre 2009, nous avons consacré un dossier spécial consacré à cette question, intitulé « Paysage audiovisuel congolais, Télévision numérique terrestre en RDC : qui trompe qui ? », en ouverture d’une importance réflexion de M. José Mambwini intitulée « la télévision congolaise émet-elle vraiment (déjà) en numérique ? », comme si nous étions dans le secret de l'alcôve gabonais, nous nous sommes posé la question de savoir , à propos justement de la TNT, qui trompe qui.
Le mutisme observé par les autorités congolaises n'augure rien de bon. Le moins qu'on puisse dire, c'est qu'on ne sait rien du « dossier congolais sur la TNT». Un flou opaque l’entoure. Sinon des déclarations fort tapageuses et fortement médiatisées annonçant l’avènement de la TNT pour bientôt. Un bientôt que nous avons qualifié de biblique. Le seul élément en notre possession, curieusement méconnu de la très célèbre Télé Satellite Numérique, la seule revue francophone spécialisée en TNT dans le monde entier, est les «deux brèves » que nous retrouvons sur le site de la firme italienne Teleconsult qui, tambour battant, nous annonçait, en juin 2008 - la même information relayée par quelques confrères de Kinshasa - l'inauguration du pylône de 150 m érigé par cette firme italienne au centre d'émission de Binza-Pigeon (ouest de Kinshsa).
Depuis, comme des moines bénédictins, presque toutes les chaînes TV de la capitale propageaient la fausse nouvelle d'émettre en TNT. La RDC est-elle vraiment intéressée par la TNT? Est-ce que les Congolais et leurs autorités savent ce que c’est une TNT et son importance ? Est-il des personnes qui profitent de l’ignorance des Congolais en cette matière pour se faire passer pour des docteurs ès TNT et tirer profit de cette situation? De quoi ne dispose pas le gouvernement congolais qu’a le gouvernement gabonais pour qu’il puisse arriver à supplanter notre pays, pourtant potentiellement disposé à acquérir la TNT sans beaucoup de problème et avant le Gabon ? Exceptionnellement la volonté politique.
Les questions valent leur pesant d'or. En effet, lors de la tenue de la CRR 06, nous apprenons avec étonnement que notre pays avait brillé par son absence ou mieux s’était absenté avec brio à ce rendez-vous qui devrait sceller le destin de la T.A.T et inaugurer l'ère de la très intéressante TNT dans le monde. L'absence très remarquée de la RDC est signalée noir sur blanc dans l'article 12, plus précisément dans l'article 12.6 de l'Accord GE 06. Et pourtant la RDC est l'une de rares Administrations (c'est-à-dire pays membres) de l'UIT occupant un statut spécial dans la mesure où elle avait, plusieurs années durant, hébergé le siège régional de l'UIT.
Pourquoi cette absence alors que dans plusieurs réunions antérieures, la délégation congolaise, composée entre autres des valeureux ingénieurs du ministère congolais des PTT, pesait de tout son poids par sa connaissance de la «région», c'est-à-dire du continent africain.
Le bond de géant dans le monde de la TNT réalisé par le Gabon nous incite à interpeller le ministère des PTT afin qu’il nous dise où nous en sommes avec la TNT.
Un projet « DVB-T CONGO » existe mais...
Parce que le développement d'un pays n'est pas de la seule responsabilité de l'État ou de tel ou tel Gouvernement, certains fils du pays résidant en Europe ont usé de leur «carte de visite» dans le monde très fermé de la TNT pour ainsi favoriser le transfert de cette nouvelle technologie dans notre pays sans que cela grève le portefeuille du Trésor public. Nous avons évoqué l’exemple de ce projet tout fait de la TNT configuré sur le site de Kinshasa élaboré, à l’initiative d’un Congolais, par quelques ingénieurs français, membres de l'association loi-1901 (loi française) Solidarite France-Congo, (Sofraco). Dénommé «DVB-T Congo: projet expérimental d'installation et d'exploitation d'une plate-forme DVB-T pour la diffusion et la télédiffusion de la télévision numérique terrestre à Kinshasa et sa périphérie », ce projet de 63 pages contient de très précieuses informations sur la réalisation d'une plateforme TNT dédié au site de Kinshasa. Ces informations concernent notamment le type de «configuration de planification » susceptible d'être adopté pour le site de Kinshasa, le type de « réseau de référence » à privilégier à Kinshasa, les «caractéristiques spécifiques », la «forme géométrique » et surtout le « paramétrage du système informatique » applicables sur le réseau TNT de Kinshasa.
Le projet propose même deux « architectures conceptuelles » pouvant être développées sur le site de Kinshasa. Lors de son séjour à Kinshasa, l'initiateur de ce projet, le Dr José Mambwini (joignable par courriel à l'adresse suivante globalkivideo@yahoo.fr), a voulu le mettre gracieusement à la disposition du Gouvernement congolais. Malheureusement, comme il ne dispose pas d'entrée dans les milieux très convoités et hermétiquement fermés du monde politique congolais, ce précieux projet moisit dans un de ses tiroirs. Nous avons pu le joindre depuis Paris où il est en mission. Sa réaction est prometteuse : « Ce que le Gabon vient de réaliser en un temps record peut également être fait en RDC. Il suffit d’une dose de volonté politique. Concrètement, si la Présidence congolaise et le Gouvernement congolais nous font confiance, s’ils se décident de nous donner un mandat officiel et des moyens financiers conséquents nous permettant de mener des expertises sur le terrain, de trouver un « bon opérateur télécoms exécutant », un bon équipementier en matériels télévisuels numériques de qualité irréprochable, nous pouvons disposer d’ici là d’une infrastructure TNT compatible au standard MPEG-4 pour la ville de Kinshasa ».
Quand on sait que le projet TNT gabonais a coûté beaucoup d'argent au trésor public gabonais, on se demande pourquoi le gouvernement congolais reste sourd à tout ce que nous avons écrit dans nos colonnes.
Que Dino Mandefu, le représentant de Téléconsult en RDC ou lui-même Angelo Parenti, le numéro un de Téléconsult, dise où il en est avec sa TNT que tout Congolais attend avec impatience. Il est temps que la firme Teleconsult sorte de son cocon pour éclairer l'opinion congolaise qui aspire à cette nouvelle technologie, d’autant que c’est elle qui ambitionne de relever le pari de l’avènement de la TNT en RDC.
Kléber Kungu kia Mputu
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